Le Cavalier masqué

" Soudain, elle arracha l'épaulette de sa robe et, à demi nue, elle hurla:

- Oui, elles me le paieront, cette vieille garce de comtesse de Darlington et cette petite sotte, cette petite oie blanche de Panthéa dont vous rêvez, Rodolphe, de faire votre épouse ! Je les écraserai, je les chasserai de la cour aussi facilement que je jette cette brosse sur le plancher !

Et, saisissant sur la coiffeuse une brosse auréolée de pierres précieuses, elle la jeta de toutes ses forces sur le plancher. La brosse rebondit à plusieurs reprises à travers la chambre. Rodolphe, qui avait prévu ce qui allait se produire, fit un geste pour tenter de l'arrêter dans sa course folle. Mais elle lui échappa et, dans un dernier bond, elle heurta une table, passa par l'une des fenêtres et disparut.

Rodolphe et Barbara se précipitèrent sur le balcon. Au dessous-d'eux, quelques personnes se promenaient dans le jardin privé. La brosse avait atterri sur la tête d'un promeneur, un homme d'un certain âge, et lui avait enlevé son chapeau. Rodolphe et Barbara se regardèrent et, ensemble, éclatèrent de rire.

- Voilà un petit incident qui pourrait bien me mettre un duel sur les bras, dit Rodolphe.

Barbara était très calme maintenant. S'approchant de Rodolphe, elle lui caressa la joue.

- Vous êtes trop distingué et trop raffiné pour épouser cette petite campagnarde, dit-elle. Après tout, je pourrais peut-être moi-même vous épouser... quand vous serez marquis.

Rodolphe cessa de sourire.

- Pourquoi pas ? fit-il. Mais voilà, quand serai-je marquis ?

- Comptez sur moi pour vous aider, dans toute la mesure de mes moyens, répondit Barbara. Mais il ne faut pas vous attarder ici. Si le roi vous surprenait dans ma chambre, je ne pourrais plus plaider convenablement votre cause. D'ailleurs...

Elle cessa de parler. Un bruit de voix leur parvenait du couloir. Pour sortir de la chambre, il n'y avait qu'une seule porte. Rodolphe était-il perdu ? "