Les Chevaliers au Cygne, Tome 3 : Frissons et dissimulations

Lady Elizabeth Hutton, à moitié endormie sur son lit, fut soudain réveillée par des bruits de pas qui résonnèrent lourdement dans l’escalier menant à la chambre de son donjon. Pourquoi tant d’agitation ? Ouvrant les yeux, elle vit sa suivante, Anne Kendall, s’empresser d’entrouvrir la porte pour la refermer aussitôt. Puis elle s’adossa au battant, le souffle court et pâle comme un linge.

Elizabeth se redressa, en faisant retomber le couvre-lit sur elle.

— Eh bien, Anne, qu’y a-t-il ?

— Le vicomte Bannaster est là.

— Encore ! ne put s’empêcher de maugréer Elizabeth. Pourquoi s’obstine-t-il à me faire la cour ? Hier soir, j’ai feint d’être souffrante pour éviter de le rencontrer.

— Dans ce cas, vous avez été trop convaincante. Il est resté.

— Cela ne le dérange pas de passer pour un imbécile ? Je suis déjà fiancée !

Pourtant, ce n’était pas l’impression que l’on en avait. Cela faisait une éternité qu’Elizabeth n’avait pas vu John, son fiancé. À l’époque, il avait treize ans, elle, onze. Ce n’était d’ailleurs pas lui mais son frère, William, qu’elle était censée épouser. Hélas, le malheureux était mort d’une chute de cheval. Le deuxième fils de la famille Russell, Robert, étant également décédé, elle fut promise à John, qui habitait en Normandie depuis longtemps. L’avait-on mis au courant qu’il avait hérité des terres et de la fortune de son clan ? Et que sa future épouse l’attendait ?

En ce qui la concernait, être fiancée l’avait en quelque sorte protégée. Jusque très récemment.