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Ils s'aimaient parce que tout autour d'eux le voulait : la terre sous leurs pieds, le ciel au-dessus de leurs têtes, les nuages, les arbres. Leur amour plaisait à leurs proches peut-être plus qu'à eux-mêmes; aux inconnus dans la rue, aux lointains qui s'écartaient devant eux dans leurs promenades, aux pièces dans lesquelles ils vivaient et se rencontraient. C'était cela l'essentiel, c'était cela qui les rapprochait et les unissait. Jamais, même dans leur bonheur le plus généreux, le plus fou, jamais ils n'avaient oublié leur plus haut, leur plus émouvant sentiment : le sentiment bienheureux qu'ils aidaient eux aussi à façonner la beauté du monde, qu'ils avaient un rapport profond avec toute la beauté, avec l'univers entier.
Afficher en entierEt qu'est-ce que l'histoire? C'est la mise en chantier de travaux destinés à élucider progressivement le mystère de la mort et à la vaincre un jour.
Afficher en entierL'homme est né pour vivre et non pour se préparer à vivre. Et la vie elle-même, le phénomène de la vie, le don de la vie, quoi de plus précieux, de plus enivrant !
Afficher en entierAdieu, mon grand, mon amour, adieu ma fierté, adieu ma rivière rapide et profonde. Comme j'aimais embrasser tes flots, comme j'aimais me jeter dans la fraîcheur de tes vagues !
Afficher en entierEt le peuple est un enfant, il faut le connaître, il faut connaître sa psychologie, il faut savoir le prendre. Il faut savoir toucher ses cordes les plus sensibles et le faire vibrer.
Afficher en entierMa charmante, mon inoubliable ! Tant que le creux de mes bras se souviendront de toi, tant que tu seras encore sur mon épaule et sur mes lèvres, je serai avec toi. Je mettrai toutes mes larmes dans quelque chose qui soit digne de toi, et qui reste. J'inscrirai ton souvenir dans des images tendres, tristes à vous fendre le cœur. Je resterai ici jusqu’à ce que ce soit fait. Et ensuite je partirai moi aussi.
Afficher en entierIl faisait tout à fait sombre. Partout, c'était la nuit. Seul l'anneau de lumière blanche que projetait à cinq pas devant eux la lampe de poche de Diomina sautait de tas de neige en tas de neige, égarant plus qu"elle n'éclairait ceux qui la suivaient. Partout c'était la nuit. Là, derrière, était cette maison où tant de gens la connaissaient, où elle allait souvent, petite fille, où avait grandi le garçon qui devait plus tard l'épouser, Antipov.
Diomina parlait au docteur sur un ton protecteur et amusé.
« Vous irez encore loin sans lampe? Sans ça je vous aurais prêté la mienne, camarade docteur. Oui. Autrefois j'étais vraiment toquée de cette fille. Je l'aimais à la folie, quand nous étions gamines. Elles avaient un atelier, une maison de couture, quoi. Je vivais chez elles, j'étais apprentie. Je l'ai revue cette année. Elle est passé par Moscou. Je lui ai dit : « Où vas-tu, grande folle? Tu devrais rester. On vivrait ensemble, je te trouverais un travail. Qu'est-ce que tu vas faire là-bas? » Rien à faire. Elle a épousé son Pachka qu'elle aimait avec la tête, pas avec le cœur, et depuis elle est un peu folle. Elle est partie, finalement.
- Qu'est-ce que vous pensez d'elle?
- Attention, ça glisse par ici. Combien de fois je leur ai dit de ne pas vider les eaux sales devant la porte. Autant souffler dans un violon. Ce que j'en pense? Comment ça? Qu'en penser... Je n'ai pas le temps de penser beaucoup. C'est par ici que j'habite, vous voyez? Je ne lui ai pas dit que son frère qui était militaire a été fusillé, à ce qu'on dit. Sa mère, mon ancienne patronne, je tâcherai sans doute de la tirer d'affaire, je m'occupe d'elle. Bon, j'entre par ici. Au revoir. »
Ils se séparèrent. La lumière de la lampe de Diomina trébucha le long d'un étroit escalier de pierre, puis se mit à courir, éclairant des murs crasseux, et le docteur resta dans l'obscurité. A sa droite, il avait la rue Sadovaïa Trioumphalnaïa, à sa gauche la Sadovaïa Karetnaïa. Au loin, dans le noir, dans la neige noire, ce n'étaient plus des rues ordinaires, mais des saignées pratiquées dans la taïga des maisons de pierre, comme au cœur des forêts impénétrables de la Sibérie ou de l'Oural.
Chez lui, Jivago retrouva la lumière, la chaleur.
« Pourquoi rentres-tu si tard? » demanda Antonia Alexandrovna.
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