Extraits

« Je sus alors qu’il avait compris, lisant dans mon regard ce que j’avais été à deux doigts de lui avouer. Il ne m’embrassait pourtant toujours pas.

– Je suis vraiment le premier alors ? chuchota-t-il en se penchant encore un peu vers moi.

Mon léger hochement de tête sembla l’embraser tout entier, ses yeux étincelèrent, de ses mains sur ma peau irradiait une chaleur intense, son souffle sur ma bouche me sembla brûlant.

– Je suis amoureux de toi, susurra-t-il en unissant nos lèvres, enfin. »

(Slaine et Voan)

— Sláine, si tu ne cesses pas de penser à lui, je vais finir par être jaloux.

— Tu ne vas pas me proposer le mariage tout de suite plaisantai-je en tournant les yeux vers lui.

Mais il fixait un point au loin. Il sourit pourtant.

— Si tu arrêtais de lire dans ma tête, marmonnai-je.

— À toi de faire en sorte que je ne le puisse pas, me coupa-t-il.

— Et comment fait-on cela ? demandai-je, très intéressée par cette possibilité.

— Je vais me faire un plaisir de te l’apprendre, m’annonça-t-il en baissant sur moi un regard pétillant de malice.

— On ne va pas faire ça ici quand même ? m’exclamai-je.

— Mais si.

— Mais non, opposai-je en réalisant le chemin moins réjouissant que prenait ma soirée en sa compagnie.

— Tu dois te concentrer pour ressentir mon intrusion, m’informa-t-il sans tenir compte de mon objection. Regarde-moi.

J’obéis immédiatement, plongeant mes yeux dans les siens avec plaisir. À nouveau, je souris. C’était plus fort que moi.

— Concentre-toi Sláine, me réprimanda Voan dans un murmure grave et sensuel qui me fit frissonner.

— Désolée, mais tes yeux…

— Essaye tout de même, me gourmanda-t-il encore.

— Voan ? chuchotai-je en rapprochant mon visage du sien.

— Quoi ?

— Embrasse-moi, m’entendis-je lui demander.

— Non, répondit-il tout bas, se penchant malgré tout sur moi.

Ses lèvres étaient si près des miennes qu’elles les touchaient presque.

J’avais chaud et mon coeur battait vite.

— Pourquoi ? me plaignis-je.

— Parce que si je le fais je ne me contenterai pas d’un baiser, m’informa-t-il alors que sa bouche effleurait la mienne.

— Et?

— Je doute que tu apprécies te donner en spectacle devant tout le monde.

pour la premiere fois de ma vie, j'etais accomplieet heureuse encore que ses mot soit trop faible pour exprimer exactement se que j'epprouvais

— Le personnel ne fait pas partie des prestations que nous fournissons à nos clients, annonça-t-il à Adam en le regardant dans les yeux lorsque celui-ci se retourna.

— Je l’ai bien compris, répondit Adam très poliment en soutenant le regard du démon. C’est pourquoi j’attends que Sláine ait terminé son service.

— Je le savais. Je savais que je devais éviter les démons, maugréai-je pour moi-même.

Je scrutai son visage pour essayer de déterminer si je n’étais pas victime d’une très mauvaise plaisanterie. Mais Sio avait l’air extrêmement sérieux.

— Mais qui est-ce ? Vous la… heu… connaissez ?

Il éluda mes questions.

— Écoute moi bien, commençai-je en lui adressant mon regard le plus froid, veux-tu que je te dénonce, que je raconte comment tu obliges ton comptable à trafiquer tes bilans en plus du harcèlement sexuel auquel tu te livres sur tes employés ?

Son visage vira au cramoisi.

— Si tu fais ça je te…

— Tu quoi ? prononça une voix singulièrement grave derrière moi, me faisant simultanément sursauter et me retourner.

Mes yeux rencontrèrent une surface en coton, noire, qui avait l’air aussi dure que du béton armé. Un parfum légèrement poivré chatouilla mes narines. Puis mes yeux remontèrent, remontèrent encore, jusqu’à m’obliger à pencher la tête en arrière pour croiser un regard, noir aussi, baissé sur moi.

Alors, une idée, terrible, affreuse, me vint à l'esprit pour clore la discussion définitivement et rendre tout dialogue impossible entre lui et moi à l'avenir.

- Je suis terrifié.

Je sentis mes yeux s'ouvrir comme des soucoupes.

- Terrifié ? répétai-je, abasourdie. Mais par quoi ?

- Par toi.

- Ben c'est la meilleure celle-là ! m'exclamai-je, incrédule.

- J'ai peur que tu m’envoie au diable avant que j'aie eu le temps de te parler et que tu me détestes.

- Qui t'a dit que je te détestais ?

- Personne, mais ce serait logique.

- On se fout de la logique. Je suis une femme, je n'y suis donc pas soumise. Parle

- Sio, je... j'ai peur que tu sois terriblement déçu au final.

- Déçu ? s'étonna-t-il. Mais par quoi ?

- Moi.

- La seule chose qui pourrait me décevoir serait que tu sois différente. Je ne te demande rien d'autre que d'être toi.

Trois catégories de démons fréquentaient notre dimension: les vovims, majoritairement masculins, les Ananaels - principalement féminins - et les Oxiyalas où mâles et femelles étaient également représentés. Vive la parité! Chaque caste était identifiable grâce à la marque que ses représentants portaient sur le cou, comme un tatouage, juste sous l'oreille. Les Vovims arboraient une étoile noire à huit branches, les Ananaels, un symbole ressemblant à trois triangles entrelacés- un peu comme lesymbole du dieu Odin, mais avec la pointe orientée vers le bas - et les Oxiyalas un pentagramme noir, vert, rouge ou bleu. Je n'avais strictement aucune idée de la signification du nom de leur catégorie et ne tenait pas plus que ça à le savoir. Surtout en ce qui concernait les Vovims, qui, s'ils étaient particulièrement séduisants, à mon goût en tout cas, véhiculaient une aura de puissance, de danger et de violence beaucoup plus prononcée que les autres. A moins que cela ne vienne de leur tenue, j'allais dire: réglementaire, consistant en un pantalon en cuir et t-shirt, noirs, sur lesquels ils portaient généralement un long manteau en cuir également. Ou de leur attitude impassible, voire dure, comme si rien ne pouvait les atteindre. C'est à eux qu'était échue la mission de patrouille dans nos rues et les Vovims étaient d'ailleurs aussi très représentés dans les lieux de débauche.

J’avais lu un article, l’interview de quatre femmes passées entre les mains de deux d’entre eux et ne tarissant pas d’éloges sur leurs qualités d’amants. Elles se vantaient d’avoir enfin découvert ce qu’était le plaisir, grâce à eux, ainsi que d’avoir testés des pratiques extrêmes – pour elles – et eu connaissance de nouvelles perversions dont elles n’avaient pas le droit de parler. Il était clair qu’elles étaient devenues complètement droguées au sexe. Ou aux démons. S’en suivait une liste non exhaustive de ce à quoi les deux énergumènes s’étaient livrés sur et avec elles. Je me promis de tout faire pour éviter de rencontrer ces deux spécimens que je soupçonnais presque d’être impuissants lors de rapports classiques, ou à tout le moins sans fouet, corde, menottes, etc.

Pour ma part, quand il m’arrivait malgré tout de croiser un démon dans la rue, je changeais de trottoir et n’avais jamais mis les pieds dans un « 156 », surnom des établissements où ils se sentaient presque comme chez eux. La rumeur courait que ce nombre était en rapport avec une entité qui, lorsque vous aviez affaire à elle, vous démontrait que nier sa nature animale, la bête qui réside en chacun de nous, était une erreur fatale bloquant toute possibilité d’évolution individuelle. Nul doute ne subsistait dans mon esprit : ceux qui fréquentaient ces clubs ne niaient plus rien du tout…