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Le requin suivant était seul. C'était un "museau en spatule". Il se jeta sur la proie comme un cochon sur l'auge, si l'on admet q'un cochon ait une gueule assez grande pour q'un homme y mette sa tête. Le vieux le laissa mordre puis lui enfonça le couteau emmanché à l'aviron en plein milieu du cerveau. Mais en s'effondrant, le requin fit un bond en arrière et la lame se brisa.
Afficher en entier" Mais le vieil homme y pensait toujours au féminin et comme à quelque chose qui dispensait ou refusait de grandes faveurs, et si elle commentait des folies ou des horreurs, c'était parce qu'elle ne pouvait pas s'en empêcher. La lune la bouleverse comme elle fait à une femme, pensait-il."
[P.45]
Afficher en entierLe vieil homme était mince et sec, avec des rides profondes sur la nuque. Les taches brunes du cancer bénin de la peau que provoque la réflexion du soleil sur la mer tropicale marquaient ses joues. Les taches descendaient bas de chaque côté de son visage et ses mains portaient les cicatrices des entailles que font les cordes quand on hale de lourds poissons. Mais aucune de ces cicatrices n’était récente. Elles étaient aussi vieilles que des érosions dans un désert sans poisson.
Tout en lui était vieux à l’exception de ses yeux qui avaient la couleur de la mer et qui étaient joyeux et invaincus.
(Traduction de Philippe Jaworski pour "Du monde entier" de Gallimard, 2017)
Afficher en entier" Il ne rêvait plus jamais de tempête, ni de femmes, ni de grands
événements, ni de poissons énormes, ni de bagarres, ni d’épreuves de force, ni même de son épouse. Il ne rêvait que de paysages et de lions au bord de la mer. "
Afficher en entierLa vie est simple quand on a perdu, pensa-t-il. Je n'aurais jamais cru qu'elle était si simple.
Afficher en entierD'ailleurs, pensa-t-il, tout le monde tue tout le monde d'une facon ou d'une autre. La pêche me tue autant qu'elle me garde en vie. Le garçon me garde en vie pensa-t-il. Je ne dois pas me faire trop d'illusions.
Afficher en entierSon espoir, sa confiance n'avaient jamais faibli, mais, à la fin, s'amenuisaient comme une brise qui tombe.
Afficher en entier- Le poisson aussi est mon ami, dit-il tout haut. J'ai jamais vu un poisson pareil ; j'ai jamais entendu parler d'un poisson comme ça. Pourtant il faut que je le tue. Heureusement qu'on est pas obligé de tuer les étoiles !
"Une supposition que tous les jours un homme devrait essayer de tuer la lune ? pensa-t-il. Bon, la lune se débine. Mais une supposition que tous les jours un homme devrait essayer de tuer le soleil ? On a encore de la veine d'être comme on est" pensa-t-il.
Afficher en entierIl démonta le mât, amena la voile et la plia. Ensuite, il mit le mât sur son épaule et commença à monter la côte. C'est alors qu'il éprouva l'immensité de sa fatigue. Il s'arrêta un instant, se retourna et aperçut dans la lumière du réverbère la grande queue de l'espadon qui se dressait, bien plus haute que la poupe de la barque. Il distingua la ligne blanche et nue que dessinait l'arête, ainsi que la masse sombre de la tête, l'épée et ce vide, tout ce vide.
Afficher en entier"Tu veux ma mort, poisson, pensa le vieux. C'est ton droit. Camarade, j'ai jamais rien vu de plus grand, ni de plus noble, ni de plus calme, ni de plus beau que toi. Allez, vas-y, tue-moi. Ca m'est égal lequel de nous deux qui tue l'autre."
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