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Le roi des fous, au lieu de porter une camisole de force, disposait du sang des peuples pour alimenter le jeu de ses démences.
Afficher en entier- La tragédie de la grandeur, dit-il, est d'avoir à fouler des cadavres.
Afficher en entierBrandt, que ses fonctions de secrétaire privé auprès de Himmler mettaient à même de savoir beaucoup de choses, félicita Kersten de son succès pour la libération de Bignell. Il fit remarquer toutefois au docteur que Rauter avait l’appui absolu de Heydrich, le grand chef de tous les services de la Gestapo, à l’étranger comme en Allemagne. Et Heydrich n’oublierait jamais que Kersten avait humilié l’autorité de son représentant en Hollande et la sienne propre en s’adressant par-dessus sa tête à Himmler.
— Soyez prudent, acheva Rudolph Brandt.
Kersten fit part de cette conversation à Élisabeth Lube qui tenait sa maison à Berlin. Il ne lui cachait rien. C’était une habitude prise vingt années auparavant, alors que, très jeune, très seul et très pauvre, il avait trouvé en elle une sœur aînée.
Par contre, à l’égard de sa femme qui vivait à Hartzwalde, sans presque en bouger, un instinct de protection lui commandait de la laisser ignorer complètement la partie de sa vie qui commençait à devenir dangereuse.
Afficher en entierNous allons voir cela tout de suite, dit Kersten. Il leva les bras, étala ses mains, fit jouer les paumes et les phalanges, afin de les munir de toute l’élasticité, toute la vigueur possibles, et se mit au travail. Il ne tâtonnait plus. Il savait maintenant où son effort devait s’appliquer. Il enfonça profondément ses doigts dans le ventre de son patient à l’endroit voulu, saisit avec précision et rudesse le bourrelet ainsi formé et le serra, le pétrit, le tordit, le noua, le dénoua, dans le dessein d’atteindre et de remuer les nerfs malades à travers la peau, la graisse et la chair. À chacun de ces mouvements, Himmler sursautait avec un cri étouffé. Mais, cette fois, la douleur n’était pas brute, aveugle. Elle suivait un trajet précis. Comme si elle avait un but
Afficher en entierBrusquement, Himmler poussa un cri. Les doigts jusque-là si légers et comme garnis de velours qui effleuraient sa peau venaient d’appuyer brutalement sur un point du ventre d’où la souffrance jaillissait, s’irradiait en vague de feu. — Très bien… Ne bougez pas, dit Kersten doucement. Sous la dure pression de sa main, un autre jet de souffrance brûla, ravagea les entrailles de Himmler. Puis un autre et un autre encore. Le Reichsführer ahanait, mordait ses lèvres. Son front était couvert de sueur
Afficher en entierOui, les mêmes linéaments et les mêmes reliefs composaient cette figure. Mais le flux intérieur qu’avait déclenché Kersten et auquel, dans cet instant, il s’abandonnait, en transformait soudain l’expression, la signification et, semblait-il, jusqu’à la substance. Les rides s’effaçaient, la chair perdait son poids, les lèvres n’avaient plus leur pli de gourmandise. Les paupières, enfin, s’étaient abaissées. Et ce n’était plus à un grand bourgeois de Rhénanie ou des Flandres, peint par un maître d’autrefois, que faisait penser le visage de Kersten, mais à l’une des images bouddhiques dont l’Extrême-Orient est peuplé
Afficher en entierIl fallait ne plus rien voir ni entendre. Il fallait que l’odorat également cessât de servir. C’étaient les antennes tactiles (dont le pouvoir récepteur se trouvait prodigieusement accru par l’abolition provisoire des autres sens) qui devenaient les seuls instruments des rapports avec le monde. Et ce monde était limité au corps que le bout des doigts examinait, auscultait. Et leurs découvertes étaient aussitôt transmises à un esprit qui s’était vidé de toute autre préoccupation et fermé à toute autre impression
Afficher en entier— Tout de suite, docteur, tout de suite, s’écria Himmler avec empressement. Il se dénuda jusqu’à la ceinture : il avait des épaules tombantes, plus étroites que le torse, la peau molle, les muscles pauvres et l’estomac proéminent. — Étendez-vous bien à plat, sur le dos, Reichsführer, dit Kersten. Himmler se coucha. Kersten approcha un fauteuil du divan et s’assit commodément. Ses mains se portèrent sur le corps allongé
Afficher en entierUne fois, je lui ai demandé : — Quand vous traitiez Himmler, aviez-vous la même méthode, le même comportement, les mêmes attitudes ? Il m’a regardé avec surprise et répondu : — Bien sûr… exactement… comme avec tous mes malades
Afficher en entierHimmler lâcha la main de Kersten. Son visage ingrat devint encore plus cireux. Il reprit : — Pas un seul médecin d’Allemagne n’a réussi. Mais M. Rosterg et M. Diehn m’ont assuré que là où les autres échouent, vous obtenez des résultats. Sans répondre, les bras ballants, Kersten étudiait les pommettes mongoloïdes, les cheveux pauvres, le menton fuyant
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