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– Don Fernando est en sûreté ; mais, Madame, continua
Sancha, votre vie et la mienne ne tiennent qu'à un fil. Don Blas a des soupçons. Demain matin, il va menacer sérieusement
Zanga, et lui faire parler par le moine qui confesse cet homme, et a tout empire sur lui. Le conte que j'ai fait n'était bon que pour parer au danger du premier moment.
Afficher en entierAu milieu de l'égarement d'une attaque de nerfs, les demimots de Sancha disaient qu'un instant après que Zanga avait eu rapporté chez elle le coffre de ses marchandises, un homme tout sanglant s'était élancé dans sa chambre un poignard à la main.
– Je viens de tuer un volontaire royaliste, avait-il dit, les camarades du mort me cherchent. Si vous ne me secourez, je suis massacré sous vos yeux…
– Ah ! voyez ce sang sur ma main, s'écria Sancha comme hors d'elle-même, ils veulent me tuer !
Afficher en entierZanga, que l'on avait chargé rapidement par crainte de retour de don Blas, avait pris le coffre de façon que don
Fernando se trouvait avoir la tête en bas ; la douleur qu'éprouvait Fernando dans cette position devint insupportable ; il espérait arriver bientôt : quand il sentit le coffre immobile, il perdit patience ; un grand silence régnait dans la rue ; il calcula qu'il devait être au moins neuf heures du soir.
Afficher en entierLes heures fuyaient rapidement, le jour baissait déjà ;
Fernando lui raconta l'inspiration soudaine qui lui était venue le matin à la vue du coffre. Ils furent tirés de leur ravissement par un grand bruit qui se fit vers la porte de la chambre. C'était don
Blas qui venait chercher sa femme pour la promenade du soir.
– Dis que tu t'es trouvée mal à cause de l'excessive chaleur, dit don Fernando à Inès. Je vais me renfermer dans le coffre.
Voici la clef de ta porte ; fais semblant de ne pas pouvoir ouvrir, tourne-la à contre-sens, jusqu'à ce que tu aies entendu le bruit que fera la serrure du coffre en se refermant.
Afficher en entier– Nous serons peut-être attaqués ici cette nuit, dit-elle à don
Fernando. Le chef de ces brigands est ennemi personnel d'un contrebandier qui est mon ami. Cette boutique serait la première pillée. J'arrive de Grenade ; je viens d'obtenir de dona
Inès, qui après tout, est une bien bonne femme, la permission de déposer mes marchandises les plus précieuses dans sa chambre.
Don Blas ne verra pas ce coffre, qui est plein de contrebande ; si par malheur il le voit, dona Inès trouvera une excuse.
Afficher en entierPour faire sa cour au parti régnant, don Blas avait obtenu qu'une moitié du palais de l'inquisition, où il habitait, serait donnée à des religieuses clarisses. Ces dames s'y étaient établies, et venaient d'achever leur église. Dona Inès y passait sa vie. Dès que don Blas sortait de la maison, on était sûr de la voir à
genoux devant l'autel de l'Adoration perpétuelle.
Afficher en entier– Quand je m'éloigne de vous, Inès, poursuivit don Blas, vous restez à parler seule avec Sancha. Elle est gentille, elle vous fait rire ; moi, je ne suis qu'un vieux soldat chargé de fonctions sévères ; je me rends justice, je suis peu aimable. Cette Sancha avec sa physionomie riante doit me faire paraître à vos yeux plus vieux de moitié. Tenez, voilà la clef de ma caisse, donnez-lui tout l'argent que vous voudrez, tout celui qui est dans ma caisse si cela vous plaît, mais qu'elle parte, qu'elle s'en aille, que je ne la voie plus !
Afficher en entierLes yeux du vieillard se remplirent de larmes. La timide Inès tira de son sein un petit chapelet qui avait touché la robe de la madone del pilar, et ses jolies mains en serraient la croix avec un mouvement convulsif. Les yeux du terrible don Blas s'attachèrent sur ces mains. Il remarquait ensuite la taille bien prise, quoique un peu forte de la jeune Inès.
Afficher en entierDon Blas s'avançait lentement dans la rue d'Alcolote, regardant de côté et d'autre les maisons avec ses yeux de lynx.
Comme il passait devant l'église on sonna une messe ; il se précipita de cheval plutôt qu'il n'en descendit, et on le vit s'agenouiller auprès de l'autel. Quatre de ses gendarmes se mirent à genoux autour de sa chaise ; ils le regardèrent, il n'y avait déjà plus de dévotion dans ses yeux. Son œil sinistre était fixé sur un jeune homme d'une tournure fort distinguée qui priait dévotement à quelques pas de lui.
Afficher en entieron Blas s’avançait lentement dans la rue d’Alcolote, regardant de côté et d’autre les maisons avec ses yeux de lynx. Comme il passait devant l’église on sonna une messe ; il se précipita de cheval plutôt qu’il n’en descendit, et on le vit s’agenouiller auprès de l’autel. Quatre de ses gendarmes se mirent à genoux autour de sa chaise ; ils le regardèrent, il n’y avait déjà plus de dévotion dans ses yeux. Son œil sinistre était fixé sur un jeune homme d’une tournure fort distinguée qui priait dévotement à quelques pas de lui.
« Quoi ! se disait don Blas, un homme qui, suivant les apparences, appartient aux premières classes de la société n’est pas connu de moi ! Il n’a pas paru à Grenade depuis que j’y suis ! Il se cache. » Don Blas se pencha vers un de ses gendarmes, et donna l’ordre d’arrêter le jeune homme dès qu’il serait hors de l’église. Aux derniers mots de la messe, il se hâta de sortir lui-même, et alla s’établir dans la grande salle de l’auberge d’Alcolote. Bientôt parut le jeune homme étonné.
— Votre nom ?
— Don Fernando de la Cueva.
L’humeur sinistre de don Blas fut augmentée, parce qu’il remarqua, en le voyant de près, que don Fernando avait la plus jolie figure ; il était blond, et, malgré la mauvaise passe où il se trouvait, l’expression de ses traits était fort douce. Don Blas regardait le jeune homme en rêvant.
— Quel emploi aviez-vous sous les Cortès ? dit-il enfin.
— J’étais au collège de Séville en 1823 ; j’avais alors quinze ans, car je n’en ai que dix-neuf aujourd’hui.
— Comment vivez-vous ?
Le jeune homme parut irrité de la grossièreté de la question ; il se résigna et dit :
— Mon père, brigadier des armées de don Carlos Cuarto (que Dieu bénisse la mémoire de ce bon roi ! ) m’a laissé un petit domaine près de ce village ; il me rapporte douze mille réaux (trois mille francs) ; je le cultive de mes propres mains avec trois domestiques.
— Qui vous sont fort dévoués sans doute. Excellent noyau de guérilla, dit don Blas avec un sourire amer.
« En prison et au secret ! » ajouta-t-il en s’en allant, et laissant le prisonnier au milieu de ses gens.
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