Ajouter un extrait
Liste des extraits
Ils atterrirent quelques heures plus tard. L’hélicoptère les déposa près d’un hangar en bout de piste. Il faisait nuit noire et quand Théo sauta sur le tarmac en relevant sa coule, il fut surpris par la température ambiante. Douce et légèrement humide. Pas une lumière à l’horizon, à peine quelques lumignons au loin. Il reconnut aussitôt l’odeur. Il n’y avait qu’un endroit au monde où l’on trouvait ce mélange de myrte, d’humidité marine, de ciste et de romarin, un endroit d’où il s’était si souvent envolé sur des vols secrets pour l’Afrique, le Proche-Orient ou l’Asie centrale. Il comprit alors qu’on ne l’avait pas emmené au fort du Service Action, près de Paris, comme il l’avait imaginé, mais en Corse, sur la base aérienne de la Centrale. Dans l’ombre du hangar, il reconnut la forme d’un Falcon.
Afficher en entierFrère Jean-Baptiste se laissa tomber sur une chaise. Un grand froid l’envahit. Le parloir mal chauffé n’y était pour rien. Pas plus que la neige qui blanchissait les pavés de l’entrée du monastère. C’était le passé qui le glaçait soudain, le Kivu. Son passé là-bas, dans les forêts primaires du Nord-Congo, dans la région des Grands Lacs, dix-sept ans plus tôt. Le pire moment de sa vie. Celui qui lui avait ouvert les yeux et l’âme. Après quoi il était entré ici, à Miremont, pour ne plus jamais en sortir. Le Kivu, c’était l’acmé de sa vie d’avant le monastère, vie de pécheur, d’oublié de Dieu. Époque si lointaine, presque une éternité, qu’elle aurait pu appartenir à un autre homme. Époque aussi distante de lui aujourd’hui que Miremont l’était alors des terres noires du Kivu. Clément Neumann, revenant malveillant, était l’incarnation du monde qu’il avait voulu fuir pour toujours.
Afficher en entierLa lectio divina était le moment de la journée qu’il préférait. Particulièrement quand son tour venait de lire à haute voix le texte choisi par le père abbé dans les Psaumes à l’intention de ses frères déjeunant en silence. Frère Jean-Baptiste du Mystère de la Foi avait le sentiment, chaque fois renouvelé, d’être l’incarnation des paroles qu’il prononçait. Sa haute silhouette, l’immobilité de sa posture, sa maigreur, son visage émacié en imposaient autant que la lumière intérieure que chacun des moines reconnaissait en lui. Sa voix de baryton, posée et profonde, se mettait au diapason du refectorium où les moines mangeaient dans leurs assiettes en terre cuite et résonnait sous les voûtes romanes.
Afficher en entierL’heure était grave et les dorures des murs n’y changeaient rien. Philippe Silas s’y était habitué avec le temps et n’y prêtait plus attention, surtout aux pires moments. Seuls ses visiteurs occasionnels étaient encore impressionnés par les boiseries dorées à la feuille d’or de son bureau situé à quelques mètres de celui du président.
Afficher en entierLe regard affolé, le Nyanga n’arrêtait pas de marmonner.
Étaient-ce des prières, des malédictions ou des formules magiques ? Le sergent Ershad l’ignorait. Lui, il venait du Bangladesh et ne comprenait rien au swahili. Pour être envoyé au Nord-Kivu dans les forces de l’ONU, inutile d’apprendre la langue du pays. Un casque bleu suffisait.
Afficher en entier