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Le caillou noir



Description ajoutée par bole12 2022-03-31T13:37:53+02:00

Résumé

« Attendre. Il n'y avait plus qu'à attendre. Combien de temps faudra-t-il attendre ? Je savais qu'elle ne reprendrait pas conscience. Attendre. Aussi long que les heures qui précèdent un accouchement. Aussi immaîtrisable. On anticipe, on calcule, on projette, les médecins donnent des tables, des échelles, des étalons. Un terme. La vie imprévue. Vous étiez une, et soudain, vous êtes deux. Vous étiez deux, une mère et une fille. Vous êtes seule. Seule dans le lit à tenir dans ma main le caillou noir, chaud et lisse, avec sa petite encoche où je place mon majeur… »

La narratrice vit les derniers jours de sa mère. Chaque moment auprès d'elle fait resurgir les souvenirs. Le temps est chamboulé par la maladie, et l'approche de la mort confronte la fille à l'amour de la mère, avec son lot de non-dits, d'intimité et de dépendances. Se mêlent à la douleur et aux corps abîmés les images du passé. Avec la mère, un milieu et une époque vont disparaître… un monde d'héroïnes ordinaires que la narratrice ne veut pas oublier.

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Classement en biblio

extrait

Extrait ajouté par bole12 2022-03-31T13:43:47+02:00

L’été, d’un coup, a suffoqué ce qui restait de printemps et installé une brûlure, nuit et jour, qui asphyxiait tout. Puis il a fait machine arrière et la chaleur a disparu. Sur la plage normande, en cette fin du mois de juillet, l’air est frais et humide. Seuls les enfants se risquent à l’eau. On marche sur le sable, on pêche à la moule, on somnole au grand air. Les promeneurs passent et repassent. Nous sommes assis sur le banc de la petite terrasse qui tourne le dos à l’hôtel. Je viens de prendre ma décision : annulation du trek, je le dis à mon fils. Je veux aller voir maman, ça s’aggrave. Il acquiesce tout en faisant remarquer que, depuis plus de sept mois à présent, il n’y a pas une semaine, un mois, sans que nous nous demandions combien de temps il reste. Sans que nous fassions dépendre la moindre décision que nous prenons de ce temps que nous savons compté sans en savoir la mesure exacte. Et chaque fois que nous allons lui rendre visite, nous constatons une dégradation de son état. Mais rien n’annonce un épisode dramatique. Sauf qu’à présent elle a de la fièvre depuis plusieurs jours.

Je ne veux pas partir. Nous n’irons pas marcher dans l’île que nous avions prévu de traverser ensemble.

J’appelle l’Ehpad où elle est hospitalisée depuis plusieurs mois, depuis qu’elle a quitté le service de réanimation pour les soins intensifs puis les soins palliatifs. Je demande à l’infirmière de lui dire que je viendrai après-demain, sans l’inquiéter. Oui, elle vous réclame.

Je ne crois pas qu’elle savait que je devais partir avec mon fils cette semaine.

Je ne pensais pas qu’elle m’attendait.

L’infirmière me répète que je fais bien de venir, elle est de plus en plus faible, la fièvre est élevée, c’est mieux d’être là, de ne pas s’éloigner trop, de ne pas être à l’étranger, même pendant une semaine, une seule, tout peut aller vite à présent. Venir dès demain ? On ne peut pas savoir, quelques jours, peut-être plus, peut-être moins.

Mon fils a entendu. Il détourne la tête en direction du Havre, longtemps. Ses yeux ont rougi quand il croise mon regard, tourné encore vers la plage, devant nous.

La mer n’a pas de forme. Elle agite l’eau, porte toute sa masse sans peine et sans à-coup, l’emmène au loin, la ramène, la remporte. Elle est grise, métallique, indifférente. Elle nous oppose son dos préhistorique écrasé par la lumière.

Elle ride et hérisse la surface. Elle s’élève et s’écroule.

Elle respire.

Elle se retire.

Sur la plage elle laisse des rigoles et puis les efface.

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Date de sortie

Le caillou noir

  • France : 2022-02-01 (Français)

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