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Mathias se baigna dans ses yeux qui lui évoquaient un profond océan, sans avoir un seul brin de peine à y lire la passion et de tendres promesses. Très lentement et avec hésitation, il approcha son visage du sien.

Elle fit de même, plissant de plus en plus les yeux, jusqu’à complètement les fermer. Elle ne sentit plus que le souffle de son Ange contre ses lèvres, ainsi que sa main sur sa nuque. Si quelqu’un devait lui offrir un premier baiser, Mélanie accepta sans hésitation que ce fût Mathias.

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Mathias marchait dans la rue, les mains dans les poches.

Plus il marchait, plus les ruelles devenaient sombres. Les alentours se changèrent en un décor de film de zombies : le ciel rougit et les maisons devinrent pourries, anéanties et dévastées. L’ombre lourde et pesante refit apparition avec plus d’intensité.

Mathias regarda furtivement autour de lui, ne sachant ce qui se passait. Il fronça les sourcils et serra les poings, se méfiant de toute attaque, scrutant les alentours et cherchant un moyen de sortir de cette abominable vision.

Une tâche noire se forma au sol, devant lui, puis tourbillonna. La tâche devint étroite et de là sortit Jason et son sourire menaçant, regardant l’Ange de haut. Celui-ci se décontracta, ses mains revinrent dans ses poches et il regarda le démon d’un air méfiant.

Il l’avait presque oublié et reconnut ses pouvoirs de Fantôme qu’il avait hérité de sa mère.

Ce rapace sanguinaire n’allait-il donc jamais le lâcher ?

À peine le voyait-il sortir de ce trou noir qu’il voulût déjà qu’il partît.

Le Messager s’approcha lentement de lui.

– Aaaah, mon bon vieux Mathias ! Dis-moi, quel bon vent t’amène ?

– C’est toi qui es venu, répondit-il froidement en secouant lentement la tête.

– Bon, allez ! Donne-la-moi ! ordonna-t-il en devenant subitement sérieux et en tendant la main, comme s’il attendait un objet.

L’Ange observa sa main un instant et regarda à nouveau son adversaire.

– Quoi ?

Celui-ci le menaça du regard.

– La fille !

Mathias baissa la tête en gardant les yeux sur lui. Ce regard le rendait effrayant – sauf pour Jason, apparemment – et répondit avec insolence :

– Non.

Le Messager, après un petit silence comblé par un regard meurtrier, sourit et tourna autour de celui qui se mettait en travers de son chemin vers Mélanie.

– Tu es bien trop protecteur, Mathias. Mais tu n’as pas le choix : soit tu me la donnes, soit tu meurs, dit-il en haussant les épaules. C’est comme ça, on n’y peut rien !

– Tu parles trop vite.

– Ma fois, tu seras bien obligé de me la donner. J’ai tant perdu, il faut bien compenser ! Et puis… ses vœux de mort doivent être exaucés et je suis chargé de les produire, mon pauvre Mat ! Quoi qu’il en soit, tu ne pourras pas m’en empêcher, je suis trop puissant, pour toi. Moi seul peux changer son destin, puisque les Écrivains sont du même Royaume que moi. Toi, tu t’efforces à respecter le Parchemin que tu as signé, mais bon… (Il reprit en criant, hilare :) on ne peut pas toujours réussir !

Il attrapa un fou rire alors qu’il s’était arrêté derrière Mathias.

Les yeux de ce dernier devinrent rouges et il serra les dents, ainsi que les poings.

D’un mouvement furtif, il se retourna, le prit par la gorge et le souleva en serrant son étreinte, ce qui le coupa de son rire sadique.

– Je ne te laisserai pas lever la main sur elle! Je ne te laisserai pas l’emporter, quitte à y laisser ma vie, t’as compris ?

– Oh, de la résistance…

Jason lui asséna un coup de pied dans le ventre, le libérant de la prise de son ennemi.

En se redressant, Mathias vit le poing du Messager foncer vers sa figure, puis s’écraser vers son nez. Il recula de quelques pas en essayant de se ressaisir rapidement. L’Ange put voir, juste à temps, Jason s’avancer vers lui pour recommencer, mais Mathias put intercepter son coup. Écartant son bras d’une main, il sortit son pommeau et sa lame de l’autre.

Jason, en voyant l’arme, sortit un pommeau tâché de sang et une lame rouillée et dentée – qui faisait facilement penser à une scie.

Les deux rivaux croisèrent le fer dans ce paysage cauchemardesque. Jason esquissait un sourire dément, ne prenant pas le jeune homme au sérieux, tandis que celui-ci mesurait ses coups et tentait de prévoir ceux du Messager.

Réussissant à briser la défense du bourreau, Mathias parvint à le transpercer.

Mais un détail – qui lui avait échappé – lui revint.

Jason, de son titre de Roi des Messagers, était de sang royal. Et les transpercements ne suffisaient pas pour vaincre un monarque des Royaumes.

Il regarda son ennemi avec horreur, tandis que celui-ci, souriant diaboliquement, l’éloigna d’un coup de pied.

À terre, Mathias se releva d’un bond et se défendit à nouveau.

La blessure de Jason saignait, ce que l’Ange remarqua, malgré les vêtements noirs de son rival. Il profita donc de faire perdurer ce combat.

Les coups s’assénaient, Mathias évitait avec facilité – malgré de nombreuses entailles – et parvenait même à transpercer le torse de Jason trois fois.

Les minutes passèrent et l’Ange commençait à s’épuiser dans la douleur de ses blessures et dans ses efforts, tandis que le Messager se sentit faiblir, le sang coulant à flots.

En éloignant son adversaire, Jason profita de peser une main sur ses blessures, essayant de les panser. Ses forces le quittaient et un liquide au goût métallique s’échappait entre ses lèvres. Le démon s’effondra sur un genou, se servant de son sabre comme appuis, et se mit à haleter en crachant du sang.

Remarquant sa faiblesse, Mathias marcha vers lui en le regardant de haut. Il demeurait calme, même s’il sentait son sang bouillir.

Jason leva la tête et le foudroya d’un regard empli de haine, honteux d’avoir laissé ce morveux le mettre hors d’état de nuire.

– Tu ne nous auras jamais, promit Mathias en murmurant.

Le Messager voulut plus que tout de se relever et continuer à se battre, mais sa faiblesse l’en empêchait. Il ne put que se résigner à abandonner.

Lentement, le corps du démon disparaissait en fumée. Dans un dernier regard haineux, Jason murmura :

– Je n’en ai pas fini avec vous… je reviendrai.

Et il disparut.

Le paysage redevint comme avant et les yeux de Mathias se colorèrent en gris. Il haletait, à bout de souffle, prêt à se jeter sur lui et lui régler son compte s’il avait le courage de refaire surface, mais il se calma.

L’Ange libéra de ses blessures de la fumée bleue qui les fit disparaître.

Il regarda le ciel et se dit que cela l’apaiserait de prendre le métro le plus proche pour aller rendre visite à une chère amie.

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Mathias restait encore sur le toit. Il était assez tard dans la soirée, mais il voulait demeurer là. Il était tellement bien installé.

Il passa plusieurs minutes assis, après la visite de Serena, en se posant une question qu’il ne s’était jamais posée :

« Si je retrouve l’assassin de père et maman, comment le tuerai-je ? » pensa-t-il.

Cette question trotta dans son esprit. Il finit par s’allonger sur le toit en pente, les mains sous la tête. Comment exterminer le tueur de ses parents ? Lentement, pour le faire souffrir comme il eut souffert, ou en finir avec lui tout de suite ? C’était un choix difficile.

Il finit par grimacer et secouer la tête pour chasser ces ignobles pensées de son esprit. Les songes meurtriers n’eurent jamais été de ses habitudes.

Il s’assit et regarda Notre-Dame. Elle sembla si proche, mais si loin en même temps. Mais comme durant la journée il avait habituellement beaucoup de choses à faire – en surveillant Mélanie –, il ne pouvait s’y ressourcer là-bas que le soir. Il haussa les épaules et se leva, trouvant cette cathédrale si belle. Il n’eut pas pu résister.

– J’ai envie d’y faire un tour…

Il bondit du toit et atterrit avec un genou à terre et se releva lentement. Il regarda l’entrée de la luxueuse villa de Kevin en pensant qu’ils ne le chercheraient certainement pas. Il se retourna et marcha tranquillement, les mains dans les poches.

Le vent soufflait très fort, jusqu’à même gonfler la capuche de Mathias comme la voile d’un bateau, faisant légèrement briller l’intérieur. D’un geste brusque, il la serrait autour de son visage jusqu’à ce que les courants ne se calmassent. Marchant d’un calme rythme, il s’approchait de plus en plus de la cathédrale.

Avant d’y entrer, il leva la tête vers le ciel et la regarda, si fière, si belle et majestueuse. Les sculptures étaient un délice pour les yeux. Comment est-ce que les humains avaient-ils pu, un jour ou une nuit, imaginer à bâtir un tel édifice ?

Il y entra par la porte à double battants du centre. Le hall offrit un sol de marbre en damier et un impressionnant espace. Les chaises de bois liées étaient vides.

Toutes ?

Mathias le pensait, jusqu’à ce qu’il vît une personne assise au loin. Il s’approcha de ce banc et s’y assit, refusant de laisser une personne seule dans cet endroit vide.

À sa grande surprise, cette personne était un jeune adolescent qui semblait tout juste sortir de son enfance. L’Ange regarda ce petit homme concentré sur cette sculpture catholique. Il était pourtant habillé de manière inhabituelle. Il portait des bottes dans lesquelles entraient ses pantalons bruns. Son manteau noir semblait usé et son large t-shirt blanc enfoui dans ses pantalons avait des traces noires grises. Ses cheveux étaient noirs et un peu longs, touffus sur sa tête, et son teint mâte prouvait qu’il passait beaucoup de moments au soleil. Entre ses mains était une boule à neige avec, à l’intérieur, la tour Eiffel, l’Arc de triomphe et Notre-Dame.

Le jeune homme pensa que le fait de trouver un gamin si tard le soir était assez étrange. Ne sachant comment l’aborder, il décida de garder le silence et détourna son regard sur la sculpture de marbre. Le silence les faisait se taire pendant de longues et nombreuses minutes.

– Je sais que je n’ai rien à faire là.

L’Ange tourna la tête et le petit garçon le regardait de ses grands yeux en forme d’amandes bleues.

– J’ai fugué de chez moi, dit l’enfant. Je préfère voyager et avoir les pieds au sol.

– Les pieds au sol ?

Le petit garçon hocha la tête.

– Est-ce qu’il y a des gens dehors ? reprit-il.

– Euh… non, pourquoi ?

– J’ai pas envie qu’on me voit.

Mathias ne semblait pas comprendre qui était cet adolescent, ni d’où il venait. Il trouva même ses propos bizarres.

Trop bizarres pour sortir de la bouche d’un humain.

– Tu sais, dit-il, tu devrais retourner chez toi. Tes parents devraient être inquiets.

– C’est pas grave. Je m’en fiche.

– Ne dis pas ça ! rétorqua Mathias. J’ai perdu mes parents quand j’étais enfant et je t’assure que c’est la pire des choses qui me soient arrivées.

– J’ai trouvé des gens mieux que mes parents. Ils prennent soin de moi, ils m’emmènent en voyage et m’apprennent des tas de choses ! Ça fait depuis deux semaines que je suis à Paris. J’ai toujours rêvé de marcher dans ses rues, ajouta l’enfant en regardant sa boule à neige.

– Parce que tu viens d’où ?

Le cadet tendit l’oreille en levant le doigt, obligeant l’Ange à garder le silence et de rester attentif. Il sortit ensuite d’une poche de son manteau une montre à gousset et hocha la tête, ayant deviné l’heure. Les cloches se mirent à chanter de leur plus belle et haute voix.

– Minuit. C’est l’heure… mes amis viendront me chercher.

– Qui sont tes amis ?

– Des matelots, m’sieur l’Ange !

Mathias le dévisagea, bouleversé et abasourdi, sans savoir comment ce gamin avait réussi à deviner qui il était. Le cadet rangea sa boule à neige et sa montre dans ses poches.

Le jeune homme le laissa passer et le gamin marcha rapidement jusqu’à la sortie en mettant un tricorne qui était à côté de lui, hors de la vue de l’Ange, et en sortant une longue-vue dorée de l’autre poche de son manteau. Mathias le suivit, interloqué par ce personnage

En sortant, le petit garçon s’éloigna sur la place de Notre-Dame et leva la tête. Mathias fit de même et ouvrit de grands yeux. Un gigantesque et imposant navire brun foncé aux mats blancs était à quelques mètres au-dessus de la cathédrale. Une corde fut jetée et le petit garçon fit un nœud pour y mettre son pied. Pendant qu’il s’élevait, Mathias courut pour être en-dessous de lui.

– Quel est ton nom ? demanda-t-il en criant avec ses mains autour de la bouche.

– Capitaine Jeremiah du Royaume du Ciel, pour vous servir, m’sieur ! cria le garçon de bon cœur avec sa main libre à côté de la bouche. Pour Jacob et Élicia ! lança-t-il en levant le poing.

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Pendant ce temps-là, Serena cuisinait sous les yeux de son invitée.

– Hmmm… ça sent bon ! remarqua Tamara.

– Oui, mes nouilles sont bien faites ! J’accompagnerai les sushis avec ça !

– Tu y ajouteras quoi ?

– Des crevettes !

La Fée de l’hiver eut l’eau à la bouche, elle se réjouissait d’y goûter, même si les plats chauds n’étaient pas ses préférés.

Elle savait que Serena ne perdrait jamais le titre de « cordon bleu » qu’elle lui avait attribué, quelques années plus tôt.

– Tu y ajouteras de la sauce soja, pour assaisonner ?

– Pfff ! Ou pour les gâcher ! Bah tiens, au lieu de dire des sottises, tu peux m’aider à mettre la table, s’il te plaît ? demanda-t-elle d’un sourire taquin.

Tamara roula des yeux et prit les couverts dans un des tiroirs.

– Merci ma chérie ! dit Serena, toujours taquine.

– Oui, oui, c’est cela…

Elle sortit du salon et vit Mathias et Mélanie en train de continuer leur lecture. Elle sourit, attendrie, puis se souvint d’un détail qui lui enleva le sourire.

Ils ressemblaient à un couple.

Elle posait les couverts en jetant des coups d’œil sur eux et ses pensées se confirmaient à chaque fois.

Pensive et confuse, elle rentra dans la cuisine, en silence.

En prenant les assiettes dans un placard, elle se tourna vers Serena.

– Dis-moi…, murmura-t-elle. Mélanie, c’est la protégée de Mathias, non ?

– Oh, bravo, très chère ! répondit-elle avec ironie, gardant les yeux sur son occupation.

Malgré l’attitude plaisantin de son amie, elle ne perdait pas son sentiment de doute et d’incompréhension.

– Mais… ils ne sont pas ensemble, au moins !

Serena s’immobilisa pendant quelques secondes, réfléchissant brièvement à la situation, avant de continuer en répondant sans la regarder.

– Y a des risques…, dit-elle avec crainte en haussant les épaules.

– Mais…

Tamara ouvrit soudainement de grands yeux, son souffle s’arrêta et ses mains moites lâchèrent les assiettes par terre.

Elle demeura figée, comme une statue de glace, ayant réalisé l’ampleur des risques de la potentielle relation entre Mathias et Mélanie.

Serena lui cria dessus :

– Mes assiettes !

– Oui, excuses-moi. Je vais ramasser tout ça, répondit-elle, navrée et confuse.

Elle prit subitement une brosse et une ramassoire dans une commode de la cuisine de manière perturbée.

– Mais qu’est-ce qui t’a pris, enfin ?

– C’est que… Mélanie est une humaine !

Le visage de Serena passa de la colère à la désolation.

– Oui, je le sais…

– Mais alors, ne comprends-tu donc pas ?… Mathias n’a pas le droit de…

Elle ne put finir sa phrase qu’elle sentit une présence étrangère à côté d’elle.

En levant la tête, elle vit Mélanie, debout, à l’entrée de la cuisine.

– Il se passe quoi ? demanda-t-elle innocemment.

– Oh, rien, trésor ! dit Serena d’un ton plaisantin. Ce n’est qu’un accident !

Elle hocha simplement la tête en haussant les épaules et se retourna, s’apprêtant à partir.

Les deux Fées prirent une discrète inspiration, rassurées que Mélanie ne voulut guère en savoir plus.

Mais avant qu’elle ne quittât la pièce, quelque chose attira sa curiosité.

Elle se retourna donc vers les femmes qui reprenaient leur tâche.

Puisque les pas de Mélanie ne se firent plus entendre, elles tournèrent à nouveau le regard vers elle. Elle était encore là, droite, avec une expression d’incompréhension sur le visage, tandis qu’elle put clairement lire la panique sur ceux des deux Fées.

Elle les observait tour à tour, ayant entendu la dernière phrase de Tamara.

– Mathias n’a pas le droit de quoi ?

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Pendant les cours de maths, Mathias persistait dans ses pensées. Elle sortit donc un bloc-notes à feuilles lignées. Là-dedans se trouvaient quelques-uns de ses paysages ou personnages sortant de son imaginaire.

Elle tourna les pages rapidement, connaissant ses dessins par cœur, et se mit à faire le portrait de Mathias, espérant que ça l’aiderait à le sortir de sa tête. Elle mit en valeur son visage empli de mystères.

Elle prit quelques minutes pour réaliser ce portrait et signa « Mél D. ». Cette reproduction ressembla tellement à son modèle original qu’on aurait dit qu’elle avait décalqué sur une photo en y ajoutant des ombres.

Elle contempla son nouveau chef-d’œuvre, incertaine, étant persuadée que les parents de Mathias étaient des artistes, certes, cependant ce si beau minois cachait peut-être un diable.

Après quelques secondes de songes flous, Mélanie remarqua – en retenant sa respiration – qu’elle avait dessiné des cornes sortant du front du portait de Mathias.

Effrayée par son propre dessin, Mélanie ferma subitement son calepin, l’éloigna d’elle et se força à se remettre au travail, chassant ce gribouillage de ses pensées.

Les heures passaient, la jeune fille écoutait, notait, travaillait, rendait et corrigeait. Le temps passait vite, au soulagement de la plupart de ses camarades, mais à l’angoisse de celle-ci.

La sonnerie retentit et elle s’obligea à sortir. Elle mit son manteau, son écharpe, ses gants et son bonnet et sortit en alignant des pas de damnée.

Elle vit, au milieu de la cour, une ombre à la tête couverte par sa capuche et les mains enfouies dans les poches de son pull. Elle l’observa, se demandant s’il n’avait pas froid, pendant qu’il lui souriait d’un air accueillant.

Pendant qu’ils marchaient, elle racontait sa journée en bref, en affirmant que rien de spécial ne s’était passé. Ils marchaient sur les trottoirs sur lesquels la neige était ratissée.

La marche était longue, régulière et animée par un silence diabolique, lourd au point d’effondrer une montagne.

Mélanie portait sur Mathias – qui ne semblait rien remarquer – des regards curieux et suspicieux. Celui-ci alignait de longs et légers pas. Il avait l’air ailleurs, pensif ou rêveur.

Mais que voulait-il d’elle ? Pourquoi lui avoir sauvé la vie, pourquoi l’avoir éloignée de sa vie cauchemardesque ? Comment savait-il tout cela sur elle ? Un homme aussi mystérieux à l’extérieur qu’à l’intérieur l’interloquait au plus haut point.

Toutefois il l’avait aidée. Il avait pris soin d’elle et avait l’air aussi innocent qu’un agneau. Ce jeune homme de vingt ans solitaire et discret éveilla en elle de nombreux soupçons. Il était comme un grimoire vieux de plusieurs siècles aux écritures usées et illisibles qu’elle se sentait obligée de déchiffrer pour pouvoir le comprendre.

Elle sentit qu’elle ne tarderait guère à lui poser quelques questions.

Le Soleil se coucha et Mélanie pressa le pas pour arriver chez le garçon le plus vite que possible. Ils arrivèrent rapidement chez lui et elle sembla impatiente dans l’ascenseur.

Arrivés au quinzième étage, elle attendit sur le propriétaire qui déverrouilla calmement la porte. À peine entrée, elle se tourna vers lui.

– Mathias ?

Il ferma la porte et la verrouilla, avant de lui faire face, attentif et impassible.

– Suis-moi, s’il te plaît.

Elle se dirigea vers la chambre.

Le jeune homme pencha la tête sur le côté et fronça les sourcils, curieux par ce comportement subitement méfiant. Il soupira, finissant par comprendre qu’elle avait des doutes à son sujet.

Il la suivit donc, décontracté, mais au fond, il se mit dans la peau d’un personnage commun. Le personnage le moins effrayant ou douteux que possible.

Une fois dans la chambre, Mélanie se retourna et le défia du regard.

L’impassibilité de cet homme l’effraya. Elle sentit son cœur battre et sa respiration se limiter, alors que des sueurs froides lui parcouraient le dos. Une lourde boule de salive glissa péniblement le long de sa gorge.

Mélanie prit une grande inspiration, avant de mettre les choses au clair :

– Qui es-tu, Mathias ? Et cette fois, ne me rends pas inconsciente.

Celui-ci sourit avec amusement et écarta légèrement les bras.

– Regarde autour de toi. Je pense que l’abri d’un individu le définit.

Elle crut qu’elle allait craquer sous la pression irrespirable de l’angoisse.

– Ce n’est pas une réponse valable ! Comment sais-tu tout de moi ? demanda-t-elle en paniquant et en montant toujours plus la voix. Pourquoi m’as-tu sauvée, moi ? Et pourquoi ne me dis-tu rien ? D’où sors-tu ?!

– Du calme, je t’en prie, soupira-t-il.

– Non, je n’y arrive pas ! s’écria-t-elle.

– Pourquoi ?

Mélanie sentit les larmes lui monter aux yeux. Elle finit par exploser.

– Parce que tu me fais peur !

Le jeune homme ne sut que répondre.

Mélanie soutint son regard contre son gré, sentant les larmes la menacer de couler.

Un silence pesant prit le relais. Ils se regardèrent pendant un long moment dans les yeux, l’un essayant péniblement de comprendre l’autre – en vain.

Mathias laissa ses poumons se dégonfler, détendant ses muscles et décrispant son corps tout entier. Des explications ne pouvaient plus être cachées plus longtemps.

Après un éternel moment d’hésitation, après ces quelques secondes qui semblaient aussi longues que des jours entiers, Mathias voulut élucider les mystères imposés à cette jeune fille.

Cependant, la porte sonna.

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Ses blessures – infectées par la saleté de la pièce – et les griffures sur son dos, son bras et son torse la brûlaient et la consumaient, l’empêchant de trouver la paix pour s’endormir.

Mélanie se leva dans de rudes efforts et avec douleur et alla se préparer un verre d’eau en espérant que cela l’apaiserait.

Elle marcha dans l’obscurité et entendit ses parents discuter. Elle avança le plus silencieusement que possible sur le sol froid, pour ne pas se faire entendre et pour écouter la conversation.

– J’ai été viré, aujourd’hui ! se lamenta Paul.

– Bravo, bien joué ! Et pourquoi ?

– D’après eux, je me bourre trop la gueule ! Mais ça, c’est à cause de Mélanie ! Cette responsabilité de père, ça me fout la pression !

– Ouais, bah ça, c’est sûr !

– J’en peux plus, j’en ai marre… rien à foutre, j’vais la tuer !

Les yeux de Mélanie s’écarquillèrent à l’apogée.

Son corps s’immobilisa.

Sa respiration se coupa.

Son dos se glaça.

– Attends, mais… et les keufs ?

– Quoi, les keufs ? Rien à foutre des keufs !

Mélanie demeura figée et sentit son corps trembler. Elle avait déjà saisi un verre vide et sa respiration coupée accéléra son cœur.

Était-il sérieux ?

– J’vais m’débarrasser d’elle tout d’suite et je jetterai son corps dans la Seine !

Il finit sa phrase en chargeant son pistolet.

… La même arme qui avait tué Sabrina…

Mélanie, pétrifiée, lâcha son verre qui se cassa dans un fracas assourdissant.

– C’est elle, putain ! s’écria le père fou de rage et affolé.

Elle entendit son père se lever d’un bond du lit.

Poussée par la plus grande angoisse de sa vie, Mélanie se mit à courir jusqu’à sa chambre et ferma la porte à clé. Son père, essayant d’ouvrir, massacra la porte en hurlant.

Les larmes coulaient sur le visage de Mélanie. Elle regarda le fin battant trembler sous les poings de celui qui était censé être son père. Ses sanglots ne la secouaient pas, elle ne respirait plus et pleurait en silence.

Il n’y avait qu’une seule issue.

La fenêtre.

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