Les Volontaires, Tome 1 : Sous le feu de l'ennemi

– Alors, toi, ne me parle pas d’Émile Cardinal! répond Henri, offusqué.

Son cousin le dévisage, intrigué.

– Je ne sais pas à quoi il s’attendait, en me recrutant, mais tu ignorais sans doute qu’il espérait faire de moi une espèce de porte-documents patenté au service des espions nazis.

Les yeux de Laurent s’agrandissent. Sa mine est si surprise que Tim a envie de pouffer de rire. Ses épaules tressautent et, n’en pouvant plus, il s’extirpe de la chambre pour éclater d’un rire qui retentit sur tout l’étage. Laurent ferme la porte.

– Est-il toujours comme cela, notre nouveau flight officer?

– Il prend tout à la légère. Ne détourne pas la conversation, veux-tu? Émile a voulu m’utiliser. J’ai même fait les frais d’une enquête de la RCMP à Summerside. Pourquoi aurait-il tout fait pour que j’aboutisse le plus rapidement possible en Angleterre?

– Émile a quelques ennemis dans l’Aviation royale canadienne. Il déteste la routine, et certains trouvent qu’il remue trop les habitudes des officiers en place. D’ailleurs, son avancement a tardé tant qu’il a été à Summerside et il s’est opposé à son supérieur d’alors, le major Swanson. Mais un espion, ça, je ne peux le croire. En attendant, prépare-toi pour quelques semaines d’entraînement. Ensuite, tu ne pourras plus reculer : tu auras ton avion bien à toi. Ah, oui… Ne t’avise surtout pas de jouer au cowboy avec les avions de Sa Majesté. J’ai eu assez de difficulté comme cela à faire croire que tu n’y étais pour rien dans ton accident avec le Mustang P-51.

Laurent a glissé dans cette dernière phrase entre un clin d’œil et le retour de Timothée, écarlate, dont les épaules tressautent encore en raison d’un rire qu’il ne réussit pas à calmer.

– Ton cousin a raison : tu es un véritable cowboy dans l’air. Je ne voudrais pas que tu emmènes ma grand-mère en balade, mais tu as le ciel dans le sang et on aura toutes les occasions de le montrer aux Allemands une fois qu’on aura intégré la 412e escadrille.