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Extrait ajouté par ilovelire 2016-09-19T14:45:11+02:00

Tous étaient bien étonnés de ne pas voir les pyramides fumantes des briques en train de cuire, le défilé des paysans portant les briques sur la tête comme cela se faisait quand l’umupadri demandait aux fidèles de construire une nouvelle succursale ou quand le bourgmestre convoquait la population, le samedi, aux travaux communautaires, pour agrandir le dispensaire ou sa maison. Non, là, à Nyaminombe, c’était un vrai chantier de Blancs, un vrai chantier de vrais Blancs, avec des engins terribles pourvus de mâchoires de fer qui défonçaient et creusaient la terre, avec des camions qui portaient des machines qui faisaient un bruit infernal et crachaient du ciment, des capitas qui hurlaient aux maçons des ordres en swahili et même des Blancs, des capitas-commandants qui ne faisaient rien que de regarder de grandes feuilles de papier qu’ils déroulaient comme les coupons de tissu chez le Pakistanais et qui devenaient fous de rage, comme s’ils crachaient du feu, quand ils appelaient près d’eux les petits capitas noirs.

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Extrait ajouté par ilovelire 2016-09-19T14:45:01+02:00

Il a fière allure le lycée Notre-Dame-du-Nil. Depuis la capitale, la piste qui y mène se faufile interminablement dans le labyrinthe des vallées et des collines, et puis, pour finir, quand on s’y attend le moins, elle escalade en quelques lacets l’Ikibira (les montagnes que les livres de géographie nomment, faute de mieux, la chaîne Congo-Nil) et c’est alors que l’on découvre le grand bâtiment du lycée : on dirait que les sommets se sont écartés pour lui faire une place, là-bas, au bord de l’autre versant, celui au fond duquel on aperçoit le lac scintillant. Tout là-haut, sur la montagne, il brille, pour les petites écolières, comme un palais illuminé de leurs rêves inaccessibles.

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Extrait ajouté par ilovelire 2016-09-19T14:44:49+02:00

Rares sont les pèlerins à se joindre aux lycéennes. La mère supérieure entend éloigner les importuns qu’attirerait, sous prétexte de dévotion, le spectacle de tant de jeunes filles rassemblées. À sa demande, le bourgmestre de la commune de Nyaminombe dont dépend le lycée a fait interdire l’accès à la source. Même madame l’épouse du ministre qui a convié quelques amies à profiter de sa Mercedes pour admirer la piété de leurs filles a bien du mal à convaincre le policier de lever la barrière. Mais il y a un visiteur que la mère supérieure ne peut éconduire, c’est M. de Fontenaille, le planteur de café. Les filles en ont un peu peur. On dit qu’il vit seul dans sa grande villa délabrée. La plupart de ses caféières sont laissées à l’abandon. On ne sait si c’est un fou ou un sorcier blanc. Il fait creuser la terre pour chercher des ossements ou des crânes. Sa vieille jeep ignore les pistes, elle cahote et ferraille sur les pentes de la montagne. Il surgit toujours au milieu du pique-nique. Il salue la mère supérieure en ôtant son chapeau de broussard d’un geste théâtral, découvrant son crâne rasé : « Je dépose à vos pieds mes hommages, ma Révérende Mère. » Celle-ci a bien du mal à cacher son irritation : « Monsieur de Fontenaille, bonjour, vous n’étiez pas attendu, ne venez pas troubler notre pèlerinage. — Je viens comme vous honorer la Mère du Nil », répond-il en tournant le dos. Il fait lentement le tour de chaque natte sur laquelle déjeunent les lycéennes, s’arrête parfois devant l’une d’elles, réajuste machinalement ses lunettes, la dévisage en hochant la tête d’un air satisfait, esquisse son profil sur un petit carnet. Sous son regard intense, la jeune fille distinguée baisse la tête — ainsi le veut d’ailleurs la politesse — mais quelques-unes ne peuvent s’empêcher de lui adresser furtivement un gracieux sourire. La mère supérieure, qui n’ose intervenir de peur de provoquer un scandale encore plus grand, suit avec appréhension le manège du vieux planteur. Enfin, celui-ci se dirige vers le petit bassin où est retenue l’eau de la source, il jette, dans la première eau du Nil, quelques pétales d’un rouge vif qu’il a tirés de l’une des nombreuses poches de sa veste, puis il lève trois fois les bras vers le ciel, les mains ouvertes, les bras écartés, en prononçant quelques mots incompréhensibles. Dès que M. de Fontenaille a regagné le parking et qu’on entend hoqueter le moteur de la jeep, la mère supérieure se lève et ordonne : « Mes filles, chantons un cantique. » Les lycéennes le reprennent en chœur tandis que quelques-unes regardent se dissiper à regret le nuage de poussière soulevé par la jeep.

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Extrait ajouté par ilovelire 2016-09-19T14:44:40+02:00

Pour les élèves du lycée Notre-Dame-du-Nil, le grand pèlerinage, c’est en mai. Le mois de Marie. C’est une longue et belle journée, la journée du pèlerinage. Le lycée s’y prépare longtemps à l’avance. On prie pour que le ciel soit clément. La mère supérieure et le père Herménégilde, l’aumônier, ont décrété une neuvaine. Toutes les classes sont invitées à se relayer dans la chapelle pour prier la Sainte Vierge : que ce jour-là, elle chasse les nuages ! Après tout, en mai, c’est possible, les pluies s’espacent un peu, la saison sèche approche. Le frère Auxile (c’est lui qui se penche quand il le faut sur les entrailles huileuses du groupe électrogène et les moteurs des deux camions de ravitaillement, qui peste en dialecte gantois contre les boys-mécanos ou les chauffeurs, qui joue de l’harmonium et dirige la chorale), le frère Auxile donc, depuis un mois, fait répéter les cantiques qu’il a composés en l’honneur de Notre-Dame du Nil. Les professeurs belges et les trois jeunes coopérants français sont instamment priés de participer à la cérémonie. La mère supérieure a fait discrètement savoir à ces derniers qu’il serait plus respectueux de porter costume et cravate, mieux adaptés à la solennité du jour que ces pantalons de toile grossière qu’ils appellent blue-jeans, et qu’elle comptait sur leur attitude respectueuse pour montrer le bon exemple aux élèves. La sœur intendante, dont on entend tinter le gros trousseau de clés attaché à son ceinturon de cuir, est allée choisir dans la réserve les boîtes de conserve pour le pique-nique : corned-beef, sardines à l’huile, confitures, fromage Kraft. Cela lui a pris une bonne partie de la nuit. Elle a compté au plus juste les casiers de Fanta orange pour les élèves et quelques bouteilles de Primus réservées à l’aumônier, au frère Auxile et au père Angelo, le père de la mission voisine qui a été invité. Pour les sœurs rwandaises, professeurs et surveillantes, elle a réservé une dame-jeanne de vin d’ananas, la spécialité de sœur Kizito qui garde jalousement le secret de la recette.

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Extrait ajouté par ilovelire 2016-09-19T14:44:33+02:00

Quelques jours après, des ouvriers de la mission sont venus construire une plate-forme entre les deux gros rochers, au-dessus de la source. On y a placé la statue et on l’a abritée sous une niche de tôles. C’est bien après, à deux kilomètres de là, qu’on a construit le lycée. Juste à l’indépendance.

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Extrait ajouté par ilovelire 2016-09-19T14:44:26+02:00

D’un goupillon énergique, monseigneur le vicaire apostolique bénit la statue, bénit la source, bénit la foule. Il prononça son sermon. On n’a pas tout compris. Il a parlé de la Sainte Vierge qui s’appellerait ici Notre-Dame du Nil. Il a dit : « Les gouttes de cette eau bénite se mêlent aux eaux naissantes du Nil, se mêleront aux flots des autres rivières qui deviendront le Fleuve, traverseront les lacs, traverseront les marais, rouleront dans les chutes, défieront les sables du désert, abreuveront les cellules des anciens moines, parviendront au pied du Sphinx étonné, c’est comme si ces gouttes bénites, par la grâce de Notre-Dame du Nil, allaient baptiser l’Afrique tout entière et c’est elle, l’Afrique devenue chrétienne, qui sauvera ce monde en perdition. Et je vois, oui je vois, ces foules de toutes les nations qui viendront en pèlerinage, qui viendront en pèlerinage dans nos montagnes pour rendre grâce à Notre-Dame du Nil. »

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Extrait ajouté par ilovelire 2016-09-19T14:44:17+02:00

On attendit longtemps. Enfin on aperçut, sur le sentier de la crête, une ligne noire d’où s’élevait un murmure de prières et de cantiques. Peu à peu, on a distingué : Mgr le Vicaire apostolique qu’on a reconnu à sa mitre et à sa crosse. On aurait dit un des Rois mages comme sur les images qu’on montre au catéchisme. Les missionnaires suivaient : ils étaient coiffés, comme tous les Blancs en ce temps-là, d’un casque colonial, mais ils étaient barbus et portaient de longues robes blanches bardées d’un gros chapelet. La troupe des enfants de la Légion de Marie tapissait la piste de pétales de fleurs jaunes. Puis venait la Vierge. Elle était portée par quatre séminaristes en short et en chemise blanche sur une litière de lattes de bambou tressées sur laquelle on transporte la jeune mariée dans sa nouvelle famille ou les morts vers leur dernière demeure. Mais on ne pouvait pas voir la Madone. Elle était enveloppée dans un voile bleu et blanc. Derrière se bousculait le « clergé indigène » puis, précédée de leur bannière et du drapeau jaune et blanc du pape, s’effilochait la troupe des élèves du catéchisme qui, en dépit des bâtons des moniteurs, s’égaillaient sur les pentes en dehors du sentier.

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Extrait ajouté par ilovelire 2016-09-19T14:44:05+02:00

Le lycée est tout proche du Nil. De sa source évidemment. Pour y aller, on emprunte une piste rocailleuse qui suit la ligne des crêtes. La piste aboutit à un terre-plein où stationnent les rares Land Rover des touristes qui s’aventurent jusque-là. Une pancarte indique : « SOURCE DU NIL → 200 m. Un sentier en pente raide mène à un éboulis d’où jaillit entre deux rochers un mince ruisselet. L’eau de la source est d’abord retenue dans un bassin cimenté avant de se déverser par une minuscule cascade dans une rigole incertaine dont on perd vite la trace dans les herbes du versant et sous les fougères arborescentes de la vallée. À droite de la source, on a érigé une pyramide qui porte l’inscription : « Source du Nil. Mission de Cock, 1924 ». Pas bien haute la pyramide : les filles du lycée touchent sans effort la pointe ébréchée, elles disent que cela leur portera bonheur. Mais ce n’est pas pour la pyramide que les lycéennes viennent à la source. Elles n’y vont pas en excursion, elles y vont en pèlerinage. La statue de Notre-Dame du Nil est placée entre les gros rochers qui surplombent la source. Ce n’est pas tout à fait une grotte. On a abrité la statue sous une guérite de tôles. Sur le socle, on a gravé : « NOTRE-DAME DU NIL, 1953 ». C’est Mgr le Vicaire apostolique qui a décidé d’ériger la statue. Le roi avait obtenu du souverain pontife de consacrer le pays au Christ-Roi. L’évêque a voulu consacrer le Nil à la Vierge.

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Extrait ajouté par ilovelire 2016-09-19T14:43:58+02:00

Il n’y a pas de meilleur lycée que le lycée Notre-Dame-du-Nil. Il n’y en a pas de plus haut non plus. 2 500 mètres, annoncent fièrement les professeurs blancs. 2 493, corrige sœur Lydwine, la professeur de géographie. « On est si près du ciel », murmure la mère supérieure en joignant les mains.

L’année scolaire coïncidant avec la saison des pluies, le lycée est souvent dans les nuages. Parfois, mais rarement, il y a une éclaircie. On aperçoit alors, tout en bas, le grand lac comme une flaque de lumière bleutée.

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« C’est une nouvelle invasion ! Je crois qu’il faudra régler cela nous-mêmes et, cette fois, en finir avec ces parasites. » (p 36)

« Évidemment, je veux avoir des enfants comme les autres. Mais je veux des enfants qui ne soient ni hutu ni tutsi. Ni à moitié hutu ni à moitié tutsi. Je veux qu’ils soient mes enfants, c’est tout. Parfois je me dis qu’il vaudrait mieux que je n’aie pas d’enfants. » (p 111)

« Leoncia se sentait rassurée : Virginia était étudiante et quand on est étudiants, pensait-elle, c’est comme si on n’était plus ni hutu ni tutsi, comme si on accédait à une autre ‘ethnie’ » (p 154)

« Mon père dit qu’il faut répéter sans cesse qu’il y a toujours des Inyenzi [résistants tutsi exilés dans les pays limitrophes du Rwanda], qu’ils sont toujours prêts à revenir, qu’il y en a qui s’infiltrent, que les Tutsi qui sont restés les attendent avec impatience. Mon père dit qu’on ne doit jamais oublier de faire peur au peuple. » (p 229)

« – Tu sais bien que tout ça repose sur tes mensonges. – Ce ne sont pas des mensonges, c’est de la politique. » (p 239)

« Virginia ne pouvait plus, ne voulait plus dormir. Elle guettait les bruits, elle attendait avec angoisse le grincement du portail, le ronflement des moteurs, le crissement des pneus qui annonceraient l’irruption des tueurs. Il y aurait ensuite la violence des cris, des vociférations, le martellement des chaussures cloutées dans l’escalier, l’affolement de la fuite… » (p 256)

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