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** Extrait offert par Penny Jordan **

1.

« Ce n’est qu’un emploi, rien de plus », se répétait Laura en descendant Sloane Street d’un pas rapide. Mais un emploi absolument indispensable vu sa situation. Malheureusement, il signifiait aussi travailler en étroite, très étroite collaboration avec Vasilii Demidov, en tant qu’assistante personnelle.

Elle s’arrêta net au milieu de la rue.

Bon sang, elle n’avait plus quatorze ans ! Son béguin d’antan pour le grand frère extraordinairement sexy d’une de ses camarades de classe s’était évanoui depuis longtemps, n’est-ce pas ? Elle n’était plus cette adolescente fleur bleue qui avait parcouru le Net en secret, collectant toutes les informations qu’elle pouvait trouver sur son fantasme. Par chance, les grands réseaux sociaux n’existaient pas encore à l’époque, ce qui lui avait au moins évité de se ridiculiser publiquement — rêvasser pendant des heures devant une photo de lui qu’elle avait réussi à prendre à son insu était déjà assez pathétique.

C’était un vendredi après-midi où il était venu chercher sa demi-sœur à la sortie de l’école. Laura était à la fenêtre de sa chambre et suivait la scène, à moitié cachée derrière le rideau. Comme Vasilii s’approchait d’Alena, le jeu de ses muscles virils sous le jean et le T-shirt noir l’avait troublée, et ses mains s’étaient mises à trembler. C’était un miracle que la photo n’ait pas été complètement floue. Elle l’avait ensuite rangée dans sa cachette la plus sacrée : le tiroir secret de sa boîte à bijoux, laquelle avait appartenu à sa mère autrefois et gardé un peu de son odeur imprégnée dans le bois.

Cette boîte à bijoux ne l’avait jamais quittée. Quant à la photo… Non, vraiment, cela frôlait le pathétique. Si elle y était encore, se rassura Laura, c’était simplement parce qu’elle n’avait jamais pensé à la jeter, voilà tout.

Elle était si idéaliste à quatorze ans… Le rôle d’admiratrice clandestine lui était venu aussi naturellement que le fait de respirer. Dans son imagination, Vasilii et elle se rencontraient en secret. Elle s’était même convaincue que parce qu’ils avaient tous deux perdu leur mère, un lien spécial les unissait.

Pourtant, pas une fois elle n’avait eu l’occasion de l’approcher, encore moins de lui parler. Mais ô combien souvent elle avait rêvé de lui, partagée entre le désir qu’il la remarque et la peur de ne pas savoir contenir son excitation si cela arrivait !

« Et alors ? » se gronda-t-elle en reprenant sa marche. C’était de l’histoire ancienne, le fantasme typique d’une adolescente solitaire aux prises avec sa sexualité naissante. Ne venait-elle pas de prononcer son nom plusieurs fois mentalement sans que son cœur se mette à battre la chamade ? C’était bien la preuve qu’elle avait grandie.

Pourtant, elle ne put s’empêcher de vérifier son reflet dans une vitrine, comme pour s’assurer qu’il lui renvoyait bien l’image d’une jeune femme de vingt-quatre ans et non celle d’une adolescente. Une femme aux longs cheveux bruns tombant impeccablement sur ses épaules, dont les yeux bleu-vert et les lèvres charnues, discrètement maquillés, rehaussaient le teint de porcelaine.

Une femme d’affaires sérieuse, en route pour un entretien d’embauche dont dépendait son avenir financier immédiat.

« Pourquoi cette vérification ? » se demanda-t-elle. Craignait-elle que l’adolescente sensible et romantique qu’elle avait été subsiste en elle ? Avait-elle peur qu’elle refasse surface, éveillée par le charme dangereux de Vasilii Demidov et le simple fait de respirer le même air que lui ? Non, c’était impossible, n’est-ce pas ?

D’ailleurs, le présent lui importait davantage que le passé. Car si être écartée d’un poste pour lequel elle était toute désignée, comme cela venait de lui arriver, pouvait passer pour un incident regrettable, un second revers compromettrait sérieusement ses chances de carrière. Oh ! bien sûr, elle n’était pas dupe. Elle savait exactement pourquoi on lui avait refusé cette promotion pourtant promise verbalement. Le nouveau P.-D.G. de l’entreprise qui l’employait le lui avait clairement fait comprendre. Quelle humiliation ! Ce souvenir suffisait à la faire pâlir de honte.

Oui, elle avait absolument besoin de ce travail. Et quel travail ! Un contrat de six mois comme assistante personnelle de Vasilii Demidov, pour un salaire mensuel à couper le souffle. C’était presque le double de ce qu’elle gagnait jusque-là ! Sans parler des portes que lui ouvrirait ensuite un poste aussi prestigieux. Son CV s’en trouverait considérablement enrichi, ce qui, espérait-elle, éclipserait ses déboires récents.

Si elle s’était récemment remise à collecter des informations sur Vasilii, c’était uniquement par souci professionnel. N’importe quel candidat se renseignait sur l’entreprise qu’il aspirait à rejoindre. Dans ce cas précis, l’entreprise, c’était Vasilii Demidov lui-même.

Après le décès de son père, il avait repris son portefeuille d’activités, qu’il avait fait prospérer en un vaste empire industriel. Le siège de la multinationale se situait à Zurich. Mais d’après ce qu’elle avait lu, la direction de l’entreprise obéissait davantage aux traditions nomades de la famille de sa mère. Vasilii voyageait donc constamment et se rendait partout où résidaient ses intérêts financiers.

Contrairement aux autres oligarques russes, il ne possédait pas de somptueuses propriétés disséminées à travers le monde, préférant loger à l’hôtel ou louer des appartements. Son esprit était comme les sables du désert foulés par les caravanes de chameaux : toujours en mouvement.

Elle avait été impressionnée, à quatorze ans, d’apprendre que Vasilii, à demi russe par son père, descendait également, du côté de sa mère, d’un peuple parmi les plus anciens et les plus nobles ayant traversé les contrées hostiles du sud de la Russie, non loin de ce qui était aujourd’hui l’Afghanistan et l’Iran. Une légende affirmait que ces farouches combattants aux yeux clairs avaient mêlé leur sang à celui d’une légion romaine perdue ; de là serait née leur fierté séculaire en leur suprématie guerrière. De nombreuses histoires circulaient sur internet concernant leur orgueil farouche et leur fidélité sans faille au code d’honneur de leur clan.

Comme beaucoup d’autres, cette tribu avait vu sa population décimée par les guerres et les maladies, bien avant la naissance de la mère de Vasilii. Celle-ci était tombée amoureuse d’un Russe séduisant, avant d’être ravie à son mari et à son fils de la plus terrible des façons. En apprenant son kidnapping tragique, à l’époque, Laura s’était sentie submergée d’amour pour Vasilii. Mais cela remontait à plus de dix ans.

Ce qu’elle savait de lui aujourd’hui brossait le tableau d’un homme immunisé contre les faiblesses ordinaires du genre humain. Un homme puissant, inflexible, entièrement dévoué à sa réussite. Un homme que n’intéresseraient certainement pas les souvenirs d’un béguin d’écolière…

Laura secoua la tête et s’obligea à cesser de divaguer. Un coup d’œil à sa montre l’incita à accélérer le pas. Pas question d’être en retard à cet entretien d’embauche capital parce qu’elle s’était laissée aller à fantasmer sur son possible futur employeur.

* * *

Du salon de son appartement, situé au dernier étage de l’un des plus prestigieux immeubles de Londres, Vasilii avait une vue imprenable sur Sloane Street et le quartier voisin. Un rayon de soleil réchauffait la fenêtre devant laquelle il se tenait.

Aux yeux de ses compatriotes russes, il était un étranger. Son teint bronzé et son nez aquilin le faisaient appartenir au monde arabe plutôt qu’au leur. Mais il avait été tout autant un étranger dans la famille de sa mère que dans celle de son père, réellement accepté ni par l’une ni dans l’autre, marqué physiquement par les gènes de sa mère et intellectuellement par le génie de son père pour les affaires. Son double héritage avait creusé une profonde contradiction en lui, le rendant presque schizophrène : au côté du jeune Russe bien de son temps luttait un féroce guerrier du désert, au code moral et aux croyances totalement dépassés.

Très jeune, il avait appris à tracer seul son chemin et à ne faire confiance à personne. Surtout après l’enlèvement de sa mère, assassinée par ses ravisseurs lors de la mission lancée pour la sauver — qui avait mal tourné.

Enfant, il avait été très dépendant de l’amour de sa mère. Sa perte brutale avait convaincu l’adulte qu’il était devenu de la nécessité de se prémunir contre cette faiblesse. Et c’est exactement ce qu’il avait fait, tenant les gens à distance, se jurant de ne plus jamais laisser l’amour — ou la perte de l’amour — l’affaiblir.

Il se passa une main nerveuse dans les cheveux et se concentra sur son futur proche. Seul le présent et l’avenir devaient le préoccuper, non le passé. Et le présent avait un nom : Laura Westcotte.

Que son assistant ait dû prendre un congé de six mois pour veiller sur sa femme malade n’était pas de chance. Mais que son remplaçant attrape la grippe au moment précis où les transactions avec les Chinois prenaient un tour délicat l’irritait profondément. Il avait besoin sans délai d’un nouvel assistant parlant couramment le mandarin, le russe et, naturellement, l’anglais, capable de parlementer avec de hauts dignitaires chinois selon le protocole complexe de leurs négociations.

Si lui-même maîtrisait ces trois langues, il était cependant impensable, dans ce genre de pourparlers, de traduire soi-même les propos de son interlocuteur, au risque de le froisser. En effet, il avait très vite compris que pour négocier avec les Chinois, la présence de toute une équipe de collaborateurs était requise.

Pour cette raison, il s’apprêtait à recevoir Laura Westcotte, la candidate la plus qualifiée pour le poste aux dires de ses chasseurs de têtes. L’urgence l’avait poussé à accepter cet entretien, au mépris de la règle qu’il s’était fixée : ne jamais travailler en proche collaboration avec une femme. Ses employées, à son grand dam, avaient un peu trop tendance à voir en le millionnaire célibataire qu’il était un mari potentiel. Or, il n’avait aucune intention de se marier.

Jamais.

Sa mâchoire se crispa, son corps tout entier assailli par une vague d’émotion indésirable. Le mariage, comme toute relation intime, signifiait s’engager. Offrir une partie de soi. S’exposer à une possible perte et, par conséquent, à la plus terrible des souffrances.

D’ailleurs, quelle nécessité avait-il de se marier ? Aucune. Le récent mariage de sa demi-sœur Alena laissait espérer la naissance d’un héritier, qui travaillerait sous son égide et lui succéderait en temps voulu à la tête de l’empire familial.

Toutefois, ce n’était pas seulement sa réticence à engager une femme qui discréditait Laura Westcotte à ses yeux. Malgré son CV impressionnant, ce que lui avait appris Alena ainsi que l’enquête qu’il avait ordonnée à son sujet prouvaient qu’elle n’avait ni déontologie ni sens des responsabilités ; on ne pouvait pas lui faire confiance. D’un point de vue moral, elle incarnait tout ce qu’il réprouvait chez un collaborateur. Hélas, aucun autre candidat au poste ne lui arrivait à la cheville. Et Vasilii était pressé.

Selon toutes les sources interrogées, la maîtrise du russe et du mandarin de la jeune femme était parfaite. De plus, elle manifestait une compréhension pénétrante tant du monde des affaires actuel que de la diplomatie chinoise, y compris dans leurs aspects les plus subtils. C’était précisément les qualités dont il avait besoin pour remporter le contrat qu’il visait depuis plus d’un an. Un échec mettrait en péril non seulement son empire industriel et ses profits, mais aussi toute possibilité de croissance future.

Sauf cas de force majeure, et en dépit de deux bonnes raisons de ne pas le faire, il n’avait pas le choix : il devait offrir le poste à Laura Westcotte.

* * *

Sur le seuil de l’appartement de Vasilii Demidov, Laura se persuada que c’était le trajet en ascenseur qui avait fait naître des papillons dans son ventre, en aucun cas la perspective de se retrouver face à son fantasme d’adolescente — se souvenir des scènes qu’elle avait imaginées à l’époque suffisait à la faire rougir. Après tout, il s’agissait d’un entretien d’embauche, pour un poste qu’elle devait à tout prix décrocher.

Elle n’avait pas droit à l’erreur.

Vasilii avait la réputation d’abattre froidement tout obstacle se dressant sur sa route. Aucune chance, donc, qu’il lui passe sa nervosité ou son manque d’assurance ; au contraire, il n’hésiterait pas à utiliser cette faiblesse à son avantage.

La porte de l’ascenseur coulissa dans un chuintement aérien et Laura pénétra d’un pas faussement assuré dans un vestibule rectangulaire au sol dallé de marbre, savamment éclairé par une série de spots discrets. Face à elle, une double porte, qui s’ouvrit automatiquement devant elle.

— Entrez, intima une voix grave et autoritaire.

« Pas très chaleureux, comme accueil », songea Laura en s’avançant dans une vaste pièce, à la fois moderne et confortable. Mais ce ne fut ni le décor ni le luxueux mobilier de créateur qui attirèrent son attention. Non, son regard fut immédiatement aimanté par l’homme debout devant l’une des fenêtres, le dos tourné.

Comme elle, il portait une tenue formelle : un costume sombre d’une coupe irréprochable. Ses cheveux noirs frôlaient le col de sa chemise blanche et ses mains bronzées reposaient le long de son corps. Il ne portait pas d’alliance. La lumière du jour éclairait son visage légèrement incliné, dont elle accentuait les pommettes saillantes et la mâchoire anguleuse.

Le papillonnement dans l’estomac de Laura se mua, dans tout son corps, en un tourbillon de sensations inconfortables. Etait-ce l’aura de virilité que dégageait Vasilii ? L’irrésistible attraction que cette aura exerçait sur elle ?

Impossible. Elle se connaissait trop pour laisser cela arriver. Non, ses sentiments d’adolescente pour Vasilii n’avaient rien à voir là-dedans, pas plus que le puissant magnétisme qui émanait de sa silhouette. Ce qu’elle éprouvait était un stress parfaitement légitime, se rassura-t-elle. Un stress d’ordre professionnel, rien de plus. Elle devait absolument obtenir ce travail.

D’un mouvement félin, Vasilii lui fit face.

De l’homme qu’elle vénérait à quatorze ans, elle avait dû garder une image un peu floue et idéalisée, car elle fut frappée de plein fouet par l’hostilité de son regard, plus glacial que le vent hivernal balayant les steppes.

Pour avoir séjourné en Russie, elle savait que ce vent vous mordait la chair et les sens, blessant quiconque n’était pas assez fort pour résister à ses assauts. C’était ce vent sans doute, et la chaleur brûlante du désert, qui avaient sculpté ce visage dépourvu de douceur. Le teint hâlé appelait les caresses et, dans le même temps, les prunelles gris acier interdisaient toute approche, prédisant le pire à l’imprudente qui se risquerait à une telle intimité.

Laura tâcha de masquer le choc reçu. Elle avait beau savoir, grâce à ses recherches, que Vasilii se targuait de n’avoir aucune faiblesse, constater cette réalité si manifestement gravée dans ses traits l’avait déstabilisée. Grand, large d’épaules, son interlocuteur portait un costume de marque raffiné, cachant moins un homme de chair et d’os qu’une véritable armure d’acier trempé.

Elle avait deviné au premier regard que le sang du peuple de sa mère coulait dans ses veines, mêlé à l’instinct de réussite de son père. Malgré son lien avec le désert, il émanait de lui une froideur distante, presque un rejet de sa propre humanité, alliée à un profond mépris envers les faiblesses d’autrui. Cette impression était si forte qu’elle en devenait agressive, à tel point que Laura se surprit à regretter de n’avoir pas à portée de main une chaise sur laquelle s’appuyer.

Ses sens comme son esprit lui soufflaient de faire demi-tour. De s’enfuir. Et pourtant… Ce frisson qui la parcourait, la conscience aiguë de la sensualité de cet homme — qui résonnait dans chaque cellule de son corps —, cela pouvait seulement signifier…

Rien ! Cela ne signifiait rien du tout ! se réprimanda-t-elle. Ce n’était que son imagination, ou un vestige de ses stupides fantasmes d’adolescente. Quelle que soit la réponse, elle devait se reprendre. Elle était là pour assurer son avenir, sa survie presque. Point.

* * *

Vasilii plissa les yeux pour mieux étudier la jeune femme qui lui faisait face. La photo sur son CV ne rendait pas justice à la perfection de ses traits, gravés dans un visage en forme de cœur dont il mesurait toute la délicatesse. Chose curieuse, et propre à éveiller ses soupçons, il n’y avait aucune trace d’elle sur le Net. Pas de photos embarrassantes, de clichés pris pendant des soirées étudiantes trop arrosées, pas plus que de rumeurs propres à éclairer quelque aspect de sa personnalité qui ne figurerait pas sur son CV.

Mais il n’avait pas besoin de cela. Il savait déjà exactement à quel genre de personne il avait affaire. Le genre qu’il méprisait le plus.

Oh ! bien sûr, elle était très séduisante, il devait le reconnaître ! Grande — dans les un mètre soixante-quinze — et élancée, elle portait un élégant blazer gris sur une robe tailleur ivoire qui épousait sa fine silhouette. Des escarpins assortis et un sac à main en cuir noir complétaient cette tenue résolument de circonstance. Mais il n’était pas dupe. Ni aveugle, du reste, aux courbes sensuelles que dessinait le tissu.

Instinctivement, il se demanda à quand remontait la dernière fois où il avait caressé les seins d’une femme, tout en couvrant sa gorge de baisers… Celle de Laura, d’une blancheur satinée, avait de quoi exciter plus d’un homme. Mais pas lui. Il maîtrisait ses instincts masculins, sans jamais les laisser le dominer. Quant au puissant élan de désir qui le traversait, ce n’était qu’une banale réaction physique. Une manifestation inexplicable et insignifiante. Il avait mieux à faire que s’y attarder.

S’approchant de son bureau, il saisit le dossier de la jeune femme.

— Je vois que vous maîtrisez le russe en plus du chinois. La plupart des hommes d’affaires russes parlent pourtant couramment l’anglais. Pourquoi ce choix ? demanda-t-il sèchement.

La question prit Laura au dépourvu.

— Mes parents étaient linguistes, expliqua-t-elle. Ils parlaient tous les deux le russe et j’ai commencé à l’apprendre auprès d’eux. J’ai pensé… non, cela m’a paru naturel de suivre leurs traces.

Une vérité approximative : comment aurait-elle pu avouer à l’homme qui lui faisait passer un entretien d’embauche que c’était l’espoir de lui parler un jour dans sa langue qui l’avait motivée, dix ans plus tôt, à apprendre le russe ?

— Vous avez préféré suivre leurs traces plutôt que forger votre propre chemin ? continua Vasilii. Dois-je comprendre que vous manquez d’ambition et de détermination ?

— Absolument pas !

Sa réponse avait jailli avec fermeté. Elle savait qu’il cherchait délibérément à la mettre mal à l’aise, mais cela ne prendrait pas.

— Certaines compétences se transmettent de génération en génération, ajouta-t-elle posément. Vous avez suivi les traces de votre père et prouvé, par votre réussite, votre talent pour les affaires. Le mien, si j’en ai un, a trait aux langues. Après le décès de mes parents, je cherchais quelque chose d’eux à quoi me raccrocher. Développer ces facilités m’a aidée à sentir qu’ils faisaient toujours partie de ma vie.

Quelque chose à quoi se raccrocher… Vasilii eut une vision fugace de sa mère telle qu’il l’avait vue pour la dernière fois. Cela ne fit qu’accroître son aversion pour cette Laura Westcotte. Avec son sentimentalisme ridicule, elle remuait en lui des souvenirs qu’elle n’aurait pas dû être capable d’effleurer, franchissait une limite dont personne n’avait jamais osé s’approcher. Pourquoi ? Comment cette femme, qu’il savait indigne de confiance, parvenait-elle à briser les défenses que même tout l’amour de sa belle-mère n’avait su fissurer ? C’était absurde ! Absurde et dangereux. Une personne comme Laura Westcotte ne pouvait pas, ne devait pas, représenter un quelconque danger pour lui.

— En vous demandant pourquoi vous aviez choisi d’apprendre le russe, j’attendais des arguments d’ordre professionnel, pas un étalage larmoyant de vos états d’âme d’adolescente.

Face au cynisme de Vasilii, Laura aurait voulu prendre la fuite. Autrefois, elle s’était sentie si triste pour lui en apprenant que sa mère était morte. Si sûre, aussi, qu’un lien spécial les unissait. Etait-ce la raison pour laquelle elle avait mentionné ses parents ? Pour renforcer ce supposé lien entre eux ? Bien sûr que non ! Pas consciemment, en tout cas… Du reste, une telle stratégie aurait été inutile. Aucune femme ne pouvait partager quoi que ce soit avec cet homme dur et froid.

Sa critique l’avait blessée et elle n’était plus sûre de vouloir travailler avec lui. Si elle n’avait pas eu tant besoin de ce contrat, elle aurait claqué la porte. Pas question, cependant, de subir passivement ses attaques.

— J’ai appris le russe pour des raisons personnelles, mais pas le mandarin, rétorqua-t-elle farouchement. Mes parents ne parlaient pas cette langue. Ce choix démontre bien mon intérêt pour le monde des affaires, ainsi que ma connaissance de l’importance croissante de la Chine sur les marchés mondiaux.

Vasilii s’étonna qu’elle ose le défier de la sorte. Il n’avait pas l’habitude de ce genre d’attitude, encore moins de la part d’une femme. Celles qu’il côtoyait se répandaient généralement en flatteries afin de le séduire.

— Vous avez fréquenté la même école que ma demi-sœur, Alena. Autant que je sache, aucun cours de mandarin n’y était dispensé.

Laura tressaillit imperceptiblement. Ainsi, Vasilii savait qu’elle avait été une camarade d’école d’Alena…

Soudain, elle se revit interroger sa tante, la directrice de leur école, pour savoir quand Vasilii viendrait chercher sa sœur. Ensuite, elle se postait à la fenêtre offrant la meilleure vue sur la cour où il se garait. Combien de fois s’était-elle imaginée s’approcher de lui, l’air de rien, tandis qu’il attendait Alena, sans jamais trouver le courage de passer à l’acte ! Ses joues s’empourprèrent de honte. Quelle idiote ! Heureusement, il n’avait aucun moyen de savoir cela. S’il connaissait l’école qu’elle avait fréquentée — et sans doute le fait que sa tante et tutrice en avait été la directrice —, c’est parce qu’en tant que futur employeur, il avait eu soin de se renseigner sur elle.

— Effectivement, le mandarin n’y était pas enseigné, convint-elle.

— Votre tante a donc dû vous payer des cours privés.

Il avait haussé un sourcil réprobateur. Laura encaissa sans broncher cette nouvelle remarque acerbe. Décidément, il ne l’aimait pas. Elle adopta un ton aussi froid que le sien pour lui répondre :

— Non, je les ai payés moi-même. Certaines élèves possédaient des chevaux, dont je nettoyais les box. Mon salaire m’a permis de payer mes leçons de mandarin. J’ai également économisé et acheté un vélo afin de faire le trajet jusqu’aux écuries.

Malgré lui, Vasilii imagina Laura Westcotte plus jeune, les cheveux attachés en queue de cheval, ses traits enfantins empreints de détermination tandis qu’elle enfourchait son vélo. Qu’il pleuve ou qu’il neige, elle partait effectuer les tâches que les jeunes filles de bonne famille jugeaient indignes d’elles, avant de commencer sa journée de cours. Son propre père insistait pour qu’il gagne lui-même son argent de poche ; même Alena, pourtant choyée et surprotégée, s’était vu assigner certaines tâches ménagères.

Il chassa vivement ces réflexions incontrôlées. Ce n’était pas dans son habitude de laisser ses émotions prendre le dessus. Encore moins de rapprocher sa situation personnelle de celle d’une parfaite inconnue. Comment en était-il arrivé là ? Il l’ignorait. Ce qu’il savait, c’est que cela ne devait plus se reproduire.

— J’aimerais que vous me lisiez ces notes à voix haute et les traduisiez en mandarin au fur et à mesure, dit-il en lui tendant une feuille de papier.

Laura survola rapidement le premier paragraphe — des données techniques relatives à des opérations boursières. En tant qu’ancienne employée d’une entreprise spécialisée dans la traduction et la négociation d’opérations financières complexes, elle n’aurait aucun mal à effectuer cette tâche. Alors pourquoi son corps tremblait-il ainsi ? Parce que Vasilii, en lui remettant la feuille, lui avait effleuré la main ? Ridicule ! Un contact aussi infime ne pouvait lui faire autant d’effet.

Inspirant profondément, elle commença à traduire le texte.

Vasilii plissa les yeux pour se concentrer sur l’exercice qu’il avait imposé à la candidate. Elle était douée, il devait le reconnaître. Son ancien assistant n’aurait pas été plus rapide, malgré son expérience.

— A présent, traduisez en russe, ordonna-t-il.

La jeune femme s’exécuta. Une fois de plus, sa traduction fut parfaite. Cela l’impressionna quelque peu, même s’il n’en attendait pas moins d’une postulante aspirant à devenir son assistante.

— Cela suffira. Vos compétences linguistiques font l’affaire. Cependant, vous n’êtes pas sans savoir que le succès d’une négociation avec les Chinois nécessite plus qu’une parfaite maîtrise du mandarin.

— Naturellement, répondit Laura. Même s’ils parlent une autre langue, les P.-D.G. et hauts dignitaires chinois aiment s’entourer d’une large équipe d’assistants et d’interprètes afin d’accroître leur standing. Cela fait partie intégrante de leur manière de faire des affaires. Etant donné que vous parlez vous-même le mandarin, je suppose que c’est pour une question de respect de ces usages que vous faites appel à quelqu’un d’autre pour mener la négociation.

— En effet.

Il l’observait sans mot dire, une expression indéchiffrable dans ses prunelles gris acier. D’instinct, elle sut qu’il la jugeait, tout en cherchant à la déstabiliser. Si seulement les relents de ce béguin d’adolescente voulaient bien la laisser tranquille ! Ils accaparaient ses émotions, son attention et minaient sa confiance en elle.

Après un silence interminable vint un coup auquel elle n’était absolument pas préparée — elle aurait dû, pourtant.

— Vous avez démissionné de votre précédent emploi avant d’en avoir trouvé un autre. Au vu de la conjoncture actuelle, c’est assez risqué, assena-t-il froidement. Pour quelle raison, mademoiselle Westcotte ?

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** Extrait offert par Penny Jordan **

She really should not be doing this. She really shouldn't.

It was a job—that was all. A job she needed now, thanks to what had happened, and needed badly.

A job working closely with Vasilii Demidov. Very closely. As his temporary PA, in fact. Mid-stride, Laura Westcotte stopped walking along London's Sloane Street.

Oh, for heaven's sake.

She wasn't fourteen any more, and in the grip of a massive crush on the very grown-up and breathtakingly, spine-shiveringly, far too excitingly male older half-brother of one of the new intake of day pupils at the school where her aunt was the matron and she'd been a pupil by virtue of her aunt's post, was she?

No, she wasn't.

Nor was she still the same silly girl who had secretly and eagerly searched the internet for every scrap of information she could find about Vasilii Demidov, committing to memory every single piece of information she'd managed to find about him. Thank goodness the big social networking sites hadn't existed then, for her to make a total public fool of herself with, Laura thought wryly. Snatching that photograph of him to daydream over in private had been bad enough.

She'd taken it when he had come to the school to collect his half-sister one Friday afternoon. Her hands had been trembling as she'd watched him walk from his car to where his half-sister had been waiting for him, the muscles of his male body moving so powerfully beneath their covering of denim jeans and a black tee shirt that the sight of him had made her go hot with longing. It was a wonder that the resultant photograph hadn't been so blurred as to be unrecognisable. She had hidden the print in her most sacred of special places: the 'secret' drawer of the jewellery box that had originally belonged to her mother, and which had always somehow held an echo of her mother's special scent. She still had that jewellery box.

And the photograph?

Now she was being ridiculous. If she did then it was simply because she'd never thought to throw it away. No other reason.

She had been such a very young and idealistic fourteen-year-old that worshipping from afar had come as naturally as breathing.

She had woven such ridiculous fantasies about the two of them meeting—the kind of fantasies that only an over-romantic, lonely girl with her hormones burgeoning into reckless life could weave. In her imagination she had even allowed herself to believe that because they had both lost their mothers there was a special bond between them.

All that and she had never even come face to face with him properly, never mind spoken with him. She had, though, dreamed endless daydreams about him, torn between an aching longing for him to notice her and the thrill of fear she had felt at the thought of that happening, and how she would cope with that level of sensual excitement.

So what? That had been then. This was now. She had just mentally said his name several times without her heartbeat going into fifth gear and then overdrive, hadn't she? No, she wasn't fourteen any more, Laura assured herself. But she still couldn't stop herself from glancing into the window of the expensive designer shop she was hurrying past on her way to her interview, as though she needed to reassure herself that the reflection she could see there was that of an assured twenty-four-year-old woman, and not a fourteen-year-old girl. A woman, moreover, whose brunette hair swung sleekly and under control to her shoulders, and whose blue-green eyes in her heart-shaped, Celtic pale-skinned face, like her soft full lips, were discreetly made-up—as befitted a careerwoman about to undergo an interview for a job upon which her immediate financial security depended.

So why the need to check? Surely she didn't really fear that somewhere within her that lonely, overly idealistic and romantic girl she had once been still existed, and that by some dangerous alchemy Vasilii Demidov could resurrect that girl and her crush on him just by the mere fact of them breathing the same air?

Instead of thinking about the past she should be focusing on her own present, Laura reminded herself. To mangle that famous Oscar Wilde quote, to be rejected and dismissed for one job for which she was well qualified might be overlooked as merely unfortunate, but to be rejected for a second would be a bad mark against her that would lie on her career history for a long time to come.

She was under no illusions, of course. She knew exactly why she hadn't been given the verbally promised promotion in her previous job. The reasons had, after all, been made more than clear to her by the company's new CEO.

The pain and humiliation of what she had undergone momentarily drove the colour from her face.

Oh, yes, she needed this job—a top-of-the-tree job working for Vasilii Demidov, as his PA, on a six-month contract that carried a salary that had made her catch her breath. It was nearly twice as much per month as she had been earning, plus it would open doors for her and enhance her CV—not to mention distance her from the present calamity to her career.

The fact that she had recently been on the internet once again, researching Vasilii Demidov, meant nothing other than that—like any candidate for a new job—she wanted to arm herself with as much knowledge about the business for which she hoped to be working as she could. And, in the case of Vasilii Demidov's business, Vasilii himself was the business.

And what a business. Vasilii had taken charge of the business portfolio originally begun by his late father and had turned it into a multinational empire. The head office of this empire might technically be located in Zurich, but from what Laura had been able to learn the reality was that the head of the empire still adhered to the traditions of the Nomad desert warriors of his maternal family. He travelled almost continuously between all the places in which he had business and financial interests.

Unlike so many other Russian oligarchs, Vasilii did not own lavish homes all over the world. Instead he stayed in hotel suites or concierge apartments, as though at heart his spirit needed to move as ceaselessly as the sands had once moved beneath the feet of the camels in the camel trains of his mother's people.

How intrigued and awed she had been at fourteen to learn that Vasilii, whilst being half Russian through his Russian father, could trace his roots back through his mother's family to one of the most noble and ancient races to travel the deserts and the rugged terrain of the southernmost part of Russia's old territories. There was a legend she had read saying that this tribe of light-skinned and light-eyed desert warriors had once mixed their blood with that of a lost Roman legion, and that their centuries-old pride in their warrior skills came from that time. There had been other stories on the internet about the tribe, and its fierce pride and equally fierce adherence to its own code of honour.

Like so many of the old desert tribes its numbers had been reduced by war and disease long before Vasilii's mother had been born. She had fallen in love with Vasilii's father, and then been lost to both her husband and her son in the most tragic of circumstances. She had felt such a surge of idealistic love when she had learned from her aunt the story of the kidnap and subsequent death of Vasilii's mother.

But that had been then, and this was now—and everything she knew about Vasilii Demidov now suggested that he was a man immune to the kind of vulnerabilities experienced by the rest of the human race. A powerful, hard-headed man, who was completely focused on the success of his business. Not the kind of man who was likely to welcome the knowledge that a fourteen-year-old had had such a huge crush on him that she…

That was enough!

Laura checked her watch and then quickened her walking pace. She must not be late for this all-important appointment—and she definitely must not be late because she was daydreaming about the man who would be interviewing her.

From his exclusive concierge apartment on the top floor of one of London's most prestigious hotels, Vasilii had an excellent view of Sloane Street and the surrounding neighbourhood as he stood at the window of the apartment's smart boutique-hotel-style sitting room. A shaft of late July sunshine falling across his face threw into relief the harsh scimitar-sharp angle of his cheekbones and the taut line of his jaw.

To his Russian compatriots the golden warmth of his skin and the autocratic boldness of his nose might mark his genes as those of an outsider—someone who belonged more to the Arab world than their own—but he had grown up just as much of an outsider to the world in his late mother's family as he had his father's: truly accepted by neither, marked physically by his mother's genes and mentally by his father's brilliance as a businessman. An outsider who had learned young to walk alone and to trust no one other than himself. Especially after his mother had been kidnapped and then murdered by her kidnappers in a rescue attempt that had gone wrong.

To have been as emotionally dependent on his mother's love as he had been as a child, and then to lose that love, had taught the man he had become the necessity of protecting himself against such vulnerability. And that was exactly what he had done, holding other people at a distance and promising himself that he would never allow himself to become vulnerable to the pain of love and loss again.

Right now, though, it wasn't the past that was making him frown, it was the present. The present and a certain Miss Laura Westcotte.

If it had been unfortunate that his PA had had to take compassionate leave for six months to be with his sick wife, then it had been irritating that the temp hired to take his place had gone down with a particularly vicious form of the norovirus bug—just when Vasilii had been at the most delicate state possible of negotiations wit...

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