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En d’autres termes, l’image que j’ai de mon père ce soir de 1976 est double : d’un côté je le vois comme je le voyais alors, avec mes yeux de huit ans, imprévisible et terrifiant, d’un autre côté je le vois comme quelqu’un de mon âge dont la vie subissait les rafales du temps qui passe, entraînant avec lui des pans de sens.

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Il peut donc sembler que la mort se distribue selon deux systèmes différents. Le premier est lié à la dissimulation, la pesanteur, la terre et les ténèbres, le second à la transparence, la légèreté, l’air et la lumière. Quelque part dans une ville du Moyen-Orient, un père et son fils se font tuer au moment où le père essaie d’écarter le fils de la ligne de tir. L’image de leurs corps, enlacés au moment où les balles les touchent et les font tressauter sous l’impact, est filmée, transmise à un des milliers de satellites qui tournent autour de la Terre puis diffusée sur les téléviseurs du monde entier, de là elle pénètre dans notre conscience comme une image supplémentaire de morts ou d’agonisants. Ces images n’ont aucun poids, aucune dimension, aucune temporalité, aucune localisation, ni aucun lien non plus avec les corps d’où elles proviennent. Elles sont nulle part et partout. La plupart d’entre elles ne font que nous traverser puis disparaissent, d’autres, pour des raisons diverses, restent et vivent dans l’obscurité de notre cerveau. Une skieuse tombe dans une descente et se sectionne l’artère fémorale, le sang coule en une traînée rouge sur la piste blanche, elle meurt avant même que le corps achève sa course. Un avion décolle au-dessus des maisons de banlieue, des flammes s’échappent de ses ailes, il explose et se transforme en boule de feu dans le ciel bleu. Un soir, un bateau de pêche coule au large de la Norvège du Nord, les sept membres de l’équipage se noient, le lendemain, l’événement est relaté dans tous les journaux, c’est un mystère, dit-on, car la mer était calme et le bateau n’a émis aucun signal de détresse, il a simplement disparu. C’est cet aspect-là de l’événement que les rédactions des journaux télévisés soulignent en montrant les images d’une mer calme filmée depuis un hélicoptère sur les lieux de l’accident. Sous un ciel nuageux, la houle gris-vert paisible et lourde est d’un autre tempérament que les brusques sommets d’écume blanche qui apparaissent çà et là. Je suis seul à regarder ces images. C’est sûrement une journée de printemps car mon père travaille dans le jardin. Les yeux rivés sur la mer, je n’entends pas ce que dit le commentateur quand, tout à coup, apparaissent les contours d’un visage. Je ne sais pas combien de temps ça dure, quelques secondes, peut-être, mais suffisamment longtemps pour que ça m’impressionne énormément. Dès que le visage disparaît, je me lève pour aller raconter ça à quelqu’un. Ma mère est de garde, mon frère a un match et les autres enfants de la cité ne m’écouteront pas. Ce sera donc papa, me dis-je en me dépêchant de descendre l’escalier. J’enfile des chaussures, une veste, ouvre la porte et contourne la maison en courant. Nous n’avons pas le droit de courir dans le jardin et, avant d’arriver dans son champ de vision, je ralentis et finis par marcher. Il est derrière la maison, en contrebas, là où il y aura un potager, et il frappe avec une masse sur un morceau de rocher. Bien que la dénivellation ne soit que de quelques mètres, la terre noire bêchée où il se tient et l’épais bosquet de sorbiers qui pousse derrière lui au-delà de la clôture font que le déclin du jour est plus avancé de ce côté-là. Quand il se redresse et se tourne vers moi, son visage est pratiquement dans la pénombre.

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Pour un cœur, la vie est une chose simple : il bat aussi longtemps qu’il peut, puis il s’arrête. Un jour ou l’autre, ce mouvement scandé cesse de lui-même et le sang commence à refluer vers le point le plus bas du corps où il s’accumule en une petite flaque visible de l’extérieur, comme une tache molle et sombre sur la peau de plus en plus blanche, en même temps que la température baisse, que les membres se raidissent et que les intestins se vident. Ces transformations des premières heures se font si lentement et avec une telle assurance qu’elles ont quelque chose de rituel en elles comme si la vie capitulait selon des règles précises, un genre d’accord tacite auquel même les agents de la mort se soumettent avant d’entamer leur invasion du territoire qui, elle, est irrévocable. Rien ne peut arrêter les hordes de bactéries qui commencent à se disséminer à l’intérieur du corps. Si elles avaient essayé, ne serait-ce que quelques heures plus tôt, elles auraient été combattues immédiatement mais là, tout est calme et c’est sans peine qu’elles s’enfoncent de plus en plus dans les zones sombres et humides. Elles abordent les canaux de Havers, les cryptes de Lieberkühn et les îlots de Langerhans. Elles atteignent la capsule de Bowman dans les néphrons, la colonne de Clark dans le corps spinal et la substance noire dans le mésencéphale. Puis elles touchent le cœur. Il est toujours intact mais dépourvu du mouvement auquel toute sa construction était dédiée, on dirait un lieu déserté, comme un chantier que des ouvriers auraient abandonné en toute hâte avec ses véhicules immobiles et brillants dans la nuit, ses baraquements vides et ses wagonnets pleins, suspendus, arrêtés dans leur ascension de la paroi rocheuse.

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