Extraits

Salomé usa à foison de mots, de larmes et de l'affection d'Alma.

Après une nuit sans rêve, elle se sentait presque mieux. Presque, car la gêne entre ses jambes se chargeait de lui rappeler constamment ce qu'elle avait subi la veille et réveillait la saleté.

Sans vouloir ôter ne serait-ce qu'une miette de portée à l'abjecte agression dont elle avait été victime - un terme qu'elle exécrait par-dessus tout parce qu'il s'attachait souvent aux femmes et aux enfants, parce qu'il collait aussi bien trop fréquemment à la peau de filles comme elle - sa carrière l'avait un peu endurcie intellectuellement vis-à-vis du sexe non consenti. Alors oui, elle souffrait, oui, elle ressentait le besoin de passer le reste de sa vie dans un bain pour se récurer, au savon noir s'il le fallait, et effacer la souillure. Mais elle était possiblement un tout petit peu moins démunie qu'une proie innocente confrontée à la domination physique d'un homme, qu'elle soit brutale ou pas. Elle avait cela en commun avec les autres prostituées et certaines épouses.

Mais par dessus tout, contrairement à ce que Maximilien avait dû espérer, il venait de lui donner la force de lutter contre lui au lieu de l'anéantir. Peut-être était-ce de la haine. Sans doute, en était-ce. Elle s'en fichait, car elle se sentait animée d'une vigueur nouvelle, intimement liée à ce refus viscéral de laisser une fois encore, une fois de plus, un homme la piétiner au prétexte qu'elle était femme et qu'il le pouvait, qu'il en avait le droit, qu'elle était ancienne prostituée, belle ou attirante, ou seulement parce que c'était sa fantaisie du moment.