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Neiges d'antan



Description ajoutée par LIBRIO64 2015-10-28T20:26:50+01:00

Résumé

Que ce passe-t-il lorsqu'une femme, son mari, son ex-mari et le collaborateur de celui-ci sont coincés dans une tempête de neige à la montagne ?

En quelques heures, le camp de touristes se transforme en un terrible huis clos où les passions s'exacerbent et la mort rôde, tandis que la neige continue à s'amonceler...

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Classement en biblio

extrait

Extrait ajouté par feedesneige 2016-04-10T17:30:02+02:00

I

Oui, la neige était en route. De la véranda du chalet, je regardais le lac et je sentais à l’odeur que la neige approchait. Le lac était gris, avec un vent mordant comme une lime, et j’avais presque le goût de la neige dans la bouche. Elle n’était pas loin, elle devait s’entasser derrière Old Baldy1 et attendre le coucher du soleil pour passer par-dessus la montagne et descendre en rafale sur nous.

Ma foi, un peu de neige ne ferait de mal à personne, à condition qu’il n’en dégringole pas trop d’un seul coup. Si la grand-route pouvait rester ouverte jusqu’au croisement, à nous deux Frenchy, nous pourrions dégager le chemin qui montait au camp ; et, après une petite chute de neige, la chasse est toujours meilleure.

Plus tard, quand les masses de neige soufflée seraient trop profondes, il ne viendrait plus que les vieux chasseurs endurcis comme M. Baldwin, Snapper Todd, et deux ou trois autres qui avaient assez le feu sacré pour partir en expédition sur des raquettes.

Je croisai mes doigts, en faisant des vœux pour qu’il tombe un peu de neige, puis je rentrai dans le chalet. Frenchy commençait à préparer le souper.

— Elle vient, lui dis-je. Tu avais raison.

Il inclina la tête, avec une grimace de contentement, car il gagnait un dollar, ayant parié contre moi qu’il allait neiger. Il me gagnait toujours de l’argent en pariant sur le temps qu’il ferait. Le temps et le poker lui remplissaient les poches, l’alcool et les blondes les lui vidaient deux fois plus vite.

J’attisai le feu de la cheminée, en me demandant quand Joe ramènerait le père Waller. C’était le dernier jour du père Waller et il y avait de grandes chances pour qu’il ne rentre que lorsqu’il ferait trop noir pour qu’il puisse distinguer le guidon de son fusil. En somme, son séjour s’était bien passé. Il avait à son tableau un cerf bien ramé et un ours tué d’un coup de veine et, une fois retourné en ville, il pourrait exhiber toute une collection de photos de son cerf et de son ours. Je n’étais pas fâché qu’il s’en aille. Oh ! c’était un brave type, mais il parlait trop.

J’aurais bien voulu que M. Baldwin ou Snapper Todd montent chez nous pour une semaine ou deux, mais M. Baldwin était en Europe et Snapper était à sec une fois de plus, et il ne pouvait pas se payer un séjour chez nous, bien que Joe et moi nous lui ayons écrit de ne pas s’en faire pour l’argent. Snapper avait des idées bizarres sur les choses et j’aurais préféré qu’il choisisse un métier où il ne soit pas milliardaire une année et raide comme un passe-lacet l’année suivante.

« Un de ces jours, je monte ici et je me mets dans votre affaire, avait-il l’habitude de dire. Vous avez trouvé la bonne combine. Vous passez votre temps à la pêche et à la chasse, et on vous paye pour ça. »

En réalité, ce n’était peut-être pas tout à fait aussi simple, mais c’était quand même un assez bon métier pour quelqu’un qui n’avait pas trop d’ambition. Moi, je n’en avais pas, Joe non plus, et Frenchy se contentait de parler de la ferme qu’il s’achèterait quand il aurait épousé une certaine femme aux dents éclatantes, aux yeux noirs et aux épaules blanches. Il ne savait pas son nom, parce que, ce jour-là, il était trop plein de cognac pour le lui demander, mais elle lui avait fait grosse impression.

Il ne parlait pas trop d’elle ni de sa ferme, et c’était très bien comme ça, parce que Joe et moi nous pouvions aisément nous dispenser d’entendre de grands discours. À nous trois, nous faisions marcher le camp, nous laissions les autres chasser et, quand il n’y avait pas de pensionnaires, nous roupillions ou nous jouions au poker et, de temps en temps, nous avions une engueulade terrible et nous cessions de nous adresser la parole pendant huit jours.

Je me rappelai que j’avais oublié d’allumer les lampes de la véranda pour guider Joe ; je passai donc une veste et je sortis pour arranger les lanternes. Quand elles furent allumées, je vins m’appuyer à la balustrade et je m’emplis les poumons d’une ou deux bouffées d’air frais. Ça sentait bon : l’odeur de la neige, des effluves de sapin et la fumée de bois qui se rabattait de la cheminée. J’étais heureux d’être là, sur la véranda de notre chalet, sans avoir à m’en faire une miette pour quoi que ce soit.

C’est une chose que j’avais longtemps souhaitée et maintenant que je l’avais, j’étais bien résolu à m’y cramponner et à ne laisser à personne l’occasion de m’en priver.

Les premiers flocons de neige me fouettèrent le visage et j’entendis le « pop-pop » du rafiot à l’autre bout du lac, si bien que je rentrai.

— Les voilà, dis-je à Frenchy.

— Le photographe ? dit Frenchy.

Seulement, il prononçait « ph’tôglâphe », quelque chose comme ça. On ne peut pas reproduire par écrit l’accent canadien, mais c’est à peu près ce que ça donnait.

Quand le père Waller aurait plié bagages, avec son appareil photographique, Joe et moi, nous pourrions mettre les comptes à jour, payer Frenchy et l’envoyer prendre une cuite à Blackstone.

Il était probable que personne n’arriverait sans nous avoir écrit et Frenchy avait besoin, de temps en temps, d’aller faire un tour à Blackstone.

La saison avait été bonne et il y avait de l’argent en caisse. Même s’il ne venait plus personne avant le printemps, nous aurions encore une bonne avance. Je me sentais bien. Je débouchai une bouteille et j’allai chercher de l’eau et trois verres, pour accueillir Joe et le père Waller.

Ils entrèrent ensemble, Joe disparaissant à moitié sous une tonne d’équipement et le père Waller portant quatre ou cinq perdreaux qu’il avait abattus avec le petit vingt de Joe.

— Le bar est ouvert, annonçai-je.

Je versai de l’alcool dans un verre pour le père Waller.

— Il neige, dit-il, il neige tant que ça peut. On arrive à peine à voir sa main devant son nez.

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Date de sortie

Neiges d'antan

  • France : 1997-06-24 - Poche (Français)

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