Extraits

Elle devait faire comprendre à Hugh à quoi il avait renoncé dix ans plus tôt. Elle devait lui donner un aperçu de ce qu'il n'aurait pas, désormais, même en ayant consenti à ce stupide mariage. Pour chaque larme qu'elle avait versée, chaque jour passée à ce morfondre, pour la souffrance qu'elle avait endurée...Il devait payer.

- Oh, Hugh chéri...minauda-t-elle soudain. Comme il fait chaud ! Vous ne trouvez pas ?

Sans attendre de réponse, elle défit les premiers boutons de son corsage et écarta son décolleté tout en s'éventant avec sa main. Puis, après avoir entrouvert la vitre de son coté, elle remonta ses jupes afin de pouvoir s'agenouiller sur la banquette à côté de lui. Les genoux calés contre la cuisse de Hugh, elle posa une main sur sa jambe.

Le bras tendu pour entrouvrir sa fenêtre, elle tourna la tête vers lui, de manière que leurs lèvres soient prêtes à se toucher.

- Cela ne vous dérange pas, n'est-ce pas, chéri ? s'enquit-elle dans un murmure sensuel, en laissant sa main remonter le long de la cuisse dure comme le roc.

Elle vit un muscle tressaillir sur sa mâchoire crispée et sa pomme d'Adam s'agiter sur son cou. Les traits tirés, les sourcils froncés, il paraissait souffrir le martyre.

Fais-le lui payer !

La voiture fit une embardée en roulant dans un nid-de-poule, et même si les mains de Hugh lui enserrèrent la taille pour la retenir, Jane fit en sorte de retomber à califourchon sur lui.

- Jane ! gémit-il.

Sur ses hanches, elle sentit ses doigts se crisper. mais loin de la repousser, comme elle s'y était attendue, ses mains tremblantes semblaient l'attirer à lui.

- Que se passe-t-il, chéri !

- Ne me toucher pas, lass ! lança-t-il d'un ton pressant. Vous ne...devez pas...me toucher.

- Ce que je peux être maladroite ! feignit-elle de se reprocher. Vous voilà obligé de me retenir pour m'empêcher de glisser...lentement...inexorablement... sur votre...

Jane approcha sa bouche de son oreille et conclut dans un souffle :

- ...braguette !

- Vous n'allez pas faire une flambée directement sous ces pauvres bêtes ? Il peut y avoir des petits, ou des vieillards incapables de se déplacer...

- Le ragoût d'écureuil... intervint malicieusement Mirag. Dé-li-cieux !

Jane lui lança un regard horrifié, puis tourna vivement la tête vers Hugh et répéta d'une voix tremblante :

- Le... Le ragoût de... d'écureuil ?

- Je jure ... que parfois je dois avoir envie de faire l'amour autant qu'un jeune homme de mon âge. Il y a des gens que les choses du sexe obsèdent. J'en fais partie.

- Parole de vierge de vingt-sept ans !

Loués soient les véritables « amateurs de sensations fortes », héros victoriens quasi-méconnus, suffisamment sauvages pour goûter à tous les plaisirs avec abandon, mais suffisamment rusés pour ne jamais se laisser absorber par l’histoire. [Mis en exergue]

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Mais il était vrai que le vieux épargnait toujours à MacCarrick les boulots les plus éprouvants – ceux qui changeaient un homme à jamais. Hugh était envoyé sur les traces d’indéniables dangers publics qui, se sachant condamnés, luttaient pour survivre. Grey devait se contenter des cas ambigus, périphériques. Vers la fin, il lui était même arrivé de ne plus rechigner à tuer des enfants.

C’étaient leurs yeux morts et vitreux qui hantaient ses rêves à présent.

Elle changea d’expression pour lui demander, d’une voix très douce :

- Hugh… vous souvenez-vous de cette époque où je vous provoquais sans cesse ?

Comme s’il avait pu l’oublier…

- Pauvre chéri… reprit-elle d’un air dépité. Vous allez constater que je suis devenue infiniment plus habile à ce jeu-là.

[…]

- Vous découvrirez que j’ai de nouvelles flèches… dans mon carquois.

[…]

- Préparez-vous également, chéri ! lança-t-elle sans se retourner. Je m’apprête à faire de votre vie un enfer.

Au premier, après être entrée dans sa chambre, elle en claqua violemment la porte.

- La routine… marmona-t-il.

Au moins, songea-t-il, leurs noces ne pourraient se dérouler plus mal que leurs fiançailles…

Source lune-et-plume.fr