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- Voilà pour ma souillure à moi. Si tu peux vivre avec elle, alors moi aussi.
Ophélie s'empara du flacon sans cette maladresse dont on l'avait guérie malgré elle, mais en réalisant qu'il y avait bien d'autres manières de casser ce qui était précieux. Se taire plus longtemps était l'une d'elles.
- Je ne peux pas avoir d'enfant.
Voilà, elle l'avait dit. Elle l'avait dit et elle se sentait toujours aussi calme. Elle ne comprenait pas pourquoi elle s'en était fait tout un moulin, pas plus qu'elle ne comprenait pourquoi Thorn la considérait maintenant avec appréhension.
- Et c'est entièrement ma faute, ajouta-t-elle.
Elle pinça les lèvres pour réprimer leur tremblement inexplicable, mais il se propagea à ses dents, ses narines, ses paupières, sa chair entière. Le flacon de désinfectant lui échappa des mains pour rouler dans l'herbe, dévaler la pente et se perdre dans les orties de l’arrêt de bus, tout en bas.
- Excuse-moi.
Elle ne se sentait plus calme du tout, son ventre lui faisait mal. Vivre lui faisait mal. Octavio, Hélène et tous les autres auraient dû eux aussi avoir leur place sur cette colline, devant ce ciel, sous ces oliviers.
- Excuse-moi, bredouilla-t-elle faute de mieux. Excuse-m...
Sa voix mouillée se noya dans la chemise de Thorn. Dans un crissement de ferraille, il avait pressé Ophélie contre lui, rudement, comme s'il voulait contenir sa souffrance avec la même violence qu'il se faisait pour dompter ses propres griffes, mais les excuses continuèrent de déborder d'elle, en sanglots désordonnés, encore et encore et encore.