Extraits

"Je n'ai aucun besoin d'apprendre quoi que ce soit sur vos salades de prophéties, de testament et de malédictions et, par les Nornes, je n'en ai strictement rien à carrer ! Dame Laura, vous supposez que je suis porteur du noir-sang ? Grand bien vous fasse. Vous tirez des plans sur la comète à propos de ma semence ? Ne vous gênez pas. Que vous souhaitiez accoucher de l'Antéchrist, éteindre un incendie ou faire pousser un arbre avec, je m'en contrefiche. Mais, je préfère vous avertir que si vous espérer un enfant de moi, pour quelque raison tordue que ce soit, vous allez au devant de sévères désillusions, j'ai partagé les couches d'un certain nombre de femmes au cours des années, pour autant, moi qui suis bâtard, je n'en ai jamais vu un seul naître de mes oeuvres....Si on considère le nombre d'occurrences, je crois que la conclusion s'impose d'elle même."

« Qu’est-ce qu’on va branler, Parleur, maintenant qu’on se retrouve au vert ?

— Il a rutilé quoi, le Pacha ?

— C’était pas dans les cabèches qu’il se défile comme ça, juste après le coup de poing, si ?

— En tout cas, deux sorcières pour lui tout seul, ça va lui déborder des mains. Y’aurait peut-être mieux valu qu’on l’épaule pour en prendre soin comme il faut ! »

Je vous passe la suite des réactions grivoises qui se sont enchaînée pendant deux bonnes minutes en bouffant des tartines et en vidant des godets parce que ça rigolait un peu gras ; mais, comme vous le constatez dans cette libre retranscription, les hommes étaient vaguement nerveux, un peu goguenards et surtout, bien soulagés d’être en vie. Vous savez ce que c’est quand on se retrouve au calme après un assaut ; on a les poumons et l’estomac adoucis, on est délié du ciboulot et on boufferait du lion. Sans compter que ce n’est pas tous les jours qu’on peut aller chatouiller l’Inquisition sur ses terres et revenir pour le raconter. Malgré cela, je ne pouvais pas les autoriser à vous manquer de respect trop longtemps.

« Tout doux, les gars, ce n’est pas parce que ce n’était pas prévu que le Bâtard n’avait pas prévu que ça puisse ne pas être prévu. Pigé ? »

Cautelle, Gigue et Poilane se sont fendus d’un sourire ; les autres m’ont dévisagé comme des coqs qui viennent de trouver une poule en bois au milieu de leur basse-cour.

« Ça veut dire quoi, ça ?

— Ça veut dire que je sais quoi faire, et que vous pouvez toujours vous brosser pour vous tourner les pouces, bande de feignasses ! »

Dùn, en convalescence dans une cambuse bancale de l'étage, cherchait à administrer toute la maisonnée depuis son lit, mais je crois bien que, jusqu'à mon arrivée, Herbeuse transmettait seulement ce qui lui semblait approprié. Prise du pouvoir discrète du médecin sur le patient.

Obtenir un droit de visite s'est révélé ardu, mais j'ai juré craché de ne pas fatiguer la Changesang. Forcément, vu la situation, c'était un mensonge. Lorsque j'ai expliqué que vous m'aviez laissé en charge de la compagnie, elle a eu la réaction d'un brochet ferré; il a fallu batailler, témoins à l'appui, pour qu'elle fasse passer l'idée d'"impossible" à "inimaginable", puis à "complètement stupide".

En haut de la tour, la vingtaine de tireurs devait être en train de recharger. C’était le moment ou jamais de décrocher.

J’ai balancé à Markus un „Schnell!“ bien senti.

Il m’a écrasée entre ses bras puissants et s’est mis à courir, collant volontairement son groin dégueulasse contre mon cou et léchant mon oreille comme si, maintenant qu’il avait senti l’odeur de mon corps, il se promettait de me faire payer en nature le service qu’il me rendait ; je lui ai dit de fermer sa gueule, il puait le musc, la sueur et le sang. Lorenzo, Cul-noir, Gigue, Maille-torche, Six-mai, Liebknecht et Poilane galopaient autour de nous, sautant par-dessus les morts et contournant les agonisants sur la pente du pont et la petite place terreuse sur laquelle elle débouchait.

« Avant de m’asseoir, j’aimerais autant ne pas conserver le petit cadeau que j’ai pour vous plus longtemps que nécessaire. »

Un instant de latence.

Mon comité d’accueil s’entreregarde, puis Willie Stein fait signe à l’Orc de s’en saisir et de le leur apporter. À l’œillade que ce dernier me lance en le prenant, je devine qu’il a compris de quoi il s’agissait. Du fait de l’odeur sans doute.

Je pose mes fesses sur le siège.

« Vous devriez protéger votre bureau, dame Willie, le cuir pourrait vivre assez mal sa rencontre avec le présent en question. »

Après un court laps de réflexion, elle ordonne à un kobold de s’approcher et de placer sa rondache sur le bureau afin que Vuradush vide le contenu du sac dedans.

La tête qui bringuebale à l’intérieur est difficile à reconnaître à cause des hématomes et des deux coups d’épée qui la lardent. Le premier a été donné en diagonale sur le faciès, la brutalité du choc a emporté le nez, détruit un œil et profondément entamé l’os frontal et la pommette ; le second, non moins violent, a enfoncé une partie du côté droit du crâne et du cuir chevelu. Comme un puzzle morbide, l’absence d’une pièce à l’arrière permet d’observer l’intérieur.