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En ces premières années du XXIe siècle, le monde présente de nombreux signes de dérèglement. Dérèglement intellectuel, caractérisé par un déchaînement des affirmations identitaires qui rend difficiles toute coexistence harmonieuse et tout véritable débat. Dérèglement économique et financier, qui entraîne la planète entière dans une zone de turbulences aux conséquences imprévisibles, et qui est lui-même le symptôme d'une perturbation de notre système de valeurs. Dérèglement climatique, qui résulte d'une longue pratique de l'irresponsabilité... L'humanité aurait-elle atteint son " seuil d'incompétence morale " ? Dans cet essai ample, l'auteur cherche à comprendre comment on en est arrivé là et comment on pourrait s'en sortir. Pour lui, le dérèglement du monde tient moins à une " guerre des civilisations " qu'à l'épuisement simultané de toutes nos civilisations, et notamment des deux ensembles culturels dont il se réclame lui-même, à savoir l'Occident et le Monde arabe. Le premier, peu fidèle à ses propres valeurs ; le second, enfermé dans une impasse historique. Un diagnostic inquiétant, mais qui débouche sur une note d'espoir: la période tumultueuse où nous entrons pourrait nous amener à élaborer une vision enfin adulte de nos appartenances, de nos croyances, de nos différences, et du destin de la planète qui nous est commune.
Afficher en entierLa thèse centrale de cet essai vaste, puissant et ambitieux pourrait être ainsi résumée : le dérèglement du monde tient moins à la " guerre des civilisations " qu'à l'épuisement simultané des civilisations, l'humanité ayant atteint en quelque sorte son " seuil d'incompétence morale ".
A l'âge des clivages idéologiques qui suscitait le débat succède celui des clivages identitaires, où il n'y a plus de débat. Islam et Occident : les deux discours ont leur cohérence théorique, mais chacun, dans la pratique, trahit ses propres idéaux.
L'Occident est infidèle à ses propres valeurs, ce qui le disqualifie auprès des peuples qu'il prétend acculturer à la démocratie. Sa tentation : préserver par la supériorité militaire ce que ne lui assure plus sa supériorité économique ni son autorité morale. Sa volonté de dominer le monde le dispute ainsi à son désir de le civiliser. La guerre en Irak en est un bon exemple : on a dit partout que les Etats-Unis apportaient la démocratie à un peuple qui n'en voulait pas. La réalité est exactement l'inverse : ils n'ont pas apporté la démocratie à un peuple qui en rêvait !
Le monde arabo-musulman n'a plus ni la légitimité généalogique ni la légitimité patriotique autour desquelles il s'était historiquement structuré - magnifique développement sur la trajectoire de Nasser. Vivant dans l'humiliation et la nostalgie régressive de son " Age d'or ", l'ère des islamismes ayant succédé à l'ère des nationalismes, il se trouve condamné à une fuite en avant dans le radicalisme.
Ces " dérèglements symétriques " ne sont qu'un des éléments d'un dérèglement planétaire plus global qui exige que l'humanité se rassemble pour faire face à des urgences qui, à l'exemple des perturbations climatiques, menacent tous les peuples. Et si la Préhistoire de l'humanité prenait fin sous nos yeux, ouvrant dans les convulsions le grand chapitre d'une nouvelle Histoire de l'homme qui commence ?
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