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Extrait ajouté par lamiss59283 2012-02-22T11:16:54+01:00

Juviles, Alpujarras, royaume de Grenade

Dimanche 12 décembre 1568

Le carillon appelant à la grand-messe de dix heures du matin fendit l'atmosphère glaciale qui enveloppait le petit village, situé sur un des nombreux contreforts de la Sierra Nevada ; son écho métallique se perdit dans les profondeurs des ravins, comme s'il voulait s'écraser contre le flanc de la Contraviesa, la chaîne montagneuse qui, au sud, entoure la vallée fertile traversée par le Guadalfeo, l'Adra et l'Andarax, trois rivières arrosées par d'innombrables affluents qui descendent des sommets enneigés. Au-delà de la Contraviesa, les terres des Alpujarras s'étendent jusqu'à la Méditerranée. Sous un timide soleil d'hiver, près de deux cents hommes, femmes et enfants – la plupart traînant des pieds, presque tous silencieux – se dirigeaient vers l'église et se rassemblèrent à ses portes.

Le temple, en pierre ocre dépourvu de tout ornement extérieur, se composait d'un corps rectangulaire unique et simple, sur un des côtés duquel s'élevait la tour massive qui abritait la cloche. Près de l'édifice s'étendait une place avec vue sur les gorges touffues qui descendaient de la Sierra Nevada vers la vallée. Depuis la place, en direction de la montagne, partaient d'étroites ruelles bordées d'une multitude de maisons blanchies à la chaux avec de l'ardoise pulvérisée : des habitations à un ou deux étages, avec de toutes petites portes et fenêtres, des toits plats et des cheminées rondes couronnées de protections en forme de champignon. Disposés sur les toits, poivrons, figues et raisin séchaient au soleil. Les rues escaladaient le flanc de la montagne, de sorte que les toits des maisons du bas atteignaient les fondations de celles du haut, comme si elles grimpaient les unes sur les autres.

Sur la place, devant les portes de l'église, un groupe formé de quelques enfants et de plusieurs vieux-chrétiens parmi la vingtaine qui vivaient dans le village observait une vieille femme juchée tout en haut d'une échelle posée contre la façade principale du temple. La femme grelottait et claquait des quelques dents qui lui restaient. Les Maures pénétrèrent dans l'église sans regarder leur sœur de foi, hissée là depuis le lever du jour, agrippée au dernier échelon, supportant sans manteau le froid de l'hiver. La cloche sonnait, et un enfant montra la femme, qui tremblait au son du carillon, s'efforçant de garder l'équilibre. Des rires déchirèrent le silence.

— Sorcière ! entendit-on parmi les ricanements.

Deux jets de pierres atteignirent le corps de la vieille femme tandis qu'au bas de l'échelle les crachats s'amoncelaient.

Le carillon s'arrêta ; les chrétiens encore dehors se hâtèrent d'entrer dans l'église. À l'intérieur, à deux pas de l'autel et face aux fidèles, un gros homme brun, tanné par le soleil, était à genoux, sans cape ni manteau, une corde autour du cou et les bras en croix : il tenait un cierge allumé dans chaque main.

Quelques jours plus tôt, ce même homme avait remis à la vieille de l'échelle la chemise de son épouse malade afin qu'elle la lave dans une source dont les eaux avaient, disait-on, des pouvoirs curatifs. Dans cette petite source naturelle, cachée parmi les rochers et l'épaisse végétation de la montagne escarpée, on ne lavait jamais de linge. Don Martin, le curé du village, surprit la femme en train de laver cette unique chemise et ne douta pas qu'il s'agissait d'un sortilège. Le châtiment arriva sans tarder : la vieille femme devait passer la matinée du dimanche juchée sur l'échelle, exposée à l'humiliation publique. Quant au Maure ingénu qui avait sollicité l'enchantement, il fut condamné à faire pénitence en écoutant la messe à genoux. Et c'est dans cette posture que pouvaient le contempler les personnes alors présentes.

Dès qu'ils furent entrés dans le temple les hommes se séparèrent de leurs femmes, et celles-ci, avec leurs filles, occupèrent les rangées de devant. Le pénitent agenouillé avait le regard perdu. Tout le monde le connaissait : c'était un homme bon, qui veillait sur ses terres et s'occupait des deux vaches qu'il possédait. Il voulait juste aider sa femme malade ! Peu à peu les hommes se placèrent, en ordre, derrière les femmes. Quand tous furent installés, le curé, don Martin, le bénéficier, don Salvador et Andrés, le sacristain, accédèrent au chœur. Don Martin, ventripotent, teint blafard et joues rougies, vêtu d'une chasuble en soie brodée d'or, se cala dans un fauteuil de cérémonie face aux fidèles. Debout, de chaque côté, se postèrent le bénéficier et le sacristain. Quelqu'un ferma les portes de l'église ; tout s'immobilisa et les flammes des lampes cessèrent de scintiller. Le plafond coloré mudéjar à caissons de l'église étincela alors, rivalisant avec les retables sobres et tragiques du chœur et du transept.

Le sacristain, un homme jeune et grand, tout de noir vêtu, sec, à la peau mate, comme la plupart des fidèles, ouvrit un livre et se racla la gorge.

— Francisco Alguacil, lut-il.

— Présent.

Après avoir vérifié d'où provenait la réponse, le sacristain inscrivit quelque chose dans le livre.

— José Almer.

— Présent.

Nouvelle annotation. « Milagros Garda, Maria Ambroz... » Au fur et à mesure de l'appel, les réponses ressemblaient de plus en plus à des grognements. Le sacristain continuait de contrôler les visages et de prendre des notes.

— Marcos Núñez.

— Présent.

— Tu n'étais pas à la messe dimanche dernier, accusa soudain le sacristain.

— J'étais...

L'homme tenta de s'expliquer, mais les mots peinaient à venir. Il termina sa phrase en arabe tandis qu'il présentait un document.

— Approche, lui ordonna Andrés.

Marcos Núñez se faufila parmi les présents jusqu'au pied de l'autel.

— J'étais à Ugíjar, parvint-il à dire cette fois, en remettant le document au sacristain.

Andrés le feuilleta et le passa au curé, qui le lut attentivement avant de vérifier la signature et d'acquiescer d'une grimace : le supérieur de la collégiale d'Ugíjar certifiait que le 5 décembre 1568 le nouveau-chrétien dénommé Marcos Núñez, voisin de Juviles, avait assisté à la grand-messe célébrée dans cette localité.

Le sacristain esquissa un sourire imperceptible et inscrivit quelque chose dans le livre avant de poursuivre l'interminable liste de nouveaux-chrétiens – les musulmans contraints au baptême et au christianisme par le roi –, dont l'assistance aux saints-offices devait être contrôlée tous les dimanches et les jours d'obligation. Certains des interpellés ne répondirent pas et leur absence fut soigneusement consignée. Deux femmes, à la différence de Marcos Núñez avec son certificat d'Ugíjar, ne purent justifier pourquoi elles n'avaient pas assisté à la messe célébrée le dimanche précédent. Toutes deux essayèrent confusément de fournir des excuses. Andrés les laissa s'épancher et jeta un coup d'œil en direction du curé. Dès que don Martin, d'un geste autoritaire de la main, la pria de se taire, la première femme renonça à sa tentative ; la seconde, cependant, continuait de prétendre qu'elle avait été malade ce dimanche-là.

— Demandez à mon mari ! glapit-elle en cherchant son époux d'un regard nerveux dans les rangées du fond. Il vous...

— Silence, adoratrice du diable !

Le cri de don Martin fit taire la Mauresque, qui préféra baisser la tête. Le sacristain releva son nom : les deux femmes paieraient une amende d'un demi-réal.

Après un long moment consacré à la vérification des comptes, don Martin ouvrit la messe, non sans indiquer auparavant au sacristain d'obliger le pénitent à lever davantage les mains, qui tenaient les cierges.

— Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit...

La cérémonie continua, même si ceux qui comprenaient les lectures sacrées ou pouvaient suivre le rythme frénétique malgré les cris constants avec lesquels le prêtre les réprimanda durant l'homélie étaient peu nombreux.

— Vous croyez peut-être que l'eau d'une source vous guérira d'une maladie ?

Don Martin désigna l'homme agenouillé ; son index tremblait et les traits de son visage apparaissaient crispés.

— C'est votre pénitence. Seul le Christ peut vous délivrer des misères et des privations par lesquelles il punit votre vie dissolue, vos blasphèmes et votre attitude sacrilège !

Mais la majorité d'entre eux ne parlait pas l'espagnol ; certains communiquaient avec les Espagnols en aljamiado, mélange d'arabe et de castillan. Néanmoins, ils étaient tous forcés de connaître le Notre-Père, l'Ave Maria, le Credo, le Salve et les Commandements en espagnol : les enfants maures, grâce aux leçons qu'ils recevaient du sacristain ; les hommes et les femmes, à travers les cours de religion qu'on leur donnait le vendredi et le samedi, et auxquels ils devaient assister sous peine de se voir frappés d'une amende et d'une interdiction de mariage. Lorsqu'ils prouvaient qu'ils connaissaient par cœur les prières, alors seulement ils étaient exemptés de venir en classe.

Pendant la messe, certains priaient. Les enfants, attentifs au sacristain, le faisaient à voix haute, presque en criant, ainsi que le leur avaient appris leurs parents qui, de cette manière, pouvaient tromper la présence agitée du bénéficier et prononcer en cachette : Allahu Akbar. Beaucoup le murmuraient les yeux fermés, en soupirant.

— Au nom de Dieu, le Tout-Clément ! Délivre-moi de mes défauts, de mes vices..., entendait-on dans les rangées des hommes dès que don Salvador s'éloignait un peu.

Mais il ne s'écartait pas beaucoup, comme s'il redoutait qu'on le défie en invoquant le Dieu des musulmans dans le temple chrétien, au cours de la grand-messe.

— Au nom de Dieu, Souverain ! Guide-moi par ton pouvoir..., s'exclama un jeune Maure plusieurs rangs derrière, couvert par le tumulte du Notre-Père crié par les enfants.

Don Salvador se retourna vivement.

— Ô Miséricordieux ! Emmène-moi dans ta gloire..., en profita pour implorer un autre homme depuis le côté opposé. Le bénéficier rougit de colère.

— Au nom de Dieu, Miséricordieux ! insista un troisième homme.

Soudain, une fois la prière chrétienne terminée, l'âpre voix du prêtre s'imposa de nouveau.

— Loué soit Ton nom, put-on entendre ce jour-là depuis un rang au fond.

La plupart des Maures restèrent immobiles, droits et impénétrables ; certains soutenaient le regard de don Salvador, la majorité s'y dérobait ; qui avait osé louer le nom d'Allah ? Le bénéficier passa brutalement entre les rangs, mais il ne put désigner le sacrilège.

En milieu de messe, sous l'œil vigilant de don Martin toujours assis, le sacristain et le bénéficier, l'un avec le livre, l'autre avec une corbeille, recueillirent les oboles des paroissiens : pièces de maille, pain, œufs, lin... Seuls les pauvres étaient dispensés de faire des dons ; si un riche ne donnait rien pendant trois dimanches, il recevait une amende. Andrés consignait en détail qui donnait quoi.

Lorsque retentit la « clochette de mort », comme on appelait celle qui annonçait la consécration, les Maures s'agenouillèrent de mauvaise grâce au milieu des démonstrations de piété des vieux-chrétiens. La clochette de mort carillonna au moment où le prêtre, le dos tourné aux paroissiens, levait l'hostie ; on l'entendit de nouveau quand, toujours de dos, il leva le calice Le prêtre s'apprêtait à dire les paroles sacramentelles quand, tout à coup, courroucé par le bourdonnement qui agitait l'église, il se retourna vers les fidèles, le visage furieux.

— Chiens ! cria-t-il.

L'imprécation éclaboussa de salive le verre sacré.

— Que signifient ces murmures ? Taisez-vous, hérétiques Agenouillez-vous comme il se doit pour recevoir le Christ, le seul Dieu ! Toi ! – Son index désigna un vieil homme au troisième rang. – Redresse-toi ! N'essaie pas d'idolâtrer ton faux dieu. Regardez ! Levez les yeux lorsqu'on vous offre le saint sacrement !

Son regard foudroya deux Maures de plus avant de continuer. Puis, hommes et femmes vinrent en silence manger « le pain ». Beaucoup s'efforçaient de conserver la pâte de blé humectée dans leur bouche afin de pouvoir la recracher chez eux ; tous les Maures, sans exception, faisaient ensuite des gargarismes pour se débarrasser des restes.

Les gens quittèrent l'église après la bénédiction de paix ; les chrétiens la reçurent avec dévotion ; les autres, plus nombreux, se signèrent à l'envers pour abuser le prêtre, affirmant en silence l'unicité de Dieu et raillant la Sainte-Trinité, qu'ils devaient invoquer en faisant le signe de croix. Les Maures se dépêchèrent de rentrer chez eux recracher l'hostie. Les quelques chrétiens du village s'entassèrent aux portes de l'église pour discuter, indifférents aux insultes proférées par leurs enfants à la vieille femme qui, ayant fini par tomber de l'échelle, était à terre, recroquevillée et tuméfiée, les lèvres bleuies, respirant avec difficulté. À l'intérieur du temple, le curé et ses adjoints prolongèrent le châtiment du pénitent, à qui ils ne cessèrent de reprocher ses fautes, tandis qu'ils transportaient les objets du culte de l'autel à la sacristie.

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Extrait ajouté par Alyer 2023-02-28T12:24:00+01:00

Le soulèvement des Alpujarras mit fin à la déportation des Maures grenadins qui furent conduits dans les autres royaumes d'Espagne. Parmi ceux qui furent conduits à Cordoue, tels les personnages du roman, près d'un sixième des effectifs mourut, comme le révèle le travail Los moriscos en tierras de Cordoba, de Juan Aranda Doncel.

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Extrait ajouté par Alyer 2023-02-03T12:33:39+01:00

Le demi-sourire avec lequel Hernando remit les olives à sa mère ne réussit pas à abuser celle-ci. Elle lui caressa les cheveux avec douceur, comme elle le faisait chaque fois qu'elle devinait sa tristesse et Hernando, bien qu'en présence de ses quatre demi-frères, la laissa faire : rares étaient les occasions où sa mère pouvait lui exprimer sa tendresse et toutes, sans exception, se produisaient en l'absence de son beau-père. Brahim partageait sans hésitation le rejet de la communauté maure ; sa haine envers le nazaréen aux yeux bleus, le préféré des prêtres chrétiens, avait redoublé au fur et à mesure qu'Aisha, sa femme, mettait au monde ses enfants légitimes. A neuf ans Hernando avait été exilé dans l'étable, avec les mules, et il mangeait à l'intérieur de la maison seulement lorsque son père n'était pas là. Aisha avait dû céder aux exigences de son époux, et la relation entre mère et fils se développait à travers des gestes subtils chargés de signification.

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Extrait ajouté par Alyer 2022-11-28T11:42:51+01:00

L'histoire de la communauté maure, depuis la prise de Grenade par les Rois Catholiques jusqu'à leur expulsion définitive, dont le quatre-centième anniversaire a été commémoré en 2009, constitue l'un des nombreux épisodes xénophobes de l'histoire de l'Espagne, au même titre que les attaques d'Almanzor contre les Hébreux et les chrétiens, ou que l'expulsion bien connue des juifs espagnols par les Rois Catholiques. Les capitulations pour la reddition de Grenade établissaient des conditions très généreuses pour les musulmans, qui pouvaient conserver leur langue, leur religion, leurs coutumes et leurs qualités ; mais huit ans plus tard, le cardinal Cisneros imposa la christianisation forcée des Maures, ainsi que l'élimination de leur culture, l'établissement de nouveaux impôts élevés et la suppression de leur autonomie administrative. Les dénommés nouveaux-chrétiens devinrent à la fois des personnes exploitées et haïes, et leurs anciens droits furent restreints de manière drastique.

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Extrait ajouté par Alyer 2022-11-28T11:32:41+01:00

Ce jour-là, alors que le soleil était déjà au plus haut dans le ciel, le jeune Hernando Ruiz rentrait à Juviles. C'était un garçon de quatorze ans aux cheveux brun foncé mais à la peau bien plus claire que celle, brun olive, de ses congénères. Ses traits, néanmoins, étaient semblables à ceux des autres Maures aux sourcils fournis, à la différence notable de ses grands yeux bleus qui contrastaient. Il était de taille moyenne, mince, vif et énergique.

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Extrait ajouté par Alyer 2022-11-14T12:41:11+01:00

Hernando monta en courant l'escalier qui menait aux appartements. Il frappa à la porte de chez lui.

- Pas encore, dit Fatima de l'intérieur.

- La nuit tombe, s'entendit-il lui répondre, sur un ton terriblement ingénu.

- Pas encore, renchérit-elle fermement.

Il fit les cents pas dans le couloir de l'étage. Que faisait-elle ? Le temps passait. Devait-il frapper de nouveau ? Il hésita. Finalement, il décida de s'asseoir par terre. Et si quelqu'un le voyait ? Que dirait-il ? Si l'un des autres employés qui vivaient là... ? Et si c'était l'écuyer royal en personne ? Il se trouvait juste en bas, dans les box ! Qu'avait-il pu entendre des mots qu'il avait murmurés au poulain ? Il était interdit de parler en arabe. Hernando savait que les Maures avaient porté une pétition au conseil municipal cordouan dans laquelle ils exposaient la difficulté, pour beaucoup d'entre eux, d'abandonner la seule langue qu'ils connaissaient. Ils avaient imploré un moratoire pour l'application de la pragmatique royale afin de laisser le temps à ceux qui ne le connaissaient pas d'apprendre l'espagnol. On le leur avait refusé. Et parler en arabe était toujours puni d'une amende, voire d'une peine de prison. Quel était le châtiment pour quelqu'un qui récitait le Coran en arabe ?

Pourtant, don Diego n'avait rien dit. Etait-il donc vrai qu'ici, l'unique religion, c'était les chevaux... ?

De timides coups sur la porte le tirèrent de ses pensées. Que signifiait... ?

Les coups se répétèrent. Fatima l'appelait de l'intérieur.

Hernando se leva et ouvrit délicatement. La porte n'était pas barricadée.

Il se figea sur le seuil.

- Entre ! lui ordonna Fatima, dans un filet de voix et un sourire aux lèvres.

Il obéit gauchement.

Faute de tunique, Fatima était nue. La lumière du couchant et le tremblement d'une bougie derrière elle jouaient avec sa silhouette. Ses seins étaient peints au henné en un dessin géométrique qui grimpait, sous l'apparence d'une flamme, jusqu'aux doigts de la main en or qu'elle avait remise à son cou. Elle avait aussi peint ses yeux, entourés et accentués par de longs traits qui soulignaient leur forme en amande. Un délicieux parfum d'eau de fleur d'oranger enveloppa Hernando tandis qu'il scrutait le corps svelte et voluptueux de son épouse. Tous deux restaient immobiles, dans un silence seulement troublé par leurs respirations saccadées.

- Viens, dit-elle.

Hernando s'avança. Fatima ne bougea pas et il suivit du bout des doigts le dessin de sa poitrine. Puis, debout face à elle, il joua avec ses tétons dressés. Elle soupira. Quand il voulut prendre l'un de ses seins dans sa main, elle l'arrêta et l'emmena vers la cuvette. Alors elle le déshabilla avec douceur et lui lava le corps.

Hernando bafouilla quelque chose et s'abandonna aux frissons qui le secouaient dès que la poitrine de Fatima frôlait sa peau, que ses mains humides couraient sensuellement sur son torse, ses épaules, ses bras, son abdomen, son entrejambe...

Pendant ce temps, la jeune fille lui susurrait des mots doux : je t'aime ; je te désire ; je veux être à toi ; prends-moi ; emmène-moi au paradis...

Une fois qu'elle eut fini, elle l'embrassa et se pendit à son cou.

- Tu es la plus belle femme du monde, dit Hernando. J'ai tant attendu ce... !

Mais Fatima ne le laissa pas continuer : elle leva les deux jambes jusqu'à sa taille, s'accrocha à lui, et avança lentement sa vulve vers son pénis dressé. Ils haletèrent à l'unisson lorsque Fatima se laisse glisser vers le bas et qu'Hernando la pénétra au plus profond. Tendu, les muscles brillant de sueur, Hernando portait la jeune fille en lui tenant le dos. Elle se cambra, se tordant en quête de plaisir. C'est elle qui imposait le rythme. Hernando écouta avec attention ses gémissements, ses soupirs et ses murmures inintelligibles ; elle s'arrêta à plusieurs reprises pour lui mordiller le lobe des oreilles et le cou, lui parlant pour calmer sa fougue, lui promettant le ciel pour ensuite, de nouveau, reprendre sa danse rythmée sur son membre. A la fin, ils atteignirent l'orgasme en même temps.

Hernando cria ; Fatima s'abandonna à une extase qui dépassa celle de son époux.

- Sur le lit, porte-moi sur le lit, lui demanda-t-elle quand il voulut la reposer sur le sol. Comme ça ! Porte-moi !

Elle s'agrippa davantage à lui.

- Tous les deux, ensemble, exigea-t-elle. Je t'aime.

Elle lui tirait gentiment les cheveux tandis qu'il la conduisait à l'alcôve.

- Ne me quitte pas. Aime-moi. Reste à l'intérieur de moi...

Allongés, toujours unis, ils s'embrassèrent et se caressèrent jusqu'au moment où Fatima sentit le désir renaître chez Hernando. Alors ils refirent l'amour, avec frénésie, comme si c'était la première fois. Puis elle se leva et prépara de la citronnade et des fruits secs, qu'elle servit sur le lit à Hernando. Et pendant qu'il mangeait, elle lui lécha tout le corps, ondulant comme une chatte. Alors il joua avec elle, essayant de l'atteindre avec la langue à mesure qu'elle se glissait d'un côté et de l'autre.

Et cette nuit-là, tous deux parcoururent ensemble, sans relâche, les chemins millénaires de l'amour et du plaisir.

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Extrait ajouté par Fanfan_Do 2021-06-20T14:13:23+02:00

Ils nous ont obligés à devenir chrétiens sous peine d’exil, ce qui est une autre façon de mourir.

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Extrait ajouté par Fanfan_Do 2021-06-20T14:13:05+02:00

Allah vous a récompensés avec un fils. Moi, il m’a donné d’abord deux filles, insista Salah.

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Extrait ajouté par Fanfan_Do 2021-06-20T14:12:42+02:00

Quinze ans seulement s’étaient écoulés depuis que Philippe II en personne, instigateur de révoltes et protecteur de la cause catholique en France, avait réagi avec enthousiasme en apprenant le massacre de la Saint Barthélémy, au cours duquel les catholiques avaient assassiné plus de trente mille huguenots. Si, lors d’un conflit religieux entre chrétiens, argumentait le traducteur dans sa lettre, le roi Philippe n’avait pas hésité à afficher publiquement sa joie et sa satisfaction pour l’exécution de milliers de personnes – peut-être pas catholiques, mais chrétiennes tout de même -, quelle miséricorde pouvait-on attendre de lui puisque les condamnés n’étaient qu’un troupeau de Maures ?

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Extrait ajouté par Fanfan_Do 2021-06-20T14:12:20+02:00

Cette Église qui se considère si miséricordieuse prétend assassiner ou réduire en esclavage des milliers de personnes.

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