Le complexe de la bonne fée

Quand la musique de mon réveil retentit, j’ouvre les yeux avec une petite douleur côté gauche. Ma bosse me rappelle sa présence. Je me prépare comme hier et opte pour une tenue tendance mais confortable. Je passe une jupe que je détourne avec des baskets du même rose poudré que mon haut. Je choisis des boucles pendantes, pas trop imposantes afin de souligner mon port de tête. Je me maquille un peu plus pour tenter de cacher ma bosse, en vain. Elle refuse de disparaître et encore moins d’avoir l’air moins grosse. Je ne peux pas plus la dissimuler, alors tant pis, je vais faire avec.

Au bureau, tout le monde me demande comment je me suis blessée. Je réponds juste que je me suis cognée. La vérité est souvent plus simple que le mensonge. J’observe Arthur d’un œil discret. Je remarque que la secrétaire de direction vient souvent prendre des renseignements. Elles sont au moins quatre, mais c’est quasiment toujours Angéline. Elle sait que je suis sa responsable et qu’elle pourrait me questionner, mais je n’ai jamais insisté pour qu’elle le fasse. À chaque fois ou presque, c’est à lui qu’elle s’adresse.

Elle repasse ainsi une fois dans l’après-midi et je la vois rosir sous son regard. Cet homme est-il aveugle pour ne pas percevoir l’effet qu’il lui fait ? Ou ne voit-il pas qu’elle fait tout pour être en sa compagnie ? Il faut que je creuse ce point.

Je n’ai pas le temps de me poser plus de questions que l’heure de la fin de journée approche. Il ne faut pas que je reproduise le fiasco d’hier. Je pars avant lui et me place dans la rue sur l’autre trottoir. D’ici, je pourrai le suivre sans me faire voir et, cette fois, je garde un œil sur ma direction. Il sort à peine quelques instants après et enfile ses écouteurs. Il marche à pas vifs. Cette fois, je tiens le rythme. Il s’engouffre dans la bouche de métro et je le suis. C’est risqué de le rejoindre sur le quai, mais je ne veux pas m’avouer vaincue. J’y vais et passe derrière lui comme si je ne l’avais pas vu. Arthur fixe les rails. Il est en pleine réflexion. J’aimerais savoir à quoi il pense.

Deux stations plus tard, on reprend la marche. Cependant, pour peu de temps : il pénètre dans un refuge pour animaux. Je sais qu’il fait du bénévolat, et désormais, je sais exactement où. J’observe un moment la bâtisse. Des bruits de bêtes en viennent. Il ne s’agit pas de hurlements désespérés comme certains pourraient le croire. Ce sont juste de petits aboiements. Je n’ai pas le choix pour en savoir plus sur ma cible, il faut que j’entre.