Commentaire de Lavinia_D

Coup de cœur pour les Cendres du Serpent-Monde de Marine Sivan ! 😍

Le roman, écrit à la première personne, nous met dans la peau d'Erik. Erik, c'est une canaille mais dans le fond, un peu looser. Il essaie de tirer son épingle du jeu dans une ville de bric et de broc, en permanente construction par des colons en quête de richesses. Car Erik a posé ses bagages (ou ce qu'il en reste) sur une île tropicale, originellement habitée par les Natiis. Suite à des affrontements sanglants, les Natiis se sont retirés à l'intérieur de l'île, abandonnant la côte aux colons, et depuis, une trêve fragile règne.

Erik traîne une grosse casserole derrière lui, de celles qu'il préférerait garder au placard. Mais quand il se retrouve forcé de regagner la jungle pour guider Silas, un ethnologue désireux de connaître les Natiis, la porte du placard va s'ouvrir en grand et lui rentrer dans les dents.

S'il y a bien une chose que je dois dire, c'est que la plume de Marine Sivan est absolument addictive ! La voix qu'elle a trouvée pour Erik, émaillée d'argot et de cynisme, lui va comme un gant. Je me suis attachée tout de suite au gaillard et j'ai pris un plaisir fou à le suivre tandis qu'il s'enfonçait dans la jungle et dans ses souvenirs, qu'il développait une relation unique avec chacun des personnages et que, pas à pas, il s'avançait sur le chemin de la rédemption. Grâce à cette narration maîtrisée, le récit arrive à être tout à la fois dur, mordant, touchant, lumineux, et sans violence (entre autres 😋 ).

L'histoire quant à elle, est rondement menée, inattendue, sans s'enfermer dans des schémas préétablis. J'ai lu le roman quasi d'une traite !

S'il y a un deuxième point que je voudrais souligner, c'est celui du contexte. Géographique, déjà : on est jetés la tête la première dans la jungle. Pour avoir passé plusieurs semaines en Amazonie, j'y ai retrouvé la touffeur, la pénombre, la pluie et le soleil humide, la faune et la flore, mais aussi l'angoisse du danger invisible. On s'y croit vraiment.

Et surtout, contexte social. Marine Sivan arrive à aborder la difficile question du colonialisme avec une intelligence et un apaisement surprenants. À travers les différents personnages (l'ethnologue qui se veut bienveillant, le colon réaliste, la Natii qui cherche la paix, les Natiis qui ont été bafoués, ceux qui ont pardonné, le gamin qui cherche à comprendre, etc...), l'autrice nous offre une palette de points de vue qui nous pousse à reconsidérer nos certitudes, mais sans aspect moralisateur et sans prendre le pas sur le récit et les personnages. C'est un vrai tour de force, et une proposition bienvenue en ces temps assez troubles sur le sujet.

En bref, un roman que je recommande à 200%, pour tous les lecteurs, y compris ceux qui ne sont pas fans du genre fantasy (pas de dragon, de magie ou quoi que ce soit ici, soyez tranquilles 😄 ).

Rideau !