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N'oubliez pas que, si longue que vous apparaisse votre existence, votre mort, elle, est éternelle.
Afficher en entier« […] la question que je ne cesse de me poser est celle-ci : qu’est-ce qui différencie un souvenir unique d’un rêve ?
Je ne puis trancher, puisque certains rêves, par leur cohérence, leur relief, leur logique interne et la richesse de leurs détails, donnent une impression de réalité qui, même au réveil, ne se dissipe pas tout à fait. Inversement, n’a-t-on pas le sentiment, dans certains moments amers de solitude et d’échec, que les souvenirs qui vous assaillent -- par exemple, un « grand amour » que vous avez cru, pendant quelques mois ou quelques années, partagé — ont été d’avantage rêves que vécus ? »
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Afficher en entier« Je sais pourtant à quoi m’en tenir sur la beauté des hôtesses : simple bonbon visuel que les compagnies vous donnent à sucer pour tromper l’angoisse du décollage. »
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Afficher en entierMesdames, messieurs, je vous souhaite la bienvenue à bord. Nous volons à une altitude de 11 000 mètres. Notre vitesse de croisière est de 950 km/heure. La température extérieure est de moins 50 degrés Celsius. Merci. Elle répète l’annonce dans son anglais gazouillant, et repliant le papier, elle le remet dans sa poche
Afficher en entierL’hôtesse doit être moins vulnérable que je ne suis, car ni les yeux ni les signes impérieux de Mme Murzec – c’est le nom de ma Gorgone – ne l’atteignent. Et Mme Murzec, de guerre lasse, dit en français d’une voix haute et coupante
Afficher en entierSi discret que soit mon geste, il n’échappe pas à ma voisine de gauche, et elle me décoche un regard chargé d’un mépris si écrasant que je retire aussitôt mon doigt et fourre ma main coupable dans ma poche. De toute évidence, il n’y a pas que des avantages à être assis en rond
Afficher en entierÀ sa droite, une femme blonde, chatoyante, moulée dans une superbe robe verte à ramages noirs, et dont les bijoux ne sont pas très discrets ; à côté, une jeune fille seule ; puis, à sa suite, un bel Italien ; un délicieux homosexuel de nationalité allemande ; deux dames très distinguées qui voyagent ensemble, deux veuves, je suppose, l’une américaine, l’autre française, et celle-ci peu farouche, malgré sa distinction. Car elle ne détourne pas les yeux sous l’impact des miens. Elle accueille, au contraire, mon regard, comme si l’idée ne lui déplaisait pas d’être quelque peu violée, au coin d’une jungle, par un singe velu
Afficher en entierMais après tout ce que mes copassagers ont pensé de moi et que j’ai parfaitement entendu, je ne vais quand même pas me gêner. Je les regarde l’un après l’autre tout à mon aise et, puisqu’ils sont disposés en cercle, de gauche à droite. L’hôtesse occupe le fauteuil le plus proche de l’exit. Elle a enlevé son petit calot, lissé ses cheveux d’or d’un geste gracieux, tout en jetant sur les passagers dont elle a la charge des regards qui ne sont nullement blasés
Afficher en entierJe ne sais si on se rend compte combien c’est une chose affreuse que d’être laid. De la minute où je me lève et me rase devant ma glace à la minute où je me couche et me lave les dents, je n’oublie pas une seconde que tout le bas de mon visage, à partir du nez, me donne une ressemblance fâcheuse avec un singe. Si je l’oubliais, d’ailleurs, les regards de mes contemporains se chargeraient à chaque instant de me le rappeler. Oh, ce n’est même pas la peine qu’ils ouvrent la bouche ! Où que je sois, dès que j’entre dans une pièce, il suffit que les gens tournent les yeux vers moi : j’entends aussitôt ce qu’ils pensent
Afficher en entierDès que l’hôtesse a tourné les talons et que je ne suis plus sous l’influence de son regard, je m’avise qu’elle ne m’a pas donné de reçu. Je la rappelle. En termes polis je l’exige. Elle obtempère. — Voilà, Mr. Sergius, dit-elle avec un petit sourire indulgent. Et, dès que j’ai le papier en main, elle me donne un coup léger du dos de la main sur la joue, moitié tape, moitié caresse. Familiarité qui, loin de m’humilier, me plaît. Peut-être en raison de cette scène, peut-être parce qu’ils sont étonnés par mon physique, les autres passagers me dévisagent.
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