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Au jeune homme qui est assis en face de moi

Je rédige cette lettre, sans savoir si j’aurai le cran de vous la donner. Mais c’est plus fort que moi. Si je n’agis pas, je sais que je le regretterai. Je n’ose pas vous adresser la parole, à peine vous regarder. Alors, je vous écris.

Quand je suis arrivée dans le wagon, et que nos regards se sont croisés, j’ai été frappée par votre physique d’Apollon : une gueule d’ange sur un corps d’athlète. Ce mélange subtil de délicatesse et de virilité est rare. Ne croyez pas que je dis ça à tout le monde. En matière d’hommes, je suis du genre à faire la difficile. En revanche, vous, on a dû souvent vous faire de tels compliments. Vous ne pouvez pas ignorer que vous avez une plastique hors du commun… Vos traits délicats, vos yeux enjôleurs, votre teint doré, votre sourire à faire chavirer les cœurs, vos mèches blondes rebelles… Les filles doivent vous tomber dans les bras. Vous me faites penser à un acteur hollywoodien. Le genre d’hommes qui n’existe habituellement que derrière l’écran. Sauf qu’aujourd’hui, vous êtes là, devant moi, dans le TGV. J’en suis troublée à l’extrême. Vous regarder, c’est faire l’expérience de la beauté faite chair. Je suis tiraillée entre désir et admiration.

Je ne connais pas votre nom, mais j’imagine que vous vous appelez Amaël. L’agencement si fluide de consonnes et de voyelles vous va à ravir. À bien y réfléchir, vous ne pouvez pas vous prénommer autrement. Je ne sais pas non plus quel âge vous avez, 23, 25 ans tout au plus. En tout cas, beaucoup moins que moi, qui viens de souffler mes quarante bougies. Je pourrais presque être votre mère… À dire vrai, mes enfants sont encore petits. Cinq bambins : trois garçons, deux filles, que je vais chercher chez leur mamie avant de descendre dans le sud, où mon mari doit nous rejoindre. Mon mari… ça fait plus de douze ans qu’on se connaît. Je suis devenue transparente à ses yeux. Les grossesses répétées, les nuits sans sommeil, les petits bobos des uns et des autres, ça vous bousille une vie de couple en moins de deux.

C’est drôle, quand vous m’avez regardée, j’ai eu le sentiment que pour vous, j’existais de nouveau comme une femme… Et ça m’a fait tout drôle. C’était comme une réminiscence de mes belles années. Mais sûrement me serais-je trompée… Peut-être vous faisais-je penser à quelqu’un… À votre âge, vous avez mieux à faire que de mater les mères de famille. Ce ne sont pas les jolies nymphettes qui manquent.

Mais pourquoi s’empêcher de rêver ? Quand il n’y a que cela à faire… Alors j’y vais, bien que je n’aie plus ni 15, ni 20, ni 25 ans, je me lance comme une midinette ; je m’enivre d’illusions, je me vautre dans des scénarios imaginaires qui me rendent votre présence tolérable, et que, peut-être, vous lirez, si je trouve le courage de vous donner cette lettre.

Dans mon rêve donc, j’imagine que j’ôte discrètement une sandale, et que j’allonge ma jambe vers vous. Mon pied nu vous surprend, lorsque je l’appuie contre votre mollet. Oh, bien sûr, vous êtes étonné. Vous tressaillez, mais vous ne vous dérobez pas. Vous souvenez-vous ? C’est mon rêve !

Votre regard plonge dans le mien tandis que mes orteils remontent le long de votre jean. Et, quand ils atteignent la braguette gonflée par l’impatience de mes caresses, vous vous immobilisez. Nous fermons les yeux de concert, pour mieux apprécier le contact : moi, je mouille de sentir la fermeté du pénis que je fais rouler sous ma voûte plantaire, et vous, Amaël, vous savourez l’audace de mon geste. Vous vous délectez de mes petites attentions coquines.

Soudain, je sens une pression contre ma peau. Vous me faites du pied à votre tour. J’ouvre grand les cuisses pour vous signifier mon accord, vous indiquer la voie à emprunter. Votre chaussure glisse sur mon épiderme hérissé de frissons, atteint mon entrejambe. Je m’arc-boute sous l’effet de la vague voluptueuse qui m’emporte au moment de l’impact. Une boule de chaleur explose dans mon bas-ventre. Alors nous rouvrons les yeux pour savourer notre complicité… Ô miracle ! Tous les voyageurs sont immobiles, comme des poupées de cire. Ils sont restés figés dans la position où nous les avons laissés, le regard fixe. Le train, lui aussi, a cessé de rouler. Les vaches qui paissent dans le pré que nous traversons ne bougent pas d’un poil. Les nuages ont interrompu leur course. Le temps semble s’être arrêté comme par magie.

Mais tout cela m’impressionne moins que le sourire rayonnant que vous m’adressez en me masturbant. Je fonds sur mon siège, d’un liquide visqueux qui inonde mes cuisses tremblotantes. Je ne tiens plus en place, il faut que je vous touche. Telle une chatte agile, je passe au-dessus de la tablette pour m’asseoir sur vos genoux, jambes écartées. Vous relevez l’accoudoir afin de faciliter mes mouvements. Et j’y suis, enfin, collée à vous. Je peux faire courir mes mains sur votre visage angélique, encadré de mèches blondes… Votre peau d’abricot, légèrement hâlée, appelle mes caresses. J’en apprécie la douceur ineffable sous la pulpe de mes doigts. Amaël : vous n’êtes pas un rêve, vous existez bel et bien, et vous vous donnez à moi. Il me suffit de glisser la langue entre vos lèvres tièdes, de déguster vos sucs, pour comprendre combien vous êtes réel. Un homme de chair et de sang, rien que pour moi.

Les premiers attouchements passés, vos pulsions masculines reprennent le dessus. Mon baiser fouette votre désir de me posséder. De bel ange, vous devenez démon. Vous retroussez ma jupe, et empoignez mes fesses pour m’attirer plus près de vous. Une pression sur mes reins me plaque contre votre braguette. Je sens votre érection battre contre mon sexe bouffi d’excitation. Mon clitoris palpite à grands coups. Vous le soulagez d’une main glissée sous le tulle de ma culotte. Vos phalanges électrisent mon bouton échauffé, taquinent l’entrée gluante de mon vagin, mais aucune friction ne suffit à satisfaire mon appétit. Vous sentir en moi, faire corps avec votre virilité…

Je bataille avec vos boutons de jean pour libérer l’objet de ma convoitise. Tiens ! Vous ne portez pas de slip. L’accès à votre belle hampe endurcie n’en est que plus facile. Ma culotte déviée, je m’empale sur vous d’un seul coup. Quelle libération ! Je vous absorbe en une bouchée. Mon sexe s’épanouit autour de votre queue providentielle. Je savoure son calibre et sa fermeté en balançant de haut en bas. Les frictions allument un incendie en moi. Les vannes du plaisir lâchent…

Puis, vous prenez le relais. Les ongles enfoncés dans le gras de mes fesses, vous me faites rebondir sur vos cuisses. Vos mouvements de bassin énergiques me font voir des étoiles. Je sens les va-et-vient de votre pénis avec une acuité décuplée. Mes parois internes chauffent. Vous ne vous contrôlez plus. Tout en me ramonant, vous écartelez mes fesses à deux mains, comme si vous vouliez me déchirer. Mon anus, contraint à l’ouverture, bâille, autant que ma chatte martelée au plus profond. Mais c’est quand vous m’embrassez à pleine bouche que j’explose. L’orgasme arrive par rafales, je tressaille et me contorsionne sous la déferlante de spasmes, et vous aussi, vous jouissez…

Incapable de résister aux contractions de mon sexe, vous m’assenez des coups de reins d’une violence magistrale, en inondant mon con de votre semence chaude. Baignant dans une liqueur visqueuse, nos sexes restent englués l’un à l’autre, nos bouches soudées, nos langues enlacées… Nos derniers soupirs, résidus de nos cris bestiaux, s’accordent en un baiser. Des larmes brouillent ma vue. L’orage passé, nous ne pouvons pas nous résoudre à conclure l’étreinte. Quelque chose me dit que si nous nous séparons, le charme sera brisé, la vie reprendra son cours… Le train repartira dans sa course folle… Et plus rien de mon délire sensuel n’existera.

Peut-être est-ce par peur de briser mon rêve, que je ne vous donnerai pas cette lettre. Si elle vous choquait, si vous me méprisiez de l’avoir écrite, j’en serais dévastée… Je ne l’ai pas rédigée pour vous allumer, juste pour vous témoigner tout ce que votre physique m’inspire de beau et de sensuel.

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Elle avait de beaux seins pleins et larges, placés haut sur le buste, qui tendaient le tissu de sa chemise. Entre les boutons, qui travaillaient dur pour maintenir les deux pans fermés, on distinguait la dentelle noire de son soutien-gorge. De la jolie lingerie. À tous les coups, elle portait la culotte assortie. Ne pas y penser. Non, ne pas imaginer la maille noire transparente, plaquée sur sa toison fournie, dont s’échappaient quelques poils rebelles. Ne pas visualiser le point de jonction humide entre ses deux cuisses fermes. Putain, comme ça me donnait soif !

J’ai sorti la bouteille de coca que j’avais coincée dans ma poche de jean, et comme un con, j’ai oublié que j’avais couru pour attraper le train. Résultat : la mousse a giclé de partout, mais surtout sur mon T-shirt. Ça faisait vraiment clodo. Je suis allé aux toilettes pour passer de l’eau dessus. J’y suis resté longtemps, c’est pas simple de faire une lessive avec le mince filet d’eau qui s’écoule du robinet des chiottes. Pendant ce temps, le train a marqué un arrêt. L’annonce disait « Angoulême ».

Quand je suis revenu à ma place, elle avait disparu, sa valise aussi. La parenthèse enchantée était finie. Le TGV a repris sa route, et j’ai regretté de ne pas avoir pu lui jeter un dernier regard, ne serait-ce que pour établir un lien, une connivence, juste quelques secondes. Un sourire, si j’avais eu le cran… Elle me l’aurait peut-être rendu. Mais à quoi bon y penser ? Elle était partie.

J’ai bullé jusqu’à l’annonce du terminus. Avant de quitter mon siège, j’ai voulu tej la bouteille de coca à la poubelle. C’est alors que j’ai vu les boulettes de papier. Je n’ai pas pu m’empêcher de les rafler. Sur le quai de la gare, je me suis assis sur un banc pour les défroisser… Et j’ai lu.

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C’est à peu de chose près ce que j’étais en train de faire quand elle est arrivée. En retard, elle aussi ; le train a démarré tout de suite après son entrée en scène. Le siège devant moi était libre. Elle a dû demander à son voisin de se lever pour y accéder. Il l’a fait à contrecœur. Elle a jeté sa valise sur le rack, et puis elle s’est faufilée comme une petite souris jusqu’à son siège. Sauf qu’elle n’avait rien d’une petite souris. C’était une Femme, une vraie. Une bombe atomique qui irradiait des hormones femelles de partout. Je lui donnais peut-être trente-trois, trente-cinq ans.

Elle était grande, brune, les cheveux lisses et brillants, coupés en carré long. Elle portait une jupe noire au-dessus du genou, et une chemise assortie, ouverte de trois boutons sur la gorge. Pas de collants. Ses jambes nues étaient bronzées. Des sandales à talon haut accentuaient le dessin du mollet. Les ongles de ses orteils étaient vernis, d’un rouge rutilant. Elle avait une classe folle, qui tenait tant à sa taille (elle devait dépasser le mètre soixante-quinze) qu’à l’assurance qui se dégageait de sa personne. Elle avait rabattu ses lunettes de soleil sur ses cheveux noirs, comme un serre-tête. Ça déchirait grave.

Quand elle s’est assise devant moi, son souffle était court, des perles de sueur humectaient son front. Elle m’a regardé brièvement, et là, j’ai fondu littéralement sur mon siège. Ses grands yeux verts, qui illuminaient son visage aux traits racés, m’ont fait valdinguer le cœur. Ses iris avaient la couleur des lacs de montagne, que rehaussait un maquillage charbonneux.

Quand le train a démarré, elle a sorti un petit miroir de son sac à main, pour se remettre du rouge. Elle ourlait puis pinçait les lèvres devant la glace, à mesure qu’elle les badigeonnait de gloss. Comme j’aurais voulu être ce pinceau, qui allait et venait sur sa bouche sensuelle ! Et puis, quand elle a fait claquer les deux parties du miroir pour le refermer, c’était comme si elle se fermait elle-même. Un truc du genre « le spectacle est fini, maintenant gamin, tu ranges tes yeux dans ta poche ». Je n’osais plus la regarder, sauf quand elle tournait la tête dans une direction opposée. Je ne suis pas d’une nature impressionnable, mais là, j’étais tétanisé. Je réalisais que je n’avais jamais chopé une nana de cette trempe, et qu’en somme, je n’avais rien connu de la féminité avant de la rencontrer.

Très vite, elle s’est saisie d’un bloc-notes et d’un stylo, et elle s’est mise à écrire. Elle avait l’air absorbé par ce qu’elle était en train de faire. Elle griffonnait sa page rageusement, d’une petite écriture penchée, sans laisser d’espace vide. Quand elle avait tout noirci, elle chiffonnait le papier, et le jetait dans la poubelle métallique. Puis elle remplissait une nouvelle page blanche. Je me suis demandé quel taf elle pouvait faire : journaliste ? Écrivain ? Ou peut-être préparait-elle un speech. Avec son charisme, je la voyais bien haranguer une foule de mecs cravatés.

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C’est un tout jeune contrôleur, nouveau venu sur la prestigieuse ligne Paris-Venise, et régulièrement distrait par les jolies voyageuses qui grimpent dans le wagon en levant haut les genoux. Marion est la plus jolie, ce soir. Il a pu apercevoir la finesse de ses jambes, en un éclair, tandis qu’elle montait vivement à bord, suivie de près par son ami.

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