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J'ai pu vivre dans la servitude mais j'ai toujours été libre.
Afficher en entierC'est un malheur de n'être point aimée ; mais c'est un affront de ne l'être plus.
Afficher en entierQuand on cherche si fort les moyens de se faire craindre, lui dit-elle, on trouve toujours auparavant ceux de se faire haïr.
Afficher en entierLettre CXLIV
Rica à Usbek
Je trouvai, il y a quelques jours, dans une maison de campagne où j'étais allé, deux savants qui ont ici une grande célébrité. Leur caractère me parut admirable.Le conversation du premier, bien appréciée, se réduisait à ceci: "Ce que j'ai dis est vrai, parce que je l'ai dit." La conversation du second portait sur autre chose: "Ce que je n'ai pas dit n'est pas vrai, parce que je ne l'ai pas dit."
J'aimais assez le premier: car qu'un homme soit opiniâtre, cela ne me fait absolument rien; mais qu'il soit impertinent, cela me fait beaucoup. Le premier défend ses opinions; c'est son bien. Le second attaque les opinions des autres, et c'est le bien de tout le monde.
Oh ! Mon cher Usbek, que la vanité sert mal ceux qui en ont une dose plus forte que celle qui est nécessaire pour la conservation de la nature ! Ces gens-là veulent être admirés à force de déplaire. Ils cherchent à être supérieurs, et ils ne sont pas seulement égaux.
Hommes modestes, venez que je vous embrasse: vous faites la douceur et le charme de la vie. Vous croyez que vous n'avez rien, et, moi, je vous dis que vous avez tout. Vous pensez que vous n'humiliez personne, et vous humiliez tout le monde. Et, quand je vous compare dans mon idée avec ces hommes absolus que je vois partout, je les précipite de leur tribunal, et je les mets à vos pieds.
De Paris, le 22 de la lune de Chahban, 1720.
Afficher en entierLettre CXXVI
Rica à Usbek, à ***
Je t'attends ici demain; cependant je t'envoie tes lettres d'Ispahan. Les miennes portent que l'ambassadeur du Grand Mogol a reçu ordre de sortir du royaume. On ajoute qu'on a fait arrêter le prince, oncle du roi, qui est chargé de son éducation; qu'on a fait conduire dans un château, où il est très étroitement gardé, et qu'on l'a privé de tous ses honneurs. Je suis touché du sort de ce prince, et je le plains.
Je te l'avoue, Usbek, je n'ai jamais vu couler les larmes de personne sans en être attendri: je sens de l'humanité pour les malheureux, comme s'il n'y avait qu'eux qui fussent hommes, et les grands mêmes, pour lesquels je trouve dans mon coeur la dureté quand ils sont élevés, je les aime sitôt qu'ils tombent.
En effet, qu'ont-ils à faire, dans la prospérité, d'une inutile tendresse ? Elle approche trop de l'égalité; ils aiment bien mieux du respect, qui ne demande point de retour. Mais sitôt qu'ils sont d"chus de leur grandeur, il n'y a que nos plaintes qui puissent leur en rappeler l'idée.
Je trouve quelque chose de bien naïf et même de bien grand dans les paroles d'un prince qui, près de tomber entre les mains de ses ennemis, voyant ses courtisans autour de lui qui pleuraient: "Je sens, leur dit-il, à vos larmes, que je suis encore votre roi."
De Paris, le 3 de la lune de Chalval, 1718.
Afficher en entierLorsque j'arrivai, je fus regardé comme si j'avais été envoyé du Ciel : vieillards, hommes, femmes, enfants, tous voulaient me voir. Si je sortais, tout le monde se mettait aux fenêtres; si j'étais aux Tuileries, je voyais aussitôt un cercle se former autour de moi : les femmes même faisaient un arc-en-ciel, nuancé de mille couleurs, qui m'entourait; si j'étais aux spectacles, je trouvais d'abord cent lorgnettes dressées contre ma figure : enfin jamais homme n'a été autant vu que moi. Je souriais quelquefois d'entendre des gens qui n'étaient presque jamais sortis de leur chambre, qui disaient entre eux : "Il faut avouer qu'il a l'air bien persan." Chose admirable ! je trouvais de mes portrais partout ; je me voyais multiplié dans toutes les boutiques, sur toutes les cheminées : tant on craignait de ne m'avoir pas assez vu.
Tant d'honneurs ne laissent pas d'être à charge : je ne me croyais pas un homme si curieux et si rare ; et, quoique j'aie de très bonne opinion sur moi, je ne me serais jamais imaginé que je dusse troubler le repos d'une grande ville où je n'étais point connu. Cela me fit résoudre à quitter l'habit persan et à en dosser un à l'européenne, pour voir s'il restait encore dans ma physionomie quelque chose d'admirable. Cet essai me fit connaître ce que je valais réellement : libre de tout les ornements étrangers, je me vis apprécié au plus juste.
Afficher en entierElle était bien vive ; car on se disait cordialement, de part et d’autre, des injures si grossières, on faisait des plaisanteries si amères, que je n’admirais pas moins la manière de disputer, que le sujet de la dispute
Afficher en entierLes femmes de Perse sont plus belles que celles de France ; mais celles de France sont plus jolies. Il est difficileb de ne point aimer les premières, et de ne se point plaire avec les secondes : les unes sont plus tendres et plus modestes, les autres sont plus gaies et plus enjouées.
Afficher en entierIl y a sept ou huit mois que j’étais dans la loge où vous me vîtes hier : comme je m’habillais en prêtresse de Diane, un jeune abbé vint m’y trouver ; et, sans respect pour mon habit blanc, mon voile et mon bandeau, il me ravit mon innocence. [...] Avec cette délicatesse, vous jugez bien que ce jeune abbé n’eût jamais réussi, s’il ne m’avait promis de se marier avec moi : un motif si légitime me fit passer sur les petites formalités ordinaires, et commencer par où j’aurais dû finir.
Afficher en entierQuand vous relevez l’éclat de votre teint par les plus belles couleurs ; quand vous vous parfumez tout le corps des essences les plus précieuses ; quand vous vous parez de vos plus beaux habits ; quand vous cherchez à vous distinguer de vos compagnes par les grâces de la danse, et par la douceur de votre chant ; que vous combattez gracieusement avec elles de charmes, de douceur et d’enjouement, je ne puis pas m’imaginer que vous ayez d’autre objet que celui de me plaire ; et, quand je vous vois rougir modestement, que vos regards cherchent les miens, que vous vous insinuez dans mon cœur par des paroles douces et flatteuses, je ne saurais, Roxane, douter de votre amour.
Mais que puis-je penser des femmes d’Europe ? L’art de composer leur teint, les ornements dont elles se parent, les soins qu’elles prennent de leur personne, le désir continuel de plaire qui les occupe, sont autant de taches faites à leur vertu, et d’outrages à leurs époux.
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