Extraits

Et vous m'avez souvent dit que ce sont les personnalités, et non les principes, qui font bouger notre époque.

La seule manière de se débarrasser d'une tentation est d'y succomber.

Il y a toujours quelque chose de ridicule dans les émotions de ceux que nous avons cessé d'aimer.

"Elle a un avenir de progrès devant elle.

-La décadence me fascine plus.

-Que pensez-vous de l'art? demanda-t-elle.

-C'est une maladie.

-L'amour?

-Une illusion.

-La religion?

-Un substitut élégant pour la foi.

-Vous êtes un sceptique.

-Nullement ! Le scepticisme est un début de croyance.

-Qu'êtes-vous donc?

-Définir, c'est limiter.

-Donnez-moi un fil conducteur.

-Les fils cassent. Vous vous perdriez dans le labyrinthe."

La riche odeur des roses embaumait l'atelier et, lorsque la brise d'été soufflait dans les arbres du jardin, de lourds effluves de lilas ou le parfum plus subtil des aubépines en fleur entraient dans la pièce par la porte ouverte.

Oui, monsieur Gray, les dieux ont été bons avec vous. Mais ce que les dieux donnent, ils sont prompts à le reprendre. Vous n'avez que quelques années à vivre vraiment, parfaitement, pleinement. Lorsque la jeunesse s'en va, la beauté s'en va avec elle et l'on découvre alors que c'en est fini des conquêtes ou qu'il faut se contenter de celles, misérables, que la mémoire du passé rend plus amères que des défaites. Chaque mois qui passe vous rapproche de quelque chose d'effrayant. Le temps est jaloux de vous et fait la guerre à votre jeunesse en fleur. Vous aurez le teint jaune, les joues creuses et l’œil éteint. Vous souffrirez horriblement... Ah! Vivez votre jeunesse pendant qu'il en est temps. Ne dilapidez pas l'or de vos jours à écoutez les fâcheux, à essayer de rendre meilleurs les ratés sans espoir ou à donner votre vie pour l'ignorant, le commun, le vulgaire. Ce sont là des objectifs néfastes, les idéaux fallacieux de notre temps. Vivez! Vivez la vie merveilleuse qui est en vous! Ne laissez rien passer. Soyez toujours avide de nouvelles sensations. N'ayez peur de rien....

Lord Henry à Dorian Gray

Vous aimez tout le monde, c'est-à-dire que tout le monde vous est indifférent.

"Comme c'est triste! Je vais devenir vieux, horrible, effrayant. Mais ce tableau n'aura jamais un jour de plus qu'en cette journée de juin... Si seulement ce pouvait être le contraire! Si c'était moi qui restais jeune, et que le portrait lui vieillit! Pour obtenir cela, pour l'obtenir, je donnerais tout ce que j'ai! Oui, il n'y a rien au monde que je refuserais de donner! Je donnerais mon âme pour l'obtenir!"

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-N'épouse jamais une femme avec des cheveux couleur de paille, Dorian, dit-il, après avoir tiré quelques bouffées.

-Pourquoi, Harry?

-Parce qu'elles sont trop sentimentales.

-Mais j'aime les gens sentimentaux.

-Ne te marie pas tout court, Dorian. Les hommes se marient par fatigue; les femmes par curiosité; les uns et les autres sont déçus.

Les seuls artistes que j'aie jamais connus et qui soient agréables à fréquenter sont de mauvais artistes. Les bons n'existent que par ce qu'ils font et, par conséquent, sont parfaitement inintéressants par ce qu'ils sont. Un grand poète, un vrai poète est la créature la moins poétique qui soit. Mais les poètes secondaires sont absolument fascinants. Plus mauvaises sont leurs rimes, plus ils ont l'air pittoresque. Le seul fait d'avoir publié un recueil de sonnets de deuxième catégorie rend un homme parfaitement irrésistible. Il vit la poésie qu'il ne sait pas écrire. Les autres écrivent la poésie qu'ils n'osent pas mettre en pratique.