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L'envol du Choucas



Description ajoutée par siegrid 2011-11-13T20:09:26+01:00

Résumé

Cet exode précipité, censé prévenir ses moutons contre les maladies qui ont cours dans la vallée, ne dissimule-t-il pas, pour Pierre Pourras, un dernier coup d’éclat ? A cinquante-cinq ans, ce berger solitaire se lance en effet dans une aventure un peu folle à travers la montagne.

Mais, parti pour protéger son troupeau, c’est lui qui se retrouve bientôt sans défense face aux surprises qui l’attendent

Quand Pierre apprend que son troupeau risque l’abattage par précaution sanitaire, il décide de le sauver. Il s’embarque alors avec ses bêtes dans un incroyable périple : la traversée des Alpes jusqu’à un petit village d’Italie où vivent ses cousines, qu’il n’a jamais vues. Il ignore qu’une jeune inconnue est à sa recherche... Un véritable hymne à la nature et à la liberté !

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Classement en biblio - 3 lecteurs

extrait

Extrait ajouté par siegrid 2011-11-13T20:10:54+01:00

1

Mauvaise nouvelle

Pierre Pourras remontait chez lui. Il gravissait par une coursière, en moins de six kilomètres, un dénivelé de quatre cents mètres. À 1 560 mètres d'altitude, sa ferme était plantée sur un léger adoucissement de la pente, au début des alpages. Il devait longer un torrent bordé d'une ravine sur sa partie la plus raide, l'enjambant deux fois sur des ponts précaires, au gré des obstacles naturels. Partout ici en Ubaye, l'eau est un bien et un mal. Le mal est la fureur des torrents en période de crue, fortes pluies ou fonte des neiges. Là, les moindres ruisseaux sont capables d'envahir les prés, les champs bas et les jardins qu'ils ravagent, y abandonnant dans le meilleur des cas des tonnes de graviers et de pierres lorsqu'ils n'emportent pas la bonne terre après avoir rasé les murettes de soutènement. Ainsi, certaines communes situées sur leur cours se voyaient régulièrement amputées de parcelles cultivables irrécupérables ailleurs.

Jadis, la vie des Esubiens1 était profondément marquée par la neige et l'eau. Quant au soleil, il fallait savoir en profiter car les étés étaient courts.

À peu de chose près, l'éleveur aurait pu monter les yeux fermés : combien de fois n'avait-il pas gravi cette pente en près de cinquante ans ? Il montait avec cette lenteur grave et efficace des gavots2. Un néophyte l'aurait cru fatigué, alors qu'il aurait pu avancer ainsi, à son rythme, durant des heures et des heures sans la moindre halte, juste un court arrêt pour tirer de son sac un morceau de pain et de fromage, une tranche de lard. Ses grosses chaussures aux fortes semelles étaient ferrées sur les bouts, et cette ferraille accrochait de temps à autre les roches affleurantes de la sente. Elle les avait toujours accrochées à ces endroits. Mazard, le cordonnier, l'avait prévenu : « J'aurai encore de quoi te ferrer les bouts une fois ou deux. » La ferraille, c'était jadis ce qui renforçait les chaussures à semelle de cuir des paysans, des montagnards surtout. Avec les semelles de caoutchouc cranté, les clous, c'était fini depuis quelque temps, mais on pouvait encore adapter sur le bout des garnitures qui deviendraient vite introuvables. Mazard avait raflé cinq ans plus tôt le petit stock d'un crépin de Gap qui fermait boutique. Ce métier n'existait plus dans sa conception initiale qui était de commercialiser essentiellement du cuir et tout ce qui permettait d'entretenir et de réparer chaussures et maroquinerie. Seuls quelques petits grossistes vivotaient encore, se bornant à la vente de colle et de semelles, de fils et de pièces pour les machines à coudre. Ils ne vendaient plus guère de cuir de croupon à semelle et encore moins de ces pièces métalliques de protection.

Après avoir suivi la départementale sur deux kilomètres au sortir du village, Pourras prenait à gauche sur la Blache. Il empruntait un temps une petite route, puis le sentier qui tirait droit. Il avait hâte d'aborder le relief afin que les pierres roulent sous ses pas. Cela déclenchait de mini-cascades minérales dans les zones les plus raides. C'était aussi sur les replats que s'accumulaient, à force de passages, le sable résultant de toutes ces roches et ces pierres, peu à peu désagrégées. Choc des pierres, raclures sur les roches, crissement du sable, chant qui accompagnait l'homme seul. Car il fallait être seul pour bien entendre cette musique offerte à chaque homme qui gravit cette sente large d'à peine deux mains par endroits et qui trace sa voie incertaine dans la prairie. L'été, les grandes ombellifères et les gentianes l'ensevelissaient sous leur végétation, fine et légère, aérienne pour l'une, nervurée, forte et charnue pour l'autre. Pour l'heure, en altitude, l'herbe poussée à l'orée de l'automne, grillée par le gel, plaquée au sol par l'épaisseur de la neige, commençait à être transpercée de lancettes vertes. Différence notable avec la vallée où le printemps avait pris de l'avance. Les prés reverdis y étaient émaillés de primevères et des premières anémones à fleur de narcisse. Les arbres, que les gelées tardives n'inquiétaient plus, laissant enfin libre cours à la montée de sève, bourgeonnaient.

Ce chant était, à l'instar dune main courante aménagée en montagne dans un passage délicat, une sorte de guide. Pourras pouvait rendre la bride à son corps, ne plus songer à ce que faisaient ses jambes et ses pieds. Il laissait ainsi ses idées s'envoler dans toutes les directions comme une poignée de grives surprises au détour d'un tertre et qui s'éparpillent. Certes, il aurait pu emprunter le chemin carrossable qui acceptait tout juste son tracteur et la fourgonnette d'un ancien berger reconverti en marchand de moutons, qui montait pour lui marchander quelques anotges, les agneaux d'un an.

L'agrément, la poésie attachés à la sente se doublaient d'un intérêt pratique car cette coursière faisait gagner une bonne quinzaine de minutes. Il passa la Bérarde et d'anciens fenils aux toitures souvent crevées pour arriver, au crépuscule, non loin de son mazot qui précédait la ferme. Sa source l'interpella. Elle causait fort tout au long de l'année. Glaces et neige, libérant leurs eaux prisonnières depuis les gels pré-hivernaux, n'accentuaient pas son débit régulier. Pourtant, en cette période, les eaux qui sourdaient des flancs de la montagne en de multiples filets d'argent se réunissaient, enflaient pour jaillir dans le resserrement des roubines et basculer en cascades tumultueuses. Pierre se demandait quelquefois où cette eau-là se serait retrouvée si elle n'avait pas été bloquée cinq mois durant. Dans la mer Méditerranée assurément, mais où ? Et puis quel serait le parcours de ces milliards de gouttelettes avant qu'elles ne soient à nouveau pompées par le soleil, pour que, derechef une averse, un orage les précipite au sol dans un cycle sans fin ? Pourras n'était pas sûr qu'elles reviendraient sur ses montagnes, mais il espérait que certaines étaient déjà passées par là, qu'elles avaient mouillé les mains de sa mère ou de quelques aïeux et que, peut-être, son père en avait bu à même les ruisseaux d'alpage, au creux d'une main.

Au sortir de la canalisation - un demi-sapin évidé, ourlé de verdure moussue - le jet liquide bondissait de trente centimètres, gros comme le poignet, avant de plonger dans le bassin de pierre et de s'y engloutir avec impétuosité. Pourras gronda sourdement : « Hé ! ma vieille, tu m'as l'air bien vive. » Il parlait souvent à ce débit fougueux qui contribuait à rythmer sa vie. Sans accélérer sa marche, il arriva devant la ferme.

Ses deux chiennes bergers gémirent sans se précipiter vers lui, pourtant Dieu sait si elles en avaient envie ! Mais le maître leur avait dit en partant pour le bourg : « On ne bouge pas, les chiens, on ne bouge pas, hein ! » Elles tournèrent la tête dans sa direction et n'importe qui aurait compris leur fierté d'avoir respecté la consigne. Pierre passa un doigt sur leurs têtes en disant « Bien, bien, c'est bien. » Ses pieds retrouvèrent tout seuls les trois larges dalles de pierre qui faisaient accéder à l'entrée. Il fit glisser son sac de ses larges épaules par une torsion du buste et un fléchissement de la taille, le retint par les cordes qui servaient de brides. Il le déposa sur le banc adossé aux lourds blocs de granit, base du mur de pierres soutenant les madriers de mélèze noircis par le temps et la toiture de lauzes, autant de lourdes écailles minérales, véritable carapace. Il accrocha la lanière de son bâton de marche à un clou forgé main, planté là depuis peut-être un siècle ou davantage. Puis il tira de sa poche une grosse clé avec laquelle il fourragea dans la serrure, avant que cette mécanique simple mais usée consentît à faire son office. La porte s'ouvrit d'elle-même.

Le jour avait bien baissé. L'homme entra, tâtonna pour trouver l'interrupteur. L'ampoule nue suspendue au-dessus de la table émit un halo jaune un peu maladif. Il y eut quelques raclements de chaises, des heurts, des froissements de papier et des craquements de brindilles. Puis, d'un coup, après quelques grésillements, une longue flamme torchère talocha les ténèbres, les repoussa jusque dans les recoins de la pièce en formant des ombres mouvantes. Pierre revint vers la porte d'entrée, récupéra son sac, fit rentrer ses chiennes et doucement repoussa l'huis jusqu'à ce que la targette s'enclenchât. Son sac n'était autre qu'une sorte de besace de forte toile. Il ouvrit le col fermé par une cordelette, en sortit des provisions, une miche de deux livres, un morceau de tomme et un saucisson. Puis, fouillant au plus profond, il ramena une enveloppe qu'il était allé chercher à la maison municipale à la demande du maire, Edmond Tournoux. Il la posa sur la table et, sans plus y prêter d'attention, se mit en mesure de casser la croûte. Il alla remplir une petite cruche de grès à la pompe sur l'évier, tira un verre d'un placard rudimentaire, sorte de grosse boîte avec une porte encastrée dans le mur à la hauteur de son torse.

Pierre mangeait posément, comme il marchait. Il ne déglutissait qu'après s'être appliqué à une mastication longue et puissante, lampant de temps à autre une petite gorgée d'eau. Cependant son indifférence était feinte. Il était préoccupé et son regard se portait plus qu'il ne l'eût souhaité sur l'enveloppe officielle. Il savait ce qu'elle contenait, le maire lui avait demandé de l'ouvrir et d'en prendre connaissance devant lui s'il le voulait bien.

« Je te connais, Pierre, t'es capable de la mettre dans un coin et de l'oublier. C'est important. »

1. Esubiens : ceux qui occupent les terres des rives de l'Ubaye.

2. Gavots : montagnards des Basses-Alpes (péjoratif).

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Commentaires récents

Commentaire ajouté par guy-jacques 2012-06-15T11:19:35+02:00
Lu aussi

Des aventures montagnardes, dépaysantes pour les citadins comme moi, une intrigue légère, des personnages hauts en couleurs... agréable à lire.

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Date de sortie

L'envol du Choucas

  • France : 2012-09-01 - Poche (Français)

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Note globale 6 / 10

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