Les Aventures de Jeremy Nelson, Tome 4 : Les Nids de l'hirondelle

Lundi 5 octobre

Mme Lequindre s’éveilla en sursaut. Elle s’adossa au traversin. Seul le ploc du robinet de la salle de bains troublait le silence.

Elle alluma la lampe de chevet et tâtonna à la recherche de ses demi-lunes. La pendule indiquait deux heures du matin.

Sur le qui-vive, elle prêta l’oreille, attentive au moindre craquement, puis elle s’extirpa de son lit et, appuyée sur sa canne, longea le salon de musique en évitant de buter contre l’ottomane. À la hauteur du piano, elle marqua une pause. Par la fenêtre entrebâillée lui parvenait la rumeur diffuse de la ville. Elle rejoignit le séjour et atteignit le vestibule. Son pied bandé ralentissait sa progression.

Une lueur filtrait sous la porte d’entrée ; elle ne pouvait être dispensée par le plafonnier du palier puisqu’elle la voyait se déplacer.

Mme Lequindre, le souffle court, se tenait dans la pénombre comme dans l’habitacle d’un sous-marin en perdition. C’est alors qu’elle repéra les rectangles clairs sur le parquet, à la lisière du tapis. Y avait-il deux ou trois enveloppes ?

— Saloperie ! gronda-t-elle.

La poitrine oppressée, elle ne prit pas la peine de les ramasser. La colère lui brûlait les joues, son sang battait la charge.

Tout avait commencé en juin. D’abord, elle négligea la menace, ensuite, elle s’abstint de lire les messages, son caractère s’aigrit, elle devint encore plus suspicieuse à l’égard de son entourage mais elle ne se résolut pas à porter plainte. Personne ne devait savoir. Quand les journées raccourcirent, l’anxiété propagea ses hantises au cœur de ses nuits.