Extraits

Elle leva les yeux vers lui.

- Sept mois... ?

- Ouais, dit-il avant de s'éclaircir la gorge. Je me suis dit que si j'étais patient.... j'en sais rien... hésita-t-il, un sourire nerveux aux lèvres, ce qui ne lui ressemblait pas. J'espérais que tu arrêterais de fuir... qu'en prenant du temps, on...

- Je n'ai pas... je... il faut que je règle cette histoire avec les fés et... Sept mois ? répéta-t-elle de nouveau.

Elle s'en voulait terriblement.

- Hé, la coupa-t-il en posant une main sur son épaule. Il n'y a personne d'autre. Que toi. Ca fait sept mois que tu es la seule.

Il la tira gentiment par l'épaule afin qu'elle se tourne vers lui.

- ll n'y a que toi dans ma vie.

Elle lui fit face. Riva ses yeux sur sa chemise. Il y manquait un bouton. Elle serra de nouveau le flacon de miel, mais il le luit ôta de la main pour le poser sur le plan de travail.

Et là, il l'embrassa.

Quand la Reine de l'Hiver avait réduit ses pouvoirs et l'avait privé de la force de l'été en faisant constamment geler la terre, elle avait brisé les espoirs de nombreux fés de Keenan. Il était plus fort que la plupart de ses semblables, mais il était loin d'être le roi dont ses fés avaient besoin. Il était loin d'avoir la puissance de son père.

"Aislinn, je t'en prie. Sois celle que je cherche..."

- Je vais te laisser, dans ce cas, ajouta-t-elle.

- Et si je nai pas envie que tu raccroches ?

Il avait mis de la musique, un air de jazz, apparemment. Son coeur batti plus vite. Elle l'imaginait étendu sur son lit.

- Bonne nuit, Seth, dit-elle d'une voix un peu détachée.

- Tu fuis de nouveau, hein ?

Une botte tomba sur le sol.

- Je ne fuis pas.

L'autre botte, à présent.

- T'en es certaine ?

- Vraiment, seulement j'ai...

Elle s'interrompit, ne sachant comment finir sa phrase sans lui mentir.

- Tu devrais peut-être ralentir, que je puisse te rattraper.

Elle se dirigeait droit sur les cadavériques soeurs Scrimshaw, qui, d'une beauté macabre, se déplaçaient en glissant au-dessus du sol.

"Si elle les voit, elle va les contourner," se dit alors Donia.

Mais Aislinn continua d'avancer jusqu'à ce qu'une des soeurs s'écarte de son chemin à la dernière seconde.

"Evidemment, les mortels ne peuvent voir les fés."

Donia eut un sourire désabusé. Si ça avait été le cas, Keenan n'aurait jamais pu persuader une seule jeune fille de lui faire confiance.

Il ne chercha pas à se rapprocher davantage. Il pouvait la taquiner, essayer de la séduire, mais jamais il n'insistait.

"Je me dévouerai pour distraire le mortel ! Et pendant ce temps, Keenan pourra faire la cour à son Elue."

- On rentre ?

- Ca me va, répondit-il en accélérant un peu le pas et en entourant les épaules de son amie.

"Le Roi de l'Eté va avoir de la concurrence, on dirait..."

En s'éloignant, il passa juste devant le groupe de fées. Ces dernières se dirigèrent vers Aislinn. L'une d'elles la contourna.

"C'est elle, la nouvelle..."

Une autre caressa les cheveux d'Aislinn.

"Quelle ravissante créature..."

Une autre encore haussa les épaules.

"Peut-être."

Comme Leslie, elle avait déjà ôté sa veste, mais elle avait aussi déboutonné son chemisier de deux crans. Une façon sans gravité de se faire remarquer, mais qui lui valait des leçons de morale de la part de ses professeurs.

Justement, posté au coin du bâtiment, le père Edwin s'adressa aux jeunes filles:

- Vous vous trouvez encore dans l'étalissement, mesdemoiselles !

Arrivée sur le trottoir, Rianne lui lança un baiser et rétorqua:

- Plus maintenant ! A demain, mon père !

Le père Edwin dessera son col blanc, sa manière à lui de s'éclaircir la voix.

- Essayez d'être prudentes.