Extraits

- Ca ne fait qu'une semaine, mais tout le monde parle d'elle comme si elle était une sorte de fantôme, finit par dire Autumn. Au début, notre prof d'écriture créative me demandait tous les jours si je comptais porter ses devoirs à Callie, et maintenant, il ne demande même plus de ses nouvelles. Parfois, il fixe sa chaise vide... comme si elle était morte ou je ne sais quoi. Les gens parlent d'elle au passé, et ça me fout les boules.

- Ne me touche pas.

Ca, c'est nouveau. Je me fige et laisse retomber mes bras. Elle hoquette et s'essuie les yeux, s'efforçant de prendre un air sévère, mais elle n'en paraît que plus ravagée.

- Va t'en ta chambre, Victor. Je ne veux pas te voir pour le moment.

Ah ! Ca, en revanche, ce n'est pas nouveau. En tout cas, pas complètement. Je ne vex pas te voir. J'avais un peu plus de dix ans quand j'ai entendu pour la première fois ma mère prononcer ces mots, et j'en ai eu le coeur brisé. Rien de ce qu'on ait pu me dire après ne m'a fait autant mal.

Raison pour laquelle je ne réponds rien. J'obéis et bats en retraite dans ma chambre, où je m'assois sur mon lit, la tête dans les mains, les yeux fermés, à essayer de me remémorer le moment exact où ma mère a cessé de m'aimer.

Je suis émerveillé. Tout ça. Elle. Qu'une fille aussi brillante, loyale, sauvage et belle qu'Autumn Dixon trouve quelconque intérêt à quelqu'un d'aussi banal que moi, et que d'un événement aussi tragique quelque chose d'aussi merveilleux puisse arriver dans ma vie.

Raison pour laquelle je ne réponds rien. J’obéis et bats en retraite dans ma chambre, où je m'assois sur mon lit, la tête dans les mains, les yeux fermés, à essayer de me remémorer le moment exact où ma mère a cessé de m'aimer.

C'est toujours la grande inconnue. Parfois, mes excuses ne suffisent pas à la rendre heureuse.

Ma mère et moi, nous nous sommes disputés quantité de fois par le passé. Ou plutôt, ses tendances passives-agressives déclenchent ma colère, et je me suis souvent retrouvé à lui crier dessus jusqu'à ce qu'elle fonde en larmes, et par un curieux retournement, au bout du compte, c'était toujours moi qui finissais par m'excuser. Je ne suis pas sûr que ma mère l'ai jamais fait. A propos de quoi que ce soit.

Je la fixe, cette mère qui refuse de m'aider, et ma vue commence à se brouiller, les larmes me montant aux yeux.

Ma poitrine se serre en écoutant ses mots faire écho à toutes les pensés qui ont pu me passer par la tête. Seul ? Oui, j'imagine qu'on peut dire ça. Raison pour laquelle je me suis résigné à être l'ombre de Brett toutes ces années... car sinon, qui seras-je ? Qui est Vic sans Brett ? Avec lui, je suis à peine quelqu'un ; alors sans lui, je ne serais personne.

(...) Comment une victime de viol peut-elle ne serait-ce que commencer à gérer ce qui lui est arrivé en devant écarter les jambes pour laisser un médecin l'examiner ?

Je le regarde s'en aller en me répétant _ une fois de plus _ que c'est ce que l'univers m'a réservé. Etre l'ombre gauche et bégayante d'un autre. Le capitaine de soirée. Tout ce que je peux bien m'imaginer, c'est la vie d'un autre. Moi, je suis là en spectateur.