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Mon père : Emily, ce risotto…
Ma mère : Il est tout simplement délicieux.
La mère de Gus : Merci beaucoup. Je serais ravie de vous donner la recette.
Gus, après une première bouchée : Je dirais, de prime abord, que ça n’a pas le goût de l’Oranjee.
Moi : Très juste, Gus. Ce plat, bien que délicieux, n’a pas le goût de l’Oranjee.
Ma mère : Hazel !
Gus : Il a un goût de…
Moi : De nourriture.
Gus : Exactement. Il a un goût de nourriture, bien préparée, certes, mais il n’a pas ce goût, comment le dire avec tact…?
Moi : Il n’a pas le goût de Dieu en personne, divinement cuisiné, puis décliné en cinq plats, servis accompagnés de boules de plasma pétillant, sous une pluie de pétales de fleurs, qui flottent véritablement et littéralement autour de votre table au bord du canal.
Gus : C’est joliment dit.
Le père de Gus : Nos enfants sont bizarres.
Mon père : C’est joliment dit.
Afficher en entier– Augustus, peut-être aimerais-tu partager tes peurs avec le groupe ?
– Mes peurs ?
– Oui.
– J’ai peur de l’oubli, a-t-il répondu sans attendre. J’en ai peur comme un aveugle que je connais a peur du noir.
– Futur aveugle, a précisé Isaac avec une ébauche de sourire.
– Je suis trop dur ? a demandé Augustus. C’est vrai qu’il m’arrive d’être aveugle aux sentiments des autres.
Isaac s’est bidonné, mais Patrick a levé un doigt réprobateur.
– Augustus, s’il te plaît. Revenons à toi et à ton combat. Tu as dit que tu avais peur de l’oubli ?
– C’est ça, a répondu Augustus.
Patrick était perdu.
– Quelqu’un aimerait rebondir là-dessus ?
Cela faisait trois ans que je ne fréquentais plus d’établissement scolaire. Mes parents étaient mes deux meilleurs amis, le troisième était un écrivain qui ne connaissait même pas mon existence. J’étais plutôt timide, pas du genre à lever la main. Et pourtant, pour une fois, j’ai décidé de m’exprimer. J’ai levé à demi la main, ce qui a rendu Patrick fou de joie.
– Hazel ! s’est-il aussitôt écrié.
Il devait croire que j’allais enfin parler à cœur ouvert, entrer vraiment dans le groupe. Je me suis tournée vers Augustus Waters, et il s’est tourné vers moi. Il avait des yeux d’un bleu translucide.
– Un jour viendra, ai-je dit, où nous serons tous morts. Tous. Un jour viendra où il ne restera plus aucun être humain pour se rappeler l’existence des hommes. Un jour viendra où il ne restera plus personne pour se souvenir d’Aristote ou de Cléopâtre, encore moins de toi. Tout ce qui a été fait, construit, écrit, pensé et découvert sera oublié, et tout ça, ai-je ajouté avec un geste large, n’aura servi à rien. Ce jour viendra bientôt ou dans des millions d’années. Quoi qu’il arrive, même si nous survivons à la fin du soleil, nous ne survivrons pas toujours. Du temps s’est écoulé avant que les organismes acquièrent une conscience et il s’en écoulera après. Alors si l’oubli inéluctable de l’humanité t’inquiète, je te conseille de ne pas y penser. C’est ce que tout le monde fait.
Je tenais ça de mon troisième meilleur ami cité plus haut, Peter Van Houten, le mystérieux auteur d’Une impériale affliction, le livre qui était ma bible. À ma connaissance, Peter Van Houten était la seule personne qui a) semblait comprendre ce que ça faisait de mourir alors que b) il n’était pas mort. Mon intervention a été suivie d’un long silence au cours duquel j’ai regardé se dessiner sur le visage d’Augustus un grand sourire, pas le petit sourire boiteux du garçon qui se la joue sexy, mais son vrai sourire, trop large pour sa figure.
– Mince, a-t-il dit tout bas. Tu n’es pas banale, toi, comme fille.
Afficher en entier« - Contre qui je suis en guerre ? Contre mon cancer ? Et mon cancer, c'est qui ? C'est moi. Les tumeurs sont faites de moi. Elles sont faites de moi comme mon cerveau, mon coeur sont faits de moi. C'est une guerre civile dont le vainqueur est déjà désigné. »
Afficher en entierJe lui ai raconté dans les grandes lignes l’histoire de mon miracle : cancer de la thyroïde stade 4 diagnostiqué à l’âge de treize ans (je n’ai pas précisé que le diagnostic était tombé trois mois après mes premières règles. En mode : Bravo ! Tu es une femme. Maintenant, meurs).
Afficher en entier« Le cancer n'est pas vraiment un méchant : le cancer veut juste vivre lui aussi. »
Afficher en entierOn vous racontera sûrement des histoires drôles à son sujet, parce que c'était un type drôle, mais laissez-moi vous en raconter une sérieuse : le lendemain du jour où je me suis fait retirer l'oeil, Gus s'est pointé à l'hôpital. J'étais aveugle, je venais de me faire larguer, je n'avais envie de rien, et Gus a déboulé dans ma chambre en criant : "J'ai une nouvelle sensationnelle !" Et moi : "Je ne suis pas d'humeur à entendre une nouvelle sensationnelle." Et Gus : "C'est une nouvelle sensationnelle que tu auras envie d'entendre." Alors je lui ai demandé : "Bon, c'est quoi ?" Et lui : " Tu vas vivre une longue et belle vie, pleine de moments géniaux et de moment terribles dont tu n'as même pas idée !"
Afficher en entier– Les gens s’habituent à la beauté.
– Je ne me suis pas encore habitué à toi, a-t-il répliqué en souriant.
Afficher en entierJ’ai posé ma main sur la sienne.
– OK ?
Pas de réponse. Il a continué de me regarder avec les yeux écarquillés.
– Tu as peur de l’avion ? lui ai-je demandé.
– Je te dirai ça dans une seconde, a-t-il marmonné.
Le nez de l’avion s’est relevé, on a décollé. Gus a regardé par le hublot, la planète rétrécissait à nos pieds, j’ai senti sa main se détendre sous la mienne. Il a tourné la tête vers moi, puis à nouveau vers le hublot.
– On vole, a-t-il annoncé.
– C’est la première fois que tu prends l’avion ?
Il a acquiescé.
– REGARDE ! a-t-il presque crié en indiquant le hublot.
– Oui, je vois. Il semblerait que nous nous trouvions dans un avion.
– DE TOUTE L’HISTOIRE DE L’HUMANITÉ, JAMAIS RIEN N’A RESSEMBLÉ À ÇA !
Afficher en entierQuelques jours plus tard, je me suis réveillée vers midi et je suis allée chez Isaac en voiture. C’est lui qui m’a ouvert.
– Ma mère a emmené Graham au cinéma, a-t-il dit.
– On devrait faire quelque chose, ai-je dit.
– Est-ce que ce quelque chose pourrait être : jouer à un jeu vidéo d’aveugle sur le canapé ?
– C’est exactement le genre de quelque chose auquel je pensais.
On est donc restés plusieurs heures sur le canapé à parler à l’écran en nous frayant un passage dans cette éternelle grotte labyrinthique et invisible. Le plus drôle, et de loin, c’était d’engager l’ordinateur dans des conversations comiques :
Moi : Toucher la paroi de la grotte.
L’ordinateur : Vous touchez la paroi de la grotte. Elle est humide.
Isaac : Lécher la paroi de la grotte.
L’ordinateur : Je ne comprends pas. Répétez.
Moi : Chouchouter la paroi humide de la grotte.
L’ordinateur : Vous avez essayé de shooter dans la paroi humide de la grotte. Vous vous êtes fait mal au pied.
Afficher en entier« - Les gens n'ont pas conscience du poids des promesses qu'ils font au moment ou ils le font.
Isaac m’a jeté un regard assassin.
- Oui, bien sur. Ça n’empêche pas de les tenir quoi qu’il arrive. C’est ça, l’amour. C’est tenir sa promesse quoi qu’il arrive. Tu ne crois pas au grand amour ? »
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