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Ainsi livrée moi-même, je sursautai brusquement lorsqu'une main se posa sur mon épaule nue, d'un coup d'un seul, audacieuse, familière et ferme. Je n'avais pas entendu arriver la personne qui m'abordait subitement de cette manière ; je perçus simplement ces mots, prononcés en italien d'une voix de basse directe et très douce derrière moi :
"Puis-je vous inviter à danser, charmante Gnaga ?"
Je me retournai et me figeai devant un homme de très haute stature, entièrement vêtu d'un costume noir, le visage dissimulé par la traditionnelle bauta blanche, et le cou scindé d'un cordon en cuir retenant une cape en velours de couleur sombre. De là où je pouvais le détailler, c'est-à-dire vue d'en dessous, seule sa bouche se laissait deviner, large et sensuelle sous le masque de forme quadrangulaire, magnifique, surmontée d'une fine moustache, sa peau mate légèrement marquée tout autour, troublant les repères sur son âge. Le nez, qui paraissait fin, et tout le haut du visage étaient couverts par le masque de céruse blanc, autrement appelé volto par les Vénitiens, et dont la forme modifiait le son de la voix, ce qui accentuait encore le côté effrayant du costume. L'inconnu portait des gants de cuir noir, ce qui m'étonna car il m'avait semblé sentir le contact de sa peau sur mon épaule. Sa large poitrine et ses gestes directifs laissaient deviner qu'il s'agissait d'un homme du monde, sportif et enclin sans doute à la brutalité. L'autorité de sa voix était telle, qu'il me semblât impossible de refuser son invitation.
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