Les 1001 Epitaphes les plus drôles : Ne laissez personne choisir la vôtre

Préface

MISE EN BOÎTE

Il y a plusieurs façons de mettre en boîte. Celle qui recourt au sapin est la plus expéditive. Et elle peut inspirer à un auteur quelques aphorismes du myocarde. Soeur Sourire n'est pas loin pour consoler ceux qui éprouvent un ennui mortel.

Un demi-dieu capable de nettoyer les écuries d'Augias (il aurait du trimard aujourd'hui) mérite de retenir l'attention. Son homonyme (ou sa réincarnation) cultive l'humour et la dérision avec allégresse. C'est donc par charité païenne qu'il a aligné plus de mille épitaphes pour inspirer des formules de... consolation aux malheureux mortels (le seul syndicat universel auquel l'adhésion ne peut être facultative). Nous sommes très conscients que nous ne pourrons pas couper à l'échéance ultime ; ce n'est pas une raison pour la prendre mal. L'auteur, au terme de son effort herculéen, aligne sur 250 pages en gris de circonstance - naguère réservé au demi-deuil - et au cherche midi qui, pour une fois, devraient s'appeler cherche-minuit, des phrases à l'emporte-pièce ( ?) qu'il suggère de graver sur les tombes. La meilleure, et la plus succincte, mais ô combien éloquente, m'a semblé être : bouche-trou. Héraclès étant poète, je crois, n'a pas résisté à une tentation bien corporatiste : «Mon Dieu, donne-moi I inspiration pour faire de beaux vers.»

Je ne suis pas sûr qu'on doive recommander d'offrir ce recueil à épines aux amis au bord de calancher car il y a des partants susceptibles. Mais il me paraît judicieux de le lire de temps en temps, le réservant à son usage personnel. C'est un caillou sur la piste de la sérénité. L'ironie, l'humour sont de bons antidotes au cafard. Ils ne guérissent rien, mais ils aident à faire baisser la tension une seconde. Et ils ajoutent un zeste de dignité à tous assujettis à la condition humaine. Personne ne trouvera choquante, j'imagine, cette formule : «Je n'ai jamais été à ma place nulle part.» Il y a un rien d'impertinence dans : «La mort, je l'ai découverte par hasard.» Ou dans : «Je traverse une période difficile, mais je garde espoir.» On dit que quelques mots valent mieux que de longs discours. Le livre que je commente à la légère est donc un condensé d'éloquence. Cela ne peut nuire à personne (en bonne santé) de découvrir des formules lapidaires qu'on peut inscrire le plus tard possible non seulement sur des pierres précieuses ou tout court, mais aussi dans le béton ou le plastique qui sont les matériaux contemporains les plus appréciés sur toute la planète. J'ai réservé, pour mon évocation funèbre, cette dernière phrase : «Ma vie ne sera jamais plus comme avant.» C'est une manière souriante de donner l'absoute.

ÉRIC OLLIVIER