Le Reflet

La bibliothèque municipale se trouve juste en face du lac. C’est un endroit pas très grand mais accueillant. Le vieux plancher craque un peu, mais c’est ce qui fait le charme de cette vieille bâtisse. Je m’y sens bien, mais souvent, lorsqu’il fait beau comme aujourd’hui, après avoir choisi un livre, je pars m’installer sur un banc au bord de l’eau.

J'entre et salue les deux bibliothécaires. Marie est postée derrière le guichet et enregistre le prêt d’un livre, tandis que Gabriel renseigne un vieux monsieur un peu plus loin. Ils sont toujours souriants ces deux-là et c’est bien agréable.

Gabriel me dit :

— Alors Matilda, qu’allez-vous choisir aujourd’hui ?

— Je ne sais pas encore Gabriel, je vais voir, répondis-je, avec le sourire.

Bonne question, tiens ! Quel ouvrage allai-je emprunter ? Je n’en avais aucune idée.

Je fais le tour des rayons. Un recueil de poèmes ? Non. Un roman policier ? Pas envie.

D’ordinaire, j’ai toujours une idée sur mon futur choix, mais aujourd’hui, j’avoue ne pas être fixée. Tant pis, j’ai tout mon temps, puis j’aime traîner au milieu de tous ces bouquins, ils me rassurent et font partie de mon univers.

Au bout d’un moment, un livre attire mon attention. Sa couverture pourpre en cuir me séduit. Je le retire de l’étagère et passe la paume de ma main sur la peau dont il est recouvert.

Je lis tout haut le titre en lettres d’argent : " Le Reflet "

En bas à gauche, le nom de l’auteur: " Anonyme "

Cela aiguise ma curiosité. Je retourne le livre pour y lire le résumé, mais n’en apprends pas davantage.

Vraiment étrange, il s’agit sans doute d’un livre de science-fiction, je vérifie la catégorie inscrite en gros en début de rayon: « inclassables ».

— Ça ne m’en dit pas plus.

Alors j’ouvre à la première page et commence la lecture:

— Bonjour Matilda...

Surprise, je referme le livre d’un coup sec.

— Calme-toi, me dis-je, ça n’est qu’une coïncidence. Tu n’es pas la seule à porter ce prénom.

Ce livre doit être inscrit dans les fichiers, j’en saurai sans doute un peu plus en les consultant. Je m’installe donc devant l’écran d’un PC et commence ma recherche.

Le reflet: rien, introuvable dans le fichier. Dans inclassables alors? Non plus. Il doit être rentré récemment et n’est pas encore référencé dans la base de données.

J’hésite un peu, retourne vers le rayon et saisis le livre. Voyons un peu:

— Bonjour Matilda. C’est une bien belle journée, n’est-ce pas? Passez le bonjour à Marie et Gabriel, je vous prie.