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Une robe en lambeaux ondulait à la branche d’un pin en décomposition. Elle évoquait au vieil homme une chanson de sa jeunesse, à propos d’une robe accrochée à un fil à linge. Sauf que ce n’était pas le vent du sud de la chanson, mais les eaux de fonte glaciales d’un torrent. Au fond, c’était le calme plat, et il avait beau n’être que dix-sept heures, par un jour de mars que la météo disait sans un nuage, la lumière était chiche une fois filtrée par une couche de glace et quatre mètres d’eau. L’arbre et la robe se trouvaient donc dans une étrange pénombre verdâtre. Le vieil homme avait cependant réussi à déterminer qu’il s’agissait d’une robe d’été, bleue à pois blancs. De couleur plus vive autrefois, peut-être, il ne savait pas, tout dépendait sans doute du temps qu’elle avait passé retenue par la branche. Elle battait désormais dans le courant sans fin, qui la secouait et la tiraillait quand il était au plus tumultueux, et se faisait lavant et caressant par eaux basses, mais ne la déchiquetait pas moins petit à petit pour autant. De ce point de vue, cette robe déchirée était comme lui, songea-t-il. Elle avait jadis eu de la valeur pour quelqu’un, une jeune fille ou une femme, elle avait caressé le regard d’un homme, les bras d’un enfant. Mais aujourd’hui, comme lui, elle était perdue, sans fonction, captive, arrêtée, muette. Ce n’était qu’une question de temps avant que les jours qui passaient et le courant n’arrachent la dernière parcelle de ce qui avait été.

« Qu’est-ce que vous regardez ? » entendit-il demander derrière son fauteuil. Bravant les douleurs musculaires, il tourna la tête et leva les yeux. Un nouveau client. Le vieillard avait tendance à oublier plus de choses qu’avant, mais jamais un visage qui était passé chez Simensen Chasse & Pêche. Celui-ci ne voulait ni arme ni munitions. Avec un peu d’entraînement, on pouvait à leurs yeux identifier les ruminants, cette partie de l’humanité qui avait perdu l’instinct de tuer, qui n’était pas dans le secret de l’autre partie : rien ne donnait jamais si intensément le sentiment d’être vivant que de loger une balle dans un grand mammifère bien chaud. Le vieillard supposait qu’il voulait un hameçon ou une des cannes à pêche rangées dans les rayonnages au-dessus et au-dessous de l’écran de télévision, éventuellement une caméra, un piège photographique du présentoir à l’autre bout du magasin.

« Il regarde Haglebuelva. » C’était Alf qui avait répondu. Son gendre les avait rejoints. Il basculait d’avant en arrière sur ses talons, les mains dans les grandes poches de la longue veste de tir en cuir qu’il portait toujours au travail. «L’année dernière, avec le fabricant, on a installé une caméra sous-marine dans la rivière, en contrebas de la cascade Norafossen. Donc maintenant, on a le direct sur l’échelle à saumons vingt-quatre heures sur vingt-quatre et on peut savoir avec précision quand les poissons commencent à remonter le cours d’eau.

— Et c’est quand ?

— Il y en a deux ou trois en avril, mai, mais le véritable débarquement ne commence pas avant juin. Les truites fraient avant les saumons. »

Le client sourit au vieillard. «Vous êtes un peu en avance, non ? Vous avez vu des poissons ? »

Le vieil homme ouvrit la bouche. Il pensa les mots. Il ne les avait pas oubliés. Mais aucun ne sortit. Il referma la bouche.

« Aphasie, déclara Alf.

— Comment ?

— Il a eu une attaque, il ne parle plus. Vous cherchez du matériel de pêche ?

— Un piège photographique, répondit le client.

— Donc vous êtes chasseur ?

— Chasseur ? Non, merci bien. J’ai trouvé des excréments devant mon chalet de Sørkedalen et ça ne ressemblait à rien que j’aie déjà vu, donc j’ai pris une photo et je l’ai mise sur Facebook en demandant ce que c’était. J’ai tout de suite eu des réponses de montagnards. C’était un ours. Un ours ! Dans les bois, à vingt minutes de voiture et une demi-heure de marche de l’endroit où nous nous sommes actuellement, au centre de la capitale de la Norvège.

— C’est merveilleux.

— Ça dépend de ce que vous entendez par merveilleux, j’y emmène ma famille. Alors moi, cet animal, j’aimerais bien que quelqu’un l’abatte.

— Je suis chasseur, et je comprends très bien ce que vous voulez dire, mais vous savez que même en Norvège, où la population d’ours est restée très nombreuse jusqu’à assez récemment, c’est à peine s’il y a eu des attaques fatales au cours des deux siècles derniers. »

Il y en a eu onze, songea le vieillard. Onze personnes tuées depuis 1800. La dernière en 1906. Il avait peut-être perdu sa motricité et l’usage de la parole, mais pas encore toute sa mémoire, et il était lucide. Enfin, globalement. Parfois, il avait l’esprit un peu confus, il voyait son gendre et Mette, sa fille, échanger un regard, et il savait qu’il s’était mélangé les pinceaux. Les premiers temps après qu’ils avaient repris la direction du magasin qu’il avait ouvert et dirigé pendant cinquante ans, il se rendait utile. Maintenant, depuis sa dernière attaque, il ne faisait que rester assis là. Non que ce fût si terrible. Depuis la mort d’Olivia, il n’attendait finalement pas grand-chose de la vie. Il lui suffisait d’être près de sa famille, d’avoir un repas chaud tous les soirs, d’être sur ce fauteuil dans le magasin à regarder un écran, une émission sans le son, où l’action se déroulait à son rythme à lui, où ce qui se produirait de plus marquant serait le franchissement de l’échelle à saumons par le premier poisson prêt à frayer.

«D’un autre côté, ça ne veut pas dire que ça ne peut plus jamais arriver. » Le vieillard entendait à la voix d’Alf qu’il avait emmené le client devant le présentoir des caméras. « Ces bêtes-là, ça a beau avoir l’air de nounours, ça reste des carnivores. Donc c’est clair que vous devriez vous procurer une caméra, comme ça vous saurez avec certitude s’il s’est installé à proximité de votre chalet ou s’il ne faisait que passer. C’est du reste à peu près à cette saison que les ours bruns sortent de leur tanière, et ils ont faim ! Alors installez une caméra là où vous avez trouvé les excréments ou près de votre chalet.

— Donc la caméra est logée dans ce nichoir ?

— Ce nichoir, comme vous dites, la protège des intempéries et des animaux un peu trop curieux. Ce modèle-ci est simple et bon marché. Une lentille de Fresnel perçoit le rayonnement infrarouge de la chaleur émise par les animaux, les humains et n’importe quoi d’autre. Au moindre rayonnement thermique supérieur à celui du milieu ambiant, la caméra se déclenche automatiquement. »

Le vieil homme écoutait la conversation d’une oreille distraite, mais quelque chose avait attiré son attention. Sur l’écran. Il n’arrivait pas à voir ce que c’était, mais l’obscurité verte s’était éclaircie.

« Le film est enregistré sur une carte mémoire dans la caméra et vous pouvez le visionner ensuite sur votre PC.

— C’est vraiment formidable.

— Oui, mais pour savoir s’il y a de nouvelles images, vous êtes obligé de vous déplacer physiquement et d’aller vérifier la caméra. Si vous choisissez ce modèle-là, qui est un peu plus cher, vous recevrez un texto sur votre téléphone à chaque déclenchement de la caméra. Ou alors, vous avez ce modèle très haut de gamme, avec une carte mémoire, là encore, mais qui envoie l’enregistrement directement sur votre téléphone ou votre adresse mail. Vous pouvez alors rester dans votre salon et vous n’avez besoin d’aller voir la caméra qu’occasionnellement, pour changer la batterie.

— Et si l’ours vient la nuit ?

— Les caméras sont équipées de lampes LED à UV ou de lampes blanches. Des lumières invisibles pour ne pas effrayer l’animal. »

De la lumière. Le vieillard le voyait maintenant. Un cône lumineux venait de la droite, à contre-courant. Il transperça l’eau verte, atteignit la robe et, l’espace d’une effrayante seconde, lui fit penser à une jeune femme enfin revenue à la vie qui danserait de joie.

« C’est de la pure science-fiction ! »

Le vieil homme ouvrit la bouche en voyant un vaisseau spatial entrer dans l’image. Éclairé de l’intérieur, il lévitait à un mètre et demi du fond. Où il heurta une grosse pierre dans les eaux vives, et, comme au ralenti, tourna lentement alors que les phares balayaient le fond et éblouissaient un instant le vieillard en passant sur l’objectif de la caméra. Puis l’engin en lévitation fut capturé par les grosses branches de pin et il s’immobilisa. Le vieillard sentit des palpitations dans sa poitrine. C’était une voiture. Le plafonnier était allumé et il put constater que l’eau avait presque envahi l’intérieur du véhicule. Et qu’il y avait quelqu’un. Il était accroupi sur le siège du conducteur et plaquait désespérément sa tête contre le plafond, de toute évidence pour trouver de l’air. L’une des branches qui retenaient la voiture se brisa et fut emportée par le courant.

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Harry se réveilla. Quelque chose clochait. Il savait que ça allait lui revenir, que ces quelques secondes bénies d’incertitude étaient tout ce qu’il aurait avant le coup de poing. Il ouvrit les yeux pour le regretter aussitôt. On aurait dit que le jour qui éclairait le petit salon vide à travers la fenêtre sale progressait sans entrave jusqu’à un point douloureux derrière ses yeux. Harry se réfugia dans l’obscurité de ses paupières et eut le temps de se dire qu’il avait rêvé. De Rakel, bien entendu. Ça avait commencé par ce rêve fait tant de fois : un matin, des années auparavant, peu après leur rencontre. Elle était couchée contre lui, la tête sur sa poitrine et il lui avait demandé si elle vérifiait si ce qu’on disait était vrai, qu’il n’avait pas de cœur. Rakel avait ri de ce rire qu’il adorait ; il était capable des pires âneries pour le provoquer. Puis elle avait levé la tête, l’avait regardé de ses yeux bruns chaleureux hérités de sa mère autrichienne, et lui avait répondu que c’était vrai, en effet, mais qu’elle allait lui donner la moitié du sien. Ce qu’elle avait fait. Le cœur de Rakel était si grand qu’il avait battu dans son corps, y avait propulsé du sang, l’avait dégelé, avait refait de lui un véritable humain. Et un mari. Et un père pour Oleg, le garçon introverti et grave qu’il en était venu à aimer comme son propre fils. Harry avait été heureux, et terrifié. Il vivait dans une bienheureuse ignorance de ce qui allait se passer, mais dans la malheureuse certitude qu’il allait se passer quelque chose, qu’il n’était pas fait pour tout ce bonheur. Il était mort de peur à l’idée de perdre Rakel. Car cette moitié de cœur ne pouvait battre sans l’autre, il le savait, et Rakel aussi. Alors s’il ne pouvait pas vivre sans elle, pourquoi cette nuit l’avait-il fuie en rêve ?

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Il regarda de nouveau les voiliers. Le principal n'était peut-être pas d'avoir du temps en mer, mais de posséder. De pouvoir se dire à chaque heure de la journée qu'il y avait dehors un bateau à nous.

Un bateau soigneusement entretenu, cher, et on savait que d'autres passeraient et le désigneraient en prononçant notre nom, en disant qu'il était à nous. Car, comme chacun savait, on n'était pas ce qu'on faisait, mais ce qu'on possédait.

Quand on avait tout perdu, on n'existait plus.

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"Tu sais quoi? dit-elle alors qu'il était à la porte, prêt à partir. Tu as l'air de quelqu'un qui a l'intention de survivre.

- Pardon?

- Quand je t'ai vu à l'église. Tu avais l'air de quelqu'un qui a l'intention de mourir."

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Je suis ligoté à une chaise. Peu importe ce que je crois.

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C'était peut-être paradoxal qu'un homme qui ne buvait pas dirige un bar. Peut-être pas.

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La folie est un dialogue solitaire, où on se donne soi-même les réponses qu'on veut. Cette conversation-là, nous l'avons tous eue.

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Parce que dans un monde d'aveugles, je suis le borgne qui a le seul oeil disponible.

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On pourrait avancer que l'amour est un projet à perte. Qu'en penses-tu, toi ?

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À chaque cigarette que tu fumes dans cette vie, Dieu t'enlève une heure... et la donne à Keith Richards.

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