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Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,
Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m'attends.
J'irai par la forêt, j'irai par la montagne.
Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps.
Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées,
Sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit,
Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées,
Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit.
Je ne regarderai ni l'or du soir qui tombe,
Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur,
Et quand j'arriverai, je mettrai sur ta tombe
Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur.
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15 février 1843
Aime celui qui t'aime, et sois heureuse en lui.
- adieu! - sois son trésor - ô toi qui fus le nôtre!
Va, mon enfant béni, d'une famille à l'autre !
Ici, l'on te retient ; là-bas , on te désir.
Fille, épouse, ange, enfant, fais ton double devoir.
Donne-nous un regret, donne-leur un espoir,
Sors avec une larme! Entre avec un sourire!
Dans l'église 15 février 1843
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— 4 septembre 1843
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15 février 1843
Aime celui qui t'aime, et sois heureuse en lui.
- Adieu ! - Sois son trésor, ô toi qui fus le nôtre !
Va, mon enfant béni, d'une famille à l'autre.
Ici, l'on te retient ; là-bas, on te désire.
Fille, épouse, ange, enfant, fais ton double devoir.
Donne-nous un regret, donne-leur un espoir,
Sors avec une larme ! entre avec un sourire !
Dans l'église, 15 février 1843.
Afficher en entier4 septembre 1843
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III. Trois ans après
Il est temps que je me repose;
Je suis terrassé par le sort.
Ne me parlez pas d'autre chose
Que des ténèbres où l'on dort!
Que veut-on que je recommence?
Je ne demande désormais
A la création immense
Qu'un peu de silence et de paix!
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Pourquoi m'appelez-vous encore?
J'ai fait ma tâche et mon devoir.
Qui travaillait avant l'aurore,
Peut s'en aller avant le soir.
A vingt ans, deuil et solitude!
Mes yeux, baissés vers le gazon,
Perdirent la douce habitude
De voir ma mère à la maison.
Elle nous quitta pour la tombe;
Et vous savez bien qu'aujourd'hui
Je cherche, en cette nuit qui tombe,
Un autre ange qui s'est enfui!
Vous savez que je désespère,
Que ma force en vain se défend,
Et que je souffre comme père,
Moi qui souffris tant comme enfant!
Mon oeuvre n'est pas terminée,
Dites-vous. Comme Adam banni,
Je regarde ma destinée,
Et je vois bien que j'ai fini.
L'humble enfant que Dieu m'a ravie
Rien qu'en m'aimant savait m'aider;
C'était le bonheur de ma vie
De voir ses yeux me regarder.
Si ce Dieu n'a pas voulu clore
L'oeuvre qu'il me fit commencer,
S'il veut que je travaille encore,
Il n'avait qu'à me la laisser!
Il n'avait qu'à me laisser vivre
Avec ma fille à mes côtés,
Dans cette extase où je m'enivre
De mystérieuses clartés!
Ces clartés, jour d'une autre sphère,
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O Dieu jaloux, tu nous les vends!
Pourquoi m'as-tu pris la lumière
Que j'avais parmi les vivants?
As-tu donc pensé, fatal maître,
Qu'à force de te contempler,
Je ne voyais plus ce doux être,
Et qu'il pouvait bien s'en aller!
T'es-tu dit que l'homme, vaine ombre,
Hélas! perd son humanité
A trop voir cette splendeur sombre
Qu'on appelle la vérité?
Qu'on peut le frapper sans qu'il souffre,
Que son coeur est mort dans l'ennui,
Et qu'à force de voir le gouffre,
Il n'a plus qu'un abîme en lui?
Qu'il va, stoïque, où tu l'envoies,
Et que désormais, endurci,
N'ayant plus ici-bas de joies,
Il n'a plus de douleurs aussi?
As-tu pensé qu'une âme tendre
S'ouvre à toi pour se mieux fermer,
Et que ceux qui veulent comprendre
Finissent par ne plus aimer?
O Dieu! vraiment, as-tu pu croire
Que je préférais, sous les cieux,
L'effrayant rayon de ta gloire
Aux douces lueurs de ses yeux!
Si j'avais su tes lois moroses,
Et qu'au même esprit enchanté
Tu ne donnes point ces deux choses,
Le bonheur et la vérité,
Plutôt que de lever tes voiles,
Et de chercher, coeur triste et pur,
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A te voir au fond des étoiles,
O Dieu sombre d'un monde obscur,
J'eusse aimé mieux, loin de ta face,
Suivre, heureux, un étroit chemin,
Et n'être qu'un homme qui passe
Tenant son enfant par la main!
Maintenant, je veux qu'on me laisse!
J'ai fini! le sort est vainqueur.
Que vient-on rallumer sans cesse
Dans l'ombre qui m'emplit le coeur?
Vous qui me parlez, vous me dites
Qu'il faut, rappelant ma raison,
Guider les foules décrépites
Vers les lueurs de l'horizon;
Qu'à l'heure où les peuples se lèvent,
Tout penseur suit un but profond;
Qu'il se doit à tous ceux qui rêvent,
Qu'il se doit à tous ceux qui vont!
Qu'une âme, qu'un feu pur anime,
Doit hâter, avec sa clarté,
L'épanouissement sublime
De la future humanité;
Qu'il faut prendre part, coeurs fidèles,
Sans redouter les océans,
Aux fêtes des choses nouvelles,
Aux combats des esprits géants!
Vous voyez des pleurs sur ma joue,
Et vous m'abordez mécontents,
Comme par le bras on secoue
Un homme qui dort trop longtemps.
Mais songez à ce que vous faites!
Hélas! cet ange au front si beau,
Quand vous m'appelez à vos fêtes,
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Peut-être a froid dans son tombeau.
Peut-être, livide et pâlie,
Dit-elle dans son lit étroit:
"Est-ce que mon père m'oublie
Et n'est plus là, que j'ai si froid?"
Quoi! lorsqu'à peine je résiste
Aux choses dont je me souviens,
Quand je suis brisé, las et triste,
Quand je l'entends qui me dit: "Viens!"
Quoi! vous voulez que je souhaite,
Moi, plié par un coup soudain,
La rumeur qui suit le poète,
Le bruit que fait le paladin!
Vous voulez que j'aspire encore
Aux triomphes doux et dorés!
Que j'annonce aux dormeurs l'aurore!
Que je crie: "Allez! espérez!"
Vous voulez que, dans la mêlée,
Je rentre ardent parmi les forts,
Les yeux à la voûte étoilée... -
Oh! l'herbe épaisse où sont les morts!
Novembre 1846.
Afficher en entierFuyez, mes doux oiseaux ! évadez-vous tous deux
Loin de notre nuit froide et loin du mal hideux !
Franchissez l'éther d'un coup d'aile !
Volez loin de ce monde, âpre hiver sans clarté,
Vers cette radieuse et bleue éternité
Dont l'âme humaine est l'hirondelle !
Afficher en entierX
Pendant que le marin, qui calcule et qui doute,
Demande son chemin aux constellations;
Pendant que le berger, l’œil plein de visions,
Cherche au milieu des bois son étoile et sa route;
Pendant que l'astronome, inondé de rayons,
Pèse un globe à travers des millions de lieues,
Moi, je cherche autre chose en ce ciel vaste et pur.
Mais que ce saphir sombre est un abîme obscur!
On ne peut distinguer, la nuit, les robes bleues
Des anges frissonnants qui glissent dans l'azur.
Avril 1847.
Afficher en entierV
Elle avait pris ce pli dans son âge enfantin
De venir dans ma chambre un peu chaque matin;
Je l'attendais ainsi qu'un rayon qu'on espère;
Elle entrait et disait: "Bonjour, mon petit père;"
Prenait ma plume, ouvrait mes livres, s'asseyait
Sur mon lit, dérangeait mes papiers, et riait,
Puis soudain s'en allait comme un oiseau qui passe.
Alors, je reprenais, la tête un peu moins lasse,
Mon oeuvre interrompue, et, tout en écrivant,
Parmi mes manuscrits je rencontrais souvent
Quelque arabesque folle et qu'elle avait tracée,
Et mainte page blanche entre ses mains froissée
Où, je ne sais comment, venaient mes plus doux vers
Elle aimait Dieu, les fleurs, les astres, les prés verts,
Et c'était un esprit avant d'être une femme.
Son regard reflétait la clarté de son âme.
Elle me consultait sur tout à tous moments.
Oh! que de soirs d'hiver radieux et charmants,
Passés à raisonner langue, histoire et grammaire,
Mes quatre enfants groupés sur mes genoux, leur mère
Tout près, quelques amis causant au coin du feu!
J'appelais cette vie être content de peu!
Et dire qu'elle est morte! hélas! que Dieu m'assiste!
Je n'étais jamais gai quand je la sentais triste;
J'étais morne au milieu du bal le plus joyeux
Si j'avais, en partant, vu quelque ombre en ses yeux.
Novembre 1846, jour des morts.
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