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Elle tenta de rassembler ses esprits et de respirer plus calmement, tandis que le convoi quittait la ville. Elle voulait contempler le paysage, mais c’était son compagnon qui accaparait son attention : ces longues jambes dont la forme se devinait sous le pantalon de lin, ce torse musclé sous un T-shirt de coton blanc, révélé par la veste entrebâillée…
La nonchalance de Rafiq contrastait terriblement avec la lutte qu’elle menait pour ne pas se dissoudre en poussière. Son trouble était tel qu’elle cachait le tremblement de ses jambes sous sa robe.
Oh, elle maudissait cet homme, que dix longues années n’avaient pas suffi à métamorphoser en être repoussant, aux traits épais et au corps ramolli ! Elle se blottit encore un peu plus contre la portière et ferma les yeux pour ne plus rien sentir d’autre que la brûlure de la vitre sur son front, et chasser l’image de ce corps viril auprès du sien. Hélas, elle voyait en pensée chaque détail de sa physionomie, avec une précision effrayante.
Et quoi d’étonnant à cela ? Onze ans plus tôt, il était l’homme le plus séduisant de Qusay, avec ses épais cheveux noirs, et surtout ses extraordinaires yeux bleus. Avec son visage aux traits nobles et virils, sa peau dorée, il avait conquis son cœur d’adolescente dès l’instant où elle avait posé le regard sur lui. Si elle avait dû imaginer l’homme idéal, il aurait été en tout point semblable à Rafiq. Avec des épaules solides et des pectoraux saillants qui attiraient ses mains comme un aimant…
Elle aimait tant glisser ses doigts sur son torse, autrefois… Aussitôt, il l’enveloppait de ses bras puissants et lui jurait qu’elle était la plus belle femme du monde, qu’il l’aimerait pour l’éternité…
Une douleur lancinante monta en elle, et elle dut se couvrir la bouche pour ne pas hurler. Oh, pourquoi lui infligeait-il cette torture ? Il y avait si longtemps… Et tout avait changé.
Sauf lui. Il était exactement le même. Superbe. Et à présent, un homme au faîte de sa gloire.
Et qui la haïssait…
– Quelque chose ne va pas ?
La voix de Rafiq manqua la faire sursauter, et Sera rouvrit les yeux. Le monde urbain avait totalement disparu. De temps à autre, au loin, on apercevait seulement une grange ou un chemin de terre. Ils approchaient du désert.
Elle avait deux jours à passer avec lui, et il lui demandait ce qui n’allait pas ? Qu’est-ce qu’il s’imaginait ?
– Non, tout va bien, répondit-elle d’une voix faible.
Aucune raison de lui avouer ce qu’elle ressentait. Elle avait retenu la leçon, sur ce chapitre.
– On ne dirait pas, insista-t–il.
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