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Anne-Lise était ma couleur tombée du ciel ; elle me permit de glisser du seuil des ténèbres à un espoir renaissant et tranquille, qui, durant un bref laps de temps, me transporta dans une île, mol et nonchalant asile, où je me crus réconcilié avec la face lumineuse de la vie et ses illusions sereines. Une diversion, sans nul doute. Pour mieux m’obliger à baisser ma garde. Car c’était mal connaître le Necronomicon, qui continuait de m’attirer à lui comme un aimant.
Afficher en entierCe que j’y vis était proprement hallucinant. Carnet et feuilles étaient griffonnés d’une écriture minuscule et irrégulière, qui ne laissait pas un espace vide. Plissant les yeux et approchant la lampe, je ne pus retenir une exclamation. L’écriture, tantôt en anglais, tantôt en français, était quasi illisible. De temps en temps revenait, en caractères chaotiques et confus, la mention : Necronomicon. Je n’en compris que des bribes, qui ressemblaient à des invocations dont le sens m’échappait ; parsemées de noms étranges, elles s’interrompaient pour laisser place à une calligraphie d’un autre genre, qui m’était totalement inconnue : on eût dit une sorte d’écriture cunéiforme, ou curviligne, qui rappelait certains manuscrits ou parchemins propres à la culture mésopotamienne, sans que je puisse en être sûr ; et cette invraisemblable calligraphie, ponctuée de symboles mystérieux, acheva de me désorienter. Des bougies rouges, éteintes et presque entièrement consumées, avaient laissé couler leur cire sur le bois de l’établi. Le comble fut atteint lorsque je visualisai plus distinctement les dessins qui accompagnaient les documents.
Spencer… Est-ce toi qui as fait ça ?
On y voyait des créatures parfaitement hideuses, que je serais bien en peine de décrire aujourd’hui avec exactitude, tant mes souvenirs sont confus ; ils s’accordent à ce brouillard qui, alors, gagnait les environs, et à cette forêt noire qui paraissait avaler le flanc immense et déchiqueté de la montagne voisine. Les dessins avaient été réalisés au crayon et au fusain. Je me rappelle surtout l’impression à la fois ténébreuse et grotesque qui s’en dégageait : des monstres sortis tout droit du Necronomicon et des œuvres de Lovecraft, du moins pour le peu que j’en savais alors, ou de Stephen King et autres écrivains ou cinéastes du même genre, spécialisés dans le fantastique et l’horreur.
Afficher en entierSi je vous parle de lui, c’est parce que, avant moi, il tomba dans les griffes du Necronomicon. Peut-être représentait-il une proie de choix. Peut-être cette sensibilité d’écorché fut-elle le terreau de son égarement dans les abîmes de monstruosité qui se préparaient. Je m’interroge encore sur les circonstances exactes de cette rencontre, sur le moment où sa raison, happée par le livre, a pu céder. Toujours est-il que le gouffre devait bientôt s’ouvrir sous ses pas, et entraîner avec lui certains d’entre nous – dont moi.
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C’est ainsi que j’ai trouvé et affronté le Necronomicon. Dans ce texte, on se perd. Dans ses méandres, on se noie. Dans ce labyrinthe, on ne reçoit bientôt plus en écho que sa propre voix, celle d’un promeneur égaré, d’un fugitif solitaire perdu au milieu de marécages, d’un nid de créatures rampantes. Et jamais plus, on ne peut retrouver le chemin du retour. Parce que, une fois passée la première seconde de lecture de la première page de ce livre maudit, on n’est plus jamais soi, du moins le soi d’avant. C’est cela, la folie. Le Necronomicon vous tue à vous-même. Mais pour le comprendre, N’gai,n’gha’ ghaa, bugg-shoggog, y’hah ; Yog-Sothoth, Yog-Sothoth, il faut que je vous raconte mon histoire.
Afficher en entierDès les premières pages de ma lecture, ma santé mentale avait commencé de vaciller. Qui que vous soyez, où que vous soyez, si vous tombez sur un exemplaire de ce livre démoniaque, croyez-moi : fuyez-le, brûlez-le – même si cela ne suffira pas à le détruire – mais par pitié, ne l’ouvrez pas. Vous ne pouvez imaginer la révélation qu’il contient. Et je ne puis moi-même vous la révéler sans risquer bien plus que ma vie.
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Le 27/04/13 15 :05, « Michel Houellebecq » < xxxxxxxxxxx.fr > a écrit :
Monsieur,
J’ai bien reçu votre mail du 7 avril dernier. Une seule question, avez-vous été en contact, de près ou de loin, avec un ouvrage nommé Necronomicon ?
Le 27/04/13 15 :33, < patientX@arkham-asylum.fr > a écrit :
OUI !!! OUI §§§§ JE L’AI TROUVE !!!<<<Mais Michel, le Necronomicon n’est pas ce que l’on croit, ce que vous avez cru, je le sais, oh j’ai lu votre essai bien sûr – mais vous vous êtes un peu planté, lisez ce qui suit et vous comprendrez pourquoi – ou plutôt SURTOUT NE ME LISEZ PAS, plutôt venez me voir, je suis à Arkham je vous expliquerai tout. D’ailleurs, vous connaissez l’adresse, n’est-ce pas ?
Le 27/04/13 15 :45, « Michel Houellebecq » < xxxxxxxxxxx.fr > a écrit :
Monsieur,
A mon grand regret, je me vois contraint de rompre tout contact avec vous.
Le 27/04/13 15 :53, < patientX@arkham-asylum.fr > a écrit :
Non, Non Michel ! Stephen aussi m’A lâCHé, pourquoi pourQUOI tu mE fAIs ça ?
« Mail Delivery System » < MAILER-DAEMON@oxxxxx.fr >
Nous sommes desoles de vous informer que votre message n a pas pu etre remis a un ou plusieurs de ses destinataires. Ceci est un message automatique genere par le serveur mwinf5d24.cthulhu.fr. Merci de ne pas y repondre / This is the mail system at host mwinf5d24.cthulhu.fr. I’m sorry to have to inform you that your message could not be delivered to one or more recipients.
The mail system « Michel Houellebecq » < xxxxxxxxxxx.fr > : host hotmail.com[65.54.188.72] said : 550 Requested action not taken : mailbox unavailable
Le 27/04/13 15 : 54, < patientX@arkham-asylum.fr > a écrit :
Oh mon Dieu je comprends oH mon DIEU ils te tiennent toi aussi Michel n’est-ce pas ? ILS TE D2TIENNENT TOI TOI TOI AUSSI NON NON LAIISSSEZ6LE LAISSSEZZZ-MOOOIIIIII !!!!<<<>>>>>
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