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M comme Monstre, M comme Malade, M comme Manipulateur… M comme la première lettre de son prénom… M comme la première lettre de son nom de famille.
Afficher en entierDepuis cet épisode, je ne le questionne plus sur ses allées et venues. Je refoule mes doutes et je mets un masque par-dessus ceux qui me tatouent déjà le visage. Les trois jours qui suivent, je porte un col roulé, ses mains ayant laissé d'énormes traces sur mon cou, ce qui me remplit de honte.
Afficher en entierDebout dans un coin du jardin, entourée d'hommes qui ne parlent pas ma langue et d'un chien qui hurle sa solitude, je mange mes émotions et je réalise que, bien que nouvellement mariée, je ne me suis jamais sentie autant célibataire.
Afficher en entierPourtant, en passant cette bague à mon doigt, c'est une laisse à mon cou qui se noue et un pacte avec le diable que je signe. Personne ne veut être la femme d'un monstre.
Afficher en entierMon Monstre, je l’ai croisé lors d’une soirée bien arrosée, au sommet du plus haut gratte-ciel du cœur de la métropole. À l’entrée, les gardes de sécurité nous autorisent à grimper, mes copines et moi, au trente-septième étage en nous souhaitant une belle soirée. Quinze dollars plus tard (ouch! c’est beaucoup pour de jeunes étudiantes avec un travail d’été, paumées), les portes de l’ascenseur s’ouvrent sur un lounge du tonnerre déjà bondé. Il est 23 heures, c’est l’heure où on se lâche lousse… Shooters! Allez hop, soirée endiablée à l’horizon!
Je danse sur les rythmes d’une musique pop branchée dans cette atmosphère de folie et de liberté. Une belle grande blonde comme moi se fait instantanément remarquer par les serpents de la place, mais, moi, je ne me laisse pas envenimer facilement. J’ai plutôt besoin de sentir les pulsions de la passion pour me donner complètement. J’ai de l’appétit pour l’ardeur des béguins, le feu, les flammes périlleuses. C’est ce que m’offre un de ces hommes. Un événement, une rencontre, un moment qui fera bifurquer ma route et qui posera à jamais des cicatrices sur mon cœur, mon corps, mon innocence. Un instant qui forgera différemment le reste de mon existence et qui volera les derniers traits d’enfance qui m’habitent encore.
Afficher en entierAssise sur une chaise trop droite et inconfortable, je devrai tout raconter. On m’a amenée dans une salle de conférences où j’attends Me Savoie, un avocat important, m’a-t-on dit. Mon père a pris place à mes côtés et, alors qu’il arbore habituellement un air calme et serein que j’ai toujours admiré, cette fois, il est vraisemblablement plus nerveux que moi.
Papa parle lentement. Il a toujours été ce grand sage qui perçoit le bon côté des gens (même les connards de ce monde, ce que je n’ai jamais compris). En fait, je l’ai détesté pour cela. J’aurais aimé parfois qu’il soit ce gros papa italien qui défend sa famille à tort ou à raison et qui fait sa loi avec un revolver caché dans son pantalon. Mais mon papa, c’est un «bon Jack». Tout le monde l’admire et, moi, c’est l’homme que j’aime le plus sur cette terre. Il sait doser l’écoute et les conseils, et il a cette facilité à entrer en contact avec l’âme des gens tout en étant un homme d’affaires hors pair. Il est juste. Il est vrai. C’est mon pilier.
Afficher en entierJe sens la panique monter en moi. Le sang bat dans mes tempes. Je cherche à reprendre mon souffle. L’oreiller qu’il tient enfoncé sur mon visage m’empêche de respirer. Mes bras ballottent dans tous les sens. J’essaie vainement de me débattre. Assis de tout son poids sur mon corps quasi inerte, il me tient entièrement captive. Mes cris ont fait s’évanouir les dernières traces d’air qui, jusqu’ici, m’avaient permis de demeurer consciente. Je ne suis pas prête à m’effacer. Je ne suis pas prête à disparaître.
Une brûlante prière m’envahit et prend forme dans mon cerveau ralenti par le manque d’oxygène. Il m’aura appris au moins ça… à prier. Je crois en ce Dieu. J’y crois fort, de toute mon âme et de chacune des parcelles de mon petit être qui a tant besoin d’être aimé. Mon Dieu, faites en sorte que je trouve la force de sauver ma peau. Mon Dieu, je vous en supplie, mon Dieu, je vous aime, mon Dieu, aidez-moi à vivre.
Un rugissement me propulse dans la réalité de mon présent, fouettée par son grognement inhumain. Je sens mon pesant bourreau s’effacer de mon visage, le poids des plumes fait place à un vertige puissant. Je cherche mon air, je cherche mon souffle, je halète. Mes poumons se crispent sous cette violente libération. Vite, je dois reprendre le contrôle de mon corps et m’échapper de ce moment dans lequel j’ai failli m’arrêter.
Un lit aux draps violets qui n’ont pas été changés depuis des mois aurait fait office de cercueil. Sur la table, un cendrier rempli de mégots de cigarettes de la veille et, désormais, devant moi, un lion mugissant. Il a laissé choir l’oreiller à mes côtés et il arrache maintenant son t-shirt Hugo Boss de toutes les forces de ses grosses pattes psychopathes. À quelques pas de moi se tient ce monstre en transe, déchirant en lambeaux ses vêtements, qu’il porte habituellement avec tant de fierté et de classe. Il rugit, les yeux rougis, le visage blême et la sueur ruisselant sur son crâne nu.
Instinct de survie. Je pourrai ajouter cette notion à ma liste d’expériences. Mon Monstre, dans son trouble et son émoi profond, s’est désintéressé de mon sort quelques secondes. Assez longtemps pour que l’adrénaline me pousse vers le téléphone abandonné sur le sol, trop près de mes mains. Ce téléphone que j’ai tant observé. Cet appareil interdit, qui ne sonne jamais et qui semble entouré de barbelés. Ce combiné qui fait monter en moi une frayeur paralysante. Il est là… Est-ce Dieu? Mes anges? Mes guides? Mes tripes? Est-ce cet instinct de survie qui me donne la force d’agir? J’empoigne le combiné et je compose à toute vitesse ce numéro. Ce numéro que j’ai tant composé dans mon imaginaire, ces chiffres qui représentent mon château fort, mes racines. J’ai l’empreinte de ce moment dans chacune des cellules qui me constituent. Cette sensation est gravée dans l’entonnoir de mes émotions. Ma chair frissonne lorsque le Monstre détourne subitement la tête en ma direction. Son regard se fixe dans mes yeux et transperce mon âme. Assise sur le lit violet, essoufflée, haletante et le combiné à mon oreille, j’entends le premier son de ma libération.
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Cauchemar
Dans l’appartement glacial de Montréal-Nord, je grelotte encore. Des vautours m’ont prise en otage. Une bande de rapaces traînasse chez nous, sous l’œil attentif de M.
Quand je rentre du boulot, ils sont tous là à squatter l’appartement que JE paie, à manger la bouffe que J’AI achetée et à flamber l’argent pour lequel J’AI durement travaillé. Parti en fumée, cet argent.
Le monstre en M devient plus grand que nature lorsqu’il consomme du pot, du haschisch ou du free base. Un ogre sans limites qui laisse des démons s’infiltrer et hanter ses tourments.
Dès que je passe la porte, M m’attrape par les cheveux au bas de ma nuque et, bestialement, il me traîne dans la chambre. La surprise est telle que ma réaction reste coincée en travers de ma gorge. Je n’ai pas le temps de me défendre ni de comprendre ce qui se trame.
Mon regard balaie l’appartement et je vois quatre hommes gelés et soûls, affalés à même le sol de la salle à manger, ensevelis sous des bouteilles de rhum, des boîtes de pizza vides, des sacs de croustilles, des canettes de bière et des cendriers pleins à craquer. Leurs yeux noirs, leur peau basanée et leurs sourires en coin m’effraient.
Je les connais à peine, car ils sont tous de nouvelles fréquentations de M; des connaissances du café où il passe parfois des journées entières, jouant aux cartes et fumant des clopes. Tremblement. Angoisse. Mon cœur veut sortir de ma poitrine tant il martèle contre mes os.
Afficher en entierJ'ai quitté ma vie, ma famille, mes amis, mon moi. J'ai tout quitté pour l'homme que j'aime et, comme dans un film, l'avion a décollé et j'ai eu mal à mon âme.
Afficher en entierCeci est mon histoire. Non celle d'une lointaine étrangère, ni celle d'une femme d'ailleurs. C'est la mienne, mais également celle de votre soeur, de votre fille, de votre amoureuse, de votre amie et peut-être même la vôtre.
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