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Mon frère se faufile déjà, il avance dans la bruine, je le suis, jusqu'à ce que nos chemins se séparent ; lui s'occupe de l'entrepôt, moi de l'atelier et des bureaux. J'ai son plan dans la tête de l'atelier et des bureaux. J'ai son plan dans la tête et la nuit ne me fait pas peur. J'entre dans la bâtisse, longe la chaîne de montage et emprunte les marches de la passerelle qui conduit aux bureaux. La porte est fermée cadenas avec un croisillon d'acier, solidement verrouillé d'un cadenas ; tant pis, les carreaux sont fragiles. Je prends deux grenades, arrache les goupilles et les lance, une dans chaque main. Les vitres éclatent, juste le temps de m'accroupir, le souffle vient jusqu'à moi. Je suis projeté et retombe bras en croix. Sonné, les tympans qui bourdonnent, du gravier dans la bouche, les poumons enfumés, je crache tout ce que je peux. J'essaie de me relever, ma chemise est en feu, je vais brûler vif. J'entends d'autres explosions qui tonnent au loin, du côté des entrepôts. Moi aussi je dois finir le travail.
Afficher en entierIl avait les mains pleines de talents, tu l'aurais vu avec un crayon dans les doigts, capable de dessiner tout et n'importe quoi. En deux traits de fusain, il t'aurait croqué le portrait et ta mère l'aurait accroché au mur du salon. Alors, perché sur le muret d'enceinte, au beau milieu de la nuit, il a dessiné le pourtour de l'usine, colorié chacun des bâtiments qui poussaient sur sa feuille de papier comme le blé sort de terre. Moi, je faisais le guet et l'attendais en bas. Et puis d'un coup d'un seul, il s'est mis à rire, comme ça, au milieu de la nuit ; un rire plein et clair, un rire que j'emmènerai toujours avec moi, jusque dans la tombe quand ma tuberculose aura gagné la guerre. Mon frère riait d'avoir dessiné un bonhomme au milieu de l'usine, un type avec des jambes arquées comme les avait le directeur de l'école.
Afficher en entierCa devait marcher fort pour Rubio avesc les filles quand il était dehors. Il faudra que je lui demande de me confier quelques trucs, juste au cas où un jour je retrouverais Sophie
Afficher en entierSophie était contente de partager ce moment. Sa vie d'agent de liaison n'était pas des plus faciles. Comme moi, elle se faisait passer pour une étudiante auprès de sa logeuse. Tôt le matin, elle quittait la chambre qu'elle occupait dans une maison de la côte pavée et n'y retournait que tard le soir, évitant ainsi de compromettre sa couverture. Quand elle n'était pas en filature, quand elle ne transportait pas d'armes, elle arpentait les rues en attendant que vienne la nuit et de pouvoir enfin rentrer chez elle. En hiver ses journées étaient encore plus pénibles. Les seuls moments de répit venaient quand elle s'octroyait une pause au comptoir d'un bar, pur se réchauffer. Mais elle ne pouvait jamais y rester très longtemps au risque de se mettre en danger. Une jeune femme, belle et seule, attirait facilement l'attention.
Afficher en entierLe coffeur entre à sn tour, il faut dégager la nuque du condamné. Les ciseaux cliquettent et les mèches glissent vers le sol en terre battue. Le cortège avance, dans le couloir le chant des partisans a remplacé la marseillaise. Marcel s'arrête au haut des marches de l'escalier, il se retourne, lève lentement le poing et crie : "adieu camarades." La prison tout entière se tait un court instant. "Adieu camarade et vive la France", répondent les prisonniers à l'unisson. Et la Marseillaise envahit à nouveau l'espace, mais la silhouette de Marcel à déjà disparu.
Afficher en entierOn a tué. J'ai mis des années à le dire, on n'oublie jamais le visage de quelqu'un sur qui on va tirer. Mais nous n'avons jamais abattu un innocent, pas même un imbécile. Je le sais, mes enfants le sauront aussi, c'est ça qui compte.
Afficher en entier"Les sentiments voyagent à travers les barreaux les plus étroits, ils s'en vont sans peur de la distance, et ne connaissent ni les frontières des langues, ni celles des religions, ils se rejoignent au-delà des prisons inventées par les hommes."
Afficher en entierNous avons quitté le troquet et, après une courte halte dans le hall de la gare, nous sommes allés à l'adresse que Jacques nous avait indiquée.
La mère Dublanc n'a pas posé de questions. Elle a juste dit que Jérôme ne devait pas beaucoup tenir à ses affaires pour partir comme ça. Je lui ai remis l'argent et elle m'a confié la clé d'une chambre au rez-de-chaussée qui donnait sur la rue.
- C'est pour une seule personne ! a-t-elle ajouté.
J'ai expliqué que Claude était mon petit frère, qu'il était là en visite pour quelques jours. Je crois Page 11
Levy Marc - les enfants de la liberté.txt que la mère Dublanc se doutait un peu que nous n'étions pas étudiants, mais tant qu'on lui réglait son loyer, la vie de ses locataires ne la regardait pas. La chambre ne payait pas de mine, une vieille literie, un broc d'eau et une cuvette. Les besoins se faisaient dans un réduit au fond du jardin.
Nous avons attendu le reste de l'après-midi. A la tombée du jour, on a frappé à la porte. Pas de cette façon qui vous fait sursauter, pas ce cognement assuré de la Milice quand elle vient vous arrêter, juste deux petits coups contre le chambranle.
Afficher en entier" Le cortège avance, dans le couloir le Chant des Partisans a remplacé la Marseillaise. Marcel s'arrête au haut des marches de l'escalier, il se retourne, lève lentement le poing et crie : "Adieu camarades". La prison tout entière se tait un court instant. "Adieu camarades et vive la France", répondent les prisonniers à l'unisson."
Afficher en entierAu petit matin Jacques ne me voit pas au rendez vous de la mission. Quelque chose a du m'arriver en chemin, un contrôle aura mal tourné. Il enfourche son vélo et se précipite chez moi pour "nettoyer" ma chambre, c'est la règle. Les deux policiers qui étaient en planque l'ont arrêté
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