Extraits

« Jeunisse ? C'est quoi, une maladie ? »

Je vous jure ! La maladie, c'est jaunisse ! Tu veux me faire rire jaune ou quoi ? Ha ! Ha !

— C'est sûr qu'homme au foyer ça sonne pas très bien, mais si on dit « expert en affaires domestiques », ça ne rend pas si mal comme choix de vie, non ?

Tu crois que je vais perdre mon temps à essayer de mater une poitrine si plate ? Vraiment ? Sérieux, je ne regarde pas ! Elle est entrée, par hasard, dans mon champ de vision pendant quelques secondes et elle a capté mon attention un instant, c'est tout !

— Au fait, j'ai une tare de naissance au dos, vous savez l'herp... herpès ? C'est vraiment embêtant.

— Je suppose que tu veux dire « hernie ». Pas besoin de t'inquiéter pour ça. Je ne vais rien te demander de physique, réplique t-elle une expression condescendante sur le visage.

— Tu fait partie d'aucun club, hein ?

— Non.

— Est-ce que tu as des amis ?

À sont ton, j'ai senti qu'elle supposait que je n'en avais pas.

— J'ai pour principe de privilégier l'égalité. C'est pourquoi je fais en sorte de ne favoriser personne en particulier.

— En résumé, tu n'en as pas.

— Ouais, en gros.

- Pour faire court, je ne comprends pas pourquoi on nous oblige à travailler ou pourquoi les gens se plaignent de ne pas avoir de boulot, alors même que tout le monde se donne tant de mal pour créer une société où le travail devient de moins en moins nécessaire.

La conclusion est parfaite. Ceux qui travaillent sont des perdants, des perdants, rien de plus !

Je dirais néanmoins qu'en ce qui concerne la solitude, je pense la comprendre, au moins un peu.

- Je vois ce que tu veux dire. Seul, on peut bien s'amuser. Je dirais même que les gens qui n'en sont pas capables sont assez effrayants, en fait.

Elle me lance un bref regard, puis redresse sa tête bien droite et ferme les yeux. Elle réfléchit visiblement à quelque chose.

- Je sais aussi que c'est vraiment désagréable d'être pris en pitié alors que l'on reste seul par choix et que l'on aime la solitude, continué-je.

Je pense qu'il est légitime de poursuivre ses rêves, même si c'est puéril, même si c'est vain, même si c'est bizarre. S'il était prêt à abandonner à la moindre critique, on ne pourrait pas parler de passion. C'est pourquoi il est bon qu'il reste fidèle à lui-même.

Son terrible et étrange goût du spectacle excepté, évidemment.

Sa plume est pour lui la preuve tangible et inaltérable que sa lubie s'est bien concrétisée dans le monde littéraire ; peu importe qu'il soit pris pour un taré, pour un malade ou qu'il devienne la risée de tous.

La professeure hoche doucement la tête d'un air entendu.

- As-tu une petite amie ? continue-t-elle, en me toisant.

Non, mais de quoi je me mêle ? Et si je réponds que j'ai un petit copain, qu'est-ce qu'elle va dire, hein ?