Extraits

- À quoi penses-tu, mon amour ? demanda-t-il soudain.

Elle sursauta, car elle le croyait endormi.

- Je me disais que je n'ai jamais été aussi heureuse, répondit-elle avec un sourire. Je pourrais rester allongée contre toi pour le reste de ma vie.

Rory la fit rouler sur le dos et se pencha sur elle pour le regarder dans les yeux. Il l'embrassa sur le nez, puis sur la joue.

- Dans ce cas, je n'ai pas été à la hauteur de ma tâche, souffla-t-il avant de s'emparer de ses lèvres.

Aussitôt, la jeune femme sentit renaître un désir familier et intense. Une vague de chaleur se propagea dans tout son corps. Bientôt, elle l'implorerait.

- Que veux-tu dire ? demanda-t-elle malgré la torpeur qui l'enveloppait.

La bouche de Rory se fit plus exigeante tandis qu'il s'allongeait sur son corps, la laissant pantelante sous ses baisers.

- Nous ne sommes pas encore mariés, et tu te contentes déjà d'une seule position.

- Canaille ! Tu sais parfaitement ce que je veux dire. Et sache que tu es à la hauteur de ta tâche (Elle le repoussa en riant.) Et il me semble que tu ne m'as pas demandé de t'épouser. Tu sembles bien sûr de ma réponse.

L'espace d'un instant, il f ut désarçonné. Puis il afficha un sourire teinté d'arrogance. Il se dressa sur son séant et croisa les bras. Isabel retint son souffle, émerveillée par ce corps superbe, cette peau hâlée, ces épaules carrées. Jamais elle ne se lasserait de l'admirer. Et il lui appartenait !

- Tu dois m'épouser, dit-il. Pour l'enfant.

Son regard bleu erra sur le corps dénudé de la jeune femme, s'attardant sur ses hanches. Il fronça les sourcils.

- Tu as les hanches trop étroites. Mon fils sera peut-être trop gros pour ta petite carrure.

Elle réfléchit à ses propos, puis demanda d'un air ingénu ;

- Comment peux-tu avoir la certitude que ce sera un garçon ?

- Bien sûr que ce sera un garçon ! s'exclama- t-il. Nous le prénommerons John.

Isabel secoua la tête. N'apprendrait-il jamais qu'il ne pouvait pas décider de tout ?

- N'ai-je pas d'autres raisons de t’épouser? s'enquit-elle, presque inquiète.

Il cessa de la taquiner. Toute arrogance avait disparu pour faire place à une tendresse infinie qui fit fondre le coeur de la jeune femme.

- J'ai gardé mon meilleur argument pour la fin, dit-il en la regardant droit dans les yeux.

Le souffle court, elle attendit.

- Sans toi, ma vie n'aurait aucun sens, avoua- t-il. En te chassant de Dunvegan, j'ai commis la pire erreur de mon existence. Un voile noir s'est posé sur mon âme. Je t'aime plus que je ne l'aurais cru possible. Et je te suis dévoué pour toujours, à toi et à notre enfant, conclut-il en posant une main protectrice sur son ventre.

- Je veux que tu saches que je t'aime.

Isabel leva vivement la tête.

- Tu... Tu m'aimes ? demanda-t-elle, incrédule.

- Plus que je ne l'aurais jamais imaginé...

La jeune femme était si heureuse que, l'espace d'un instant, elle oublia sa peur. Elle avait tellement souhaité entendre ces paroles, mais pas dans ces circonstances.

Les joues empourprées, elle tenta de rajuster son décolleté.

Quand il eut repris le contrôle de ses émotions, Rory vit rouge. C'en était assez ! Il était impensable que sa femme s'exhibe de la sorte !

Ses seins généreux, sa taille fine, ses hanches minces... n'avaient pas à être exposés au regard de ses hommes. Ils lui appartenaient, du moins dans l'immédiat, et Rory n'était pas disposé à partager.

- Je suis désolée d'être en retard, déclara Isabel. J'ai mis longtemps à me préparer...

Sans un mot, il se leva, la prit par le bras et l'entraîna sans ménagement hors de la pièce.

- Apparemment, vous n'avez pas fini de vous préparer, répondit-il dès qu'ils se furent éloignés dans le couloir.

- Que voulez-vous dire ?

Cette fois, il ne prit pas la peine de masquer sa furie.

- Ne jouez pas avec ma patience, Isabel ! s'exclama-t-il d'une voix sombre et menaçante.

Il comprit à son silence qu'elle avait pris note de son avertissement. Il l'emmena vers la tour des fées et la traîna à sa suite dans l'escalier. Arrivé dans sa chambre, il referma brutalement la porte. Debout, au milieu de la pièce, la jeune femme triturait nerveusement la soie de sa robe, les yeux baissés.

- Quelles sont vos intentions ? demanda-t-elle.

- Je n'agirai pas comme je serais en droit de le faire, rétorqua-t-il en la toisant de nouveau. Cette robe est indécente. Comment avez-vous pu arborer une tenue aussi déplacée ?

- Elle est un peu audacieuse, peut-être...

- Un peu ? s'insurgea-t-il. On voit la naissance de vos mamelons !

- Ne criez pas ! implora-t-elle, rougissante.

- Je ne crie pas, reprit Rory, qui tenta de se maîtriser.

Son excitation semait le doute dans son esprit.

- Je ne pensais pas que vous remarqueriez ma tenue, déclara la jeune femme d'un air de défi.

- Oh, je l'ai remarquée ! Comme tous les hommes présents dans la salle, d'ailleurs. Ma femme, la maîtresse de ce château, ne saurait se pavaner comme une catin en présence de mes hommes !

- Je ne suis qu'une compagne provisoire, rétorqua-t-elle, pleine de morgue.

- C'est donc cela ? fit-il avec un regard perçant. Sachez que vous ne parviendrez jamais à me manipuler, Isabel. Encore moins avec un morceau de tissu, même des plus révélateurs.

- Vous vous trompez, répondit-elle, et elle releva la tête. Cette robe me plaît, voilà tout.

-Alors? demanda-t-elle.

-J'ignorais que vos propos appelaient une réponse. Si vous tenez à le savoir, j'ai remarqué que physiquement au moins, vous n'êtes plus une enfant.

- Ne voulez-vous pas avoir quelqu'un à aimer ? Quelqu'un qui vous aime ? Quelqu'un à qui confier vos secrets, vos tourments, quelqu'un de loyal ?

- Je suis chef de clan. J'ai l'amour et la confiance des miens. Les MacLeods sont d'une loyauté infaillible. Je ne demande rien de plus.

Et un chef ne confie ses secrets à personne. Un guerrier n'a que faire de l'amour. L'amour remporte-t-il des batailles? Règle-t-il les conflits? Non, l'amour n'est qu'une idée fantasque inventée par les troubadours pour raconter de belles histoires. L'amour n'a pas sa place dans le mariage. Les nobles se marient pour leurs terres et leur fortune. Ou pour régler un différend, comme dans notre cas. Par cette alliance, nous accomplissons notre devoir, Isabel, ni plus ni moins

Ce baiser scellera notre alliance. Il se pencha lentement vers elle, prenant le temps de humer son parfum, puis posa les lèvres sur les siennes. Aussitôt, il réprima un gémissement tant cette bouche était enivrante. Sous ses doigts, il sentit la peau veloutée de sa joue. Il aurait eu envie de prolonger ce baiser, de la prendre dans ses bras et la plaquer contre son corps... lui faire sentir l'intensité vibrante de son désir, contre son ventre, et plonger en elle. Cependant, quelque chose le retenait. Il s'écarta à regret. Elle avait les joues roses, les lèvres entrouvertes. Rory se sentit submergé par des émotions qu'il avait du mal à contrôler. Pour la première fois de sa vie, Rory MacLeod, un homme qui avait affronté les guerriers les plus redoutables sur les champs de bataille et mis ses ennemis à terre, connut la peur. Il baissa la main et fit un pas en arrière. Cela ne se reproduirait jamais.

Elle ne comprendrait jamais le pouvoir qu'elle exerçait sur les hommes. Il en avait toujours été ainsi, ce qui ne manquait pas de l'exaspérer. Ces sourires stupides, ces gestes timides, quand il ne s'agissait pas de regards lubriques... Ses frères étaient les seuls qui ne se conduisaient pas comme des imbéciles en sa présence. Elle était lasse que les gens ne s'intéressent qu'à son apparence. Rien qu'une fois, elle aurait aimé rencontrer quelqu'un qui sache voir au-delà de son enveloppe charnelle pour entrevoir ses qualités et ses défauts.