Extraits

Le Légendaire se tourne vers l’elfe.

— Shimy, essaie de retrouver les autres et allez botter les fesses d’Anathos ! Moi, de mon côté, je vais refaire le portrait de cette copie mal dégrossie !

— Entendu ! Mais ne t’avise surtout pas de mourir ! l’avertit l’elfe. Parce que, toi et moi, il faut qu’on finisse de discuter de notre relation !

— Ouais, c’est ça… À tout à l’heure ! répond le Légendaire, un peu mal à l’aise.

— Je vois qui porte la culotte dans le couple ! se moque l’Infernal. Bon, on passe aux choses sérieuses ?

L’éclair frappe de plein fouet sa cible, mais celle-ci reste impassible malgré la violence de l’attaque. Anathos et l’Infernale distinguent alors l’intruse : une femme, adulte, vêtue d’un casque voilé dissimulant son visage et d’une longue cape.

— Bruyant ! commente l’inconnue avec ironie.

— Non ! C’est impossible ! s’emporte Dark-Jadina en constatant son impuissance.

— Qui es-tu et que veux-tu ? l’interroge Anathos, méfiant.

— Vous donner un sage conseil, répond l’intruse. Acceptez d’affronter les Légendaires en personne ! Écrasez-les de votre main et de celle de vos Infernaux ! Vous éteindrez, du même coup, la dernière lueur d’espoir que les Alysiens portent encore dans leur cœur ! Alysia vous sera alors totalement soumise ! déclare-t-elle.

Aussitôt, l’inconnue semble aspirée dans un vortex magique.

— Elle a… disparu ! balbutie Dark-Jadina en se tournant vers le dieu de la Mort. J’ai rêvé ou bien cette femme était une adulte ?!

Puis, devant l’attitude étrange d’Anathos, elle ajoute :

— Vous… Vous n’allez tout de même pas l’écouter, mon seigneur !

Sans un mot, le dieu rejoint son trône, pensif.

La rage ultime !

Celle qui vous anime et vous consume en même temps. Celle qui, durant près de vingt ans, a été la raison d’être d’un homme, autrefois connu sous le nom de Razzia. Il ne reste rien du garçon grassouillet et jovial d’antan. L’individu qui domine le champ de bataille est un colosse tout en muscles, à la crinière épaisse et au regard impitoyable. Autour de lui gisent ses innombrables ennemis, ceux-là mêmes qui ont ravagé sa cité alors qu’il était enfant. Le guerrier a anéanti l’armée des mille loups, avec sa rage pour seule compagne !

Aussi silencieusement qu’ils sont arrivés, les trois cavaliers reprennent leur route, accablés par le paysage désolé qui s’étend jusqu’à l’horizon.

— Nous aurions dû faire quelque chose pour eux ! Leur dire qui nous sommes… intervient l’un d’eux.

— Et zela aurait chanzé quoi ? réplique son compagnon. Zes malheureux zont condamnés quoi qu’on fazze !

— Ça suffit ! s’écrie Shimy en désignant la magicienne d’un doigt accusateur. Arrête cette comédie ! Je ne sais pas ce que tu comptais faire, mais je ne suis pas dupe ! Tu n’es pas Jadina !

— Euh… Shimy, mais qu’est-ce que tu racontes ? lui demande Gryf, aussi surpris par les paroles de l’elfe que ses deux autres compagnons.

— Voilà en effet une bien curieuse affirmation ! proteste Jadina. Venant d’une infirme, qui plus est !

— C’est vrai que j’ai perdu l’usage de mes yeux. Pourtant, j’y vois sans doute mieux que n’importe qui grâce à mes nouveaux dons de perception, notamment celle des auras ! rétorque l’elfe. Et j’affirme que la tienne n’a rien d’une aura humaine !

— Tu te trompes, Shimy ! la contredit Gryf. N’oublie pas que mes sens de jaguarian sont d’une grande acuité. On ne peut tromper mon odorat… C’est bien Jadina qui se trouve devant nous !

— Mais je… commence l’elfe.

— Pitié ! l’interrompt la magicienne. Arrête tes enfantillages, Shimy ! Nous avons mieux à faire !

Plus loin au nord, dans la citadelle mobile d’Anathos, au sommet de l’une des tours du palais, Ténébris résiste depuis plusieurs jours à l’interrogatoire musclé que lui font subir les Infernaux.

— Attends, Dark-Razzia ! ordonne Dark-Shimy alors que le colosse s’apprête à frapper de nouveau la guerrière. Je crois qu’elle a perdu connaissance !

— Encore ? s’agace l’Infernal. À ze rythme-là, on n’est pas près de lui faire cracher où ze cachent les Lézendaires !

— Razzia… murmure Ténébris en luttant pour rester consciente. Comparé à lui, tu cognes vraiment comme une fillette !