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— Je sais reconnaître quand t’en pinces pour quelqu’un, tu sais…
— Quand j’en pince pour quelqu’un ? Mais t’as quel âge, sérieux ?
— Ça va, garde tes secrets.
— C’est interdit d’employer des mots pareils, Lise.
— C’est ça, répond-elle en s’éloignant pour rejoindre sa chaise.
— C’est pas une blague hein, faut vraiment que t’arrêtes. Je lâche un rire à la vue du doigt d’honneur peu discret qu’elle m’adresse.
J’en pince pour Carpentier.
Afficher en entier— Monsieur Carpentier ?
— Je commençais à me sentir vexé.
Carpentier. L’un de mes chargés de TD lors de ma première année de fac. À titre subsidiaire, le chargé que j’aurais aussi dû avoir en troisième année si je n’avais pas décidé de plier bagage avant l’heure.
— Je… Excusez-moi, je ne vous ai pas reconnu, je suis…
— Défaite, il me semble.
Je ne le suis pas assez, sans doute, car je repense immédiatement à un détail fâcheux que je n’ai jamais réglé ; il y a trois ans, je ne me suis pas pointée le jour de l’exposition qu’il avait organisée dans une jolie galerie du centre.
— Veuillez m’excuser Milane, je ne voulais pas vous… embarrasser.
Il se souvient de mon prénom, comme je me souviens du sien. Rémi. Le premier type qui m’a encouragée à dessiner en dépit de mon coup de crayon misérable. Le premier, et peut-être le seul, à n’avoir pas trouvé mes esquisses trop brutes, trop grossières, trop ostentatoires. Il avait décidé d’être sympa avec moi et de me dire que ce que je faisais n’était pas de la merde. Depuis, rien ne s’est passé comme prévu.
La gerbe remonte, et je m’empêche à grand-peine de me précipiter à nouveau dans les toilettes. Me barrer. Il faut que je me barre.
— Non, c’est rien, je vais… Je vais juste rentrer chez moi.
Je tente de m’enfuir, avec un sourire que je sais tordu sur mes lèvres, mais sa main me retient.
— Vous ne voulez pas discuter un peu ? J’aurais aimé savoir où vous en êtes.
— Je… Il n’y a pas grand-chose à dire.
Ses sourcils épais se plissent. J’aimais bien ce foutu chargé de TD.
Afficher en entier— Peut-être dois-je me montrer plus convaincant pour que vous mettiez au boulot, alors.
C’est une possibilité pour rebooster ma créativité, sans doute, mais je n’oserais le lui avouer. Il se redresse, s’approche de moi, se penche par-dessus mon épaule.
— Je ne vous demande pas de faire de la magie, faites juste quelque chose.
Son parfum. Peut-être qu’il est là, le problème. Il est enivrant, et trop proche de mes narines.
— Ne pensez pas à la qualité ou au sens de tout ça, continue-t-il en posant ses doigts sur mon avant-bras. Laissez simplement votre corps faire ce qu’il sait faire.
J’ai une image nette de ce que mon corps a envie de faire.
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