Extraits

On frappa à la porte. Fie se dépêcha de se jeter nonchalamment dans le fauteuil le plus proche et Jasimir attrapa un éventail qu'il agita au-dessus d'elle, les traits impassibles.

- Qu'est-ce que tu fais ? lui demanda-t-il perplexe.

- Je joue à la dame, marmonna-t-elle.

- On dirait que tu es en train de mourir dans une tragédie.

- Silence, Moineau, siffla-t-elle en riant.

Fie avait souvent pensé à ce qu'elle dirait la prochaine fois qu'elle verrait Taverin sza Markhan. Elle aimait croire que ce serait lapidaire et bien pensé, pour qu'il comprenne qu'il lui avait manqué, mais pas trop. Une partie d'elle-même, faible, traîtresse, aimait aussi penser qu'il lui dirait quelque chose de poétique et d'intelligent, une sorte de grande déclaration entrelaçant leurs âmes, leurs coeurs et leurs destins. Fie avait plusieurs fois essayé de se convaincre que ça ne lui plaisait pas du tout. Enfin... sauf si c'était lui qui le disait en premier.

Oubliée cependant la phrase pleine de malice ou de sous entendus. Fie ne put rien faire d'autre que fixer les mains enflammées de Tavin et de dire, d'une voix rocailleuse :

- J'avais oublié que tu pouvais faire ça.

Fie secoua la tête tandis qu'un nouveau sanglot montait dans sa gorge.

_C'est moi, la cheffe. C'est moi qui suis censée prendre soin de vous.

_Tu crois vraiment que c'est comme ça que ça marche ? s'indigna Bawd en déchirant un morceau de galette. On s'occupe des nôtres. Que tu deviennes notre cheffe n'y a rien changé. Tu es la cheffe la plus intelligente, la plus redoutable sur la route, et on te suivrait jusqu'aux mille enfers si tu nous le demandais, mais si tu tombes, on te porte. Si tu es malade, on te porte. Si tu en as besoin, on te porte et je te jure sur la tête de Varlet que, si tu ne prends pas soin de toi, on te forcera à le faire.

Fie ne regarda pas derrière elle.

Elle connaissait le chemin de sa maison.

Du haut de Dumosa, elle voyait des colonnes de fumée s'élever à l'horizon. Ce serait une année difficile, pleine de cendres, pleine d'espoir.

Spoiler(cliquez pour révéler)Il était plus facile de pardonner à Tavin qu'à Khoda, et plus facile ne voulait pas dire que c'était facile non plus... néanmoins c'était gérable.

Le chat cessa de se frotter aux chevilles de Khoda et alla renifler la main du prince.

– Tu as très mauvais goût, lui dit Khoda