Extraits

-Si tu continue, je vais te forcer à courir plusieurs tours de terrain!

-Dans tes rêves, oui !

-Tu veux encore parier ,

-Pff...si tu veux perdre...

Il lâcha ma taille et s'arrêta un instant pour me toiser. Je le fixai, interloqué.

-Quoi ?

-Continue devant. Je te laisse de la marge, dit-il d'un ton égal.

-De la marge pour quoi?

-Avant que je te courre après.

-Mais moi, je ne veux pas courir!

-Tu vas être obligé, pourtant.

-Et qu'est ce qui te fait croire ça ?

Leith se baissa lentement, ramassa une motte de terre, et la roula entre ses main. Les yeux écarquillés, je commençais à comprendre ce qu'il allait faire, je me mis immédiatement sur mes gardes.

-Tu ne vas pas faire ça...

-Je vais me gêner...

Je reculai lentement.

-Dépêche-toi tu n'as plus beaucoup de temps...

-Leith, non! Je t'interdis de faire un truc pareil!

Cette fois il avança de deux pas.

-Nom d'un chien!m'écriai-je

Ni une ni deux, je me retournai pour courir loin devant lui. Quelle galère toute cette boue! Mon sang se glaca lorsque j'entendis ses pas derrière moi. Je hurlai en continu et accélérai. Je n'était plus qu'a quelque mètre de Jamie.Plus que deux, plus qu'un...Dans un ultime effort désespéré, je m'agrippai à sa veste et me cachai derrière lui.

Leith et lui rirent aux éclats.

Perdus au milieu de l'immensité de la nuit, installés au sommet de la Terre, nous étions seuls au monde. Et ce soir-là, j'acquis la conviction que personne ne pourrait nous séparer. Jamais.

- Le père du chef de meute a-t-il eu des informations concernant l'amulette ? s'enquit-il.

- Non. Mais il cherche. Ils cherchent tous. Ils finiront par trouver. J'en suis certaine. Pff... c'est à croire que cette amulette sort de nulle part et que ce loup-garou est imaginaire !

Il eut un sourire amer.

- Nous trouverons sûrement avant eux...

- Mais c'est pas vrai ! La rivalité jusqu'au bout, hein ? Si tu savais à quel point je vous trouve ridicules. Vous et votre haine ancestrale. Vos aïeux étaient des idiots et vous, vous êtes leurs dignes héritiers !

Il se pencha sur moi pour qu'on ne l'entende pas.

- N'oublie pas que tu parles à un vampire...

- Tu parles d'un scoop ! Il y a belle lurette que tu ne me fais plus peur, Dracula !

Cette fois, il me servit son plus beau sourire.

Sa colère allait bien au-delà de ce que j'avais imaginé. Il était littéralement fou de rage, les yeux noirs et sans iris, les narines gonflées, la mâchoire serrée... En se mordant les lèvres, il fit un pas, puis deux dans ma direction. J'eus si peur, que je lâchai un cri strident.

Pour la première fois depuis que je le connaissais, je me demandai s'il était possible qu'un lupus perde le contrôle de lui-même, s'il était possible que Leith envisage une seule fois d'être brutal avec moi. Si cela était le cas, ce serait pour maintenant, j'en étais presque sûre.

A cette seule pensée, je déguerpis tout droit dans ma chambre sans fermer la porte. Je m'assis au fond de mon lit, repliai mes jambes contre ma poitrine et appuyai l'oreiller contre ma bouche pour empêcher mes lèvres de trembler.

Leith se montra, mais resta à l'extérieur.

- Je peux entrer ? demanda-t-il d'une voix étrangement douce et rassurante.

Je hochai la tête en silence.

Il referma derrière lui et s'appuya contre le bois, les bras croisés sur sa poitrine. Il ferma les yeux et prit une profonde inspiration.

- Je ne voulais pas t'effrayer. Jamais je ne te ferai de mal. Je me suis calmé, maintenant. Pardonne-moi.

J'avalai ma salive et regardai mes orteils se crisper sur les draps. Impossible de me détendre.

- Tu veux bien me pardonner, Hannah ?

Sans lever les yeux, je lui fis signe que oui.

Il s'approcha et s'installa à mes côtés sans me toucher. Il se contenta de me regarder. Après un long moment de silence, je déliai enfin ma langue :

- Tu m'as fais peur...

Il hésita, puis passa délicatement un bras autour de mes épaules pour me ramener contre lui avec douceur.

- Je te demande pardon...

Le téléphone se tut sans que la messagerie ne bipe. A peine quelques secondes plus tard, il sonna encore et comme ça, une dizaine de fois au moins.

- Tu devrais l'éteindre.

- Oui, mais...

- Tu comptes lui dire où on est ?

- Non, bien sûr.

- Alors éteins-le. A part nous énerver, c'est tout ce que ce fichu téléphone va réussir à faire. Lorsque j'aurai parlé à Darius, tu l'appelleras.

J'opinai et m'apprêtai à l'éteindre quand je remarquai que j'avais reçu deux SMS.

Le premier disait :

"Décroche ce maudit téléphone, Hannah, et dis-moi où vous êtes !"

Le deuxième était du même genre :

"Tu es partie retrouver Darius ? De toute façon j'arrive. Dis à Julia qu'il ne vaut mieux pas que je la croise !"

Il me prit par la taille et m'attira vers la maison.

Nous saluâmes affectueusement Elaine et Mathy et gagnâmes l'étage pour y déposer mes valises.

- Je ne m'y ferai jamais, grogna-t-il en entrant dans ma chambre.

- A quoi ? demandai-je, retirant mes chaussures.

- Ah... ça !

Il désigna du menton ma collection de chevaux et poneys miniatures installés sur la commode.

- Ce n'est tellement pas toi ! Enfin, je veux dire que j'ai vraiment du mal à t'imaginer dans la peau d'une petite fille.

- Et pourtant... je suis aussi passée par là, tu sais. Toi tu ne collectionnais pas les figurines fantastiques ?

- Non.

- Les super héros ?

- Non.

- Allons bon ! Les petites voitures, alors ? Les camions de pompiers ? Les soldats de plomb ?

- Non.

- Mince... Tu ne jouais jamais ?

- Non, je lisais Kant.

- Tu me charries ?

- Tout à fait !

J'attrapai un oreiller et lui lançai à la figure. Dans un réflexe aérien, il barra sa trajectoire et le renvoya à l'autre bout de la pièce. Avant même que je n'aie le temps de comprendre, il se jeta sur moi et me plaqua sur le lit sans ménagement en m'immobilisant. La respiration saccadée, je n'essayai pas de me dégager, c'aurait été en vain.

- Je jouais au chasseur, susurra-t-il à mon oreille en faisant courir ses lèvres le long de ma mâchoire. Et je gagnais à chaque fois.

Pour le coup, j'en fus réduite à ne plus respirer du tout.

Il y eut un blanc.

- Tu es d'accord avec moi ? s'étonna-t-il.

- Oui.

Je l'entendis soupirer longuement.

- Ça veut dire que tu vas rentrer chez toi ?

- Ça veut dire que je ne prendrai aucun risque, éludai-je.

- C'est bien...

Quelques secondes silencieuses s'égrenèrent.

- Hannah ?

- Oui ?

- Comment va Julia ?

- Nom d'un chien, Darius ! Vas-tu enfin te décider à lui téléphoner toi-même ? Je ne suis pas votre intermédiaire !

Je n'aurais jamais imaginé à quel point se séparer de l'être qu'on aime le plus au monde puisse être si difficile. Je pensais l'avoir vécu lorsque j'avais perdu ma mère douze ans plus tôt. L'année dernière encore quand Philip le galbro avait attaqué Hannah, mais je me trompais. Rien n'aurait pu me préparer à ce que j'étais entrain de vivre maintenant.

J'avais perdu l'espoir. Pire, l'espoir était mort en moi en même temps qu'Hannah, l'humaine que j'avais aimée; mon âme sœur. Mon souffle. Ma vie. Celle pour qui je mourrais sans 'ombre d'une hésitation.

Il ne me restait rien, rien d'autre que mes souvenirs, l'amertume et la culpabilité.

J'avais tout perdu. Tout.Spoiler(cliquez pour révéler)

La mutation d'Hannah n'était pas complétement achevée mais c'est aujourd'hui que je m'en allais le matin du cinquième jour. brisant la promesse les promesses que je lui avais faites. Puisse t-elle me pardonner d'avoir été si lâche. Un loup-garou et un ange noir... Jamais...

- Coucher avec des filles a toujours été facile et sans conséquence pour moi. Je les attirais dans mon lit sans aucun remords, elles ne comptaient pas. Tu es différente, Hannah. Je. Suis. A-mou-reux, articula-t-il. Tu es mon âme sœur. Tu comprends ce que ça veut dire ?

- Oui, chuchotai-je en hochant la tête. Je suis... juste un peu jalouse, avouai-je à mi-voix.

- Ça, j'avais saisi, se moqua-t-il en souriant.

"-Il t'arrive de chasser sous ta forme de loup ? demandais-je tout à trac tandis qu'il enfournait un morceau de viande.

Il manqua de s'étouffer avant de pouffer de rire.

- Honnêtement ? Non. Je n'ai jamais faim à ce point.

- Mais tu le pourrais ?

- Oui, c'est dans mes gènes.

- Tu pourrais tuer Bambi ? me révoltais-je.

- Sans aucun problème, mon chou."

p. 132