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Liste des extraits
Chaque lettre reçue commence par le cri déchirant de l'enveloppe et s'ouvre sur du temps passé avec amour, parfois sur un seul mot prêt à enflammer tous les autres, qu'il s'agisse de missives passionnées, désespérées ou vindicatives. (chapitre 20)
Afficher en entierNous sommes tous venus au monde pour profiter de cette chance fabuleuse qu'est la lecture, magique, énigmatique dans sa découverte puis son apprentissage. (chapitre 12)
Afficher en entierLa lecture est eau, elle file entre les doigts de la mémoire, elle a des résurgences brutales ou paisibles, amicales ou hérissantes.(chapitre 11)
Afficher en entierAdieu bonbons, avions et voitures miniatures, mais bonjour la lecture. (chapitre 9)
Afficher en entierpage 92
-Allez, bois, et dis moi si la lecture, c'est la vie vraie."
Une gorgée fait passer le brise ménage, appellation argotique lui expliqué*je, d'une joue à l'autre. J'avale et commente :
"-Ce vin est d'une grande rudesse, rêche et maigre, aux arômes légumiers. Persistance ridicule en bouche. Peut se conserver quelques semaines. Vin d'inélégance réelle, à ne pas accompagner d'une viande crue, une tripaille ou un yaourt."
-Bravo, tu viens d'inventer la lecture-biture. Il est des choses à lire qui nous saoulent. La vie est bien trop courte pour nous y attarder. Bravo d'avoir ainsi claqué la porte en massacrant ce texte vaniteux."
Afficher en entierFolio, p. 122
« Les femmes aiment la vie de couple avec un livre.
En longue et ancienne liaison.
En aventure de vacances.
En passion éternelle.
Livre épluché d'une main, tenu par l'autre comme on tient un tout petit bébé, les lectrices observent l'objet de leur plaisir droit dans les yeux.
Allongées sur le ventre, bouquin pris dans la pince des bras, elles ne prêtent aucune attention aux ballons et aux cris d'enfants sur la plage, tandis que le soleil martèle et forge leur corps.
Parfois se contracte un muscle, à l'image des chevaux chassant une mouche sur leur croupe.
Une fesse, ou les deux, ce qui rappelle à la liseuse que leur anatomie est bien là, à portée de mains invisibles ou de regard à basse altitude. »
Afficher en entierFolio, p. 115
« Il n'existe pas de plus bel éloge de la lecture que la lecture elle-même, que cet embarquement à bord des mots pour mots.
La lecture fiction, évoquant un univers imaginaire, est à proprement parler lecture à mes yeux, et non le récit-essai qu'est ce "Petit éloge de la lecture", qui évidemment, est lui aussi lecture. »
Afficher en entierFolio, p. 108
« GRAMÈRE FRANSÈZE
D'APRÈS LA RÉFORME ORTOGRAFIQE.
Des siècles d'évolution de notre langue y sont passés au laminoir.
Des origines antiques des mots, des arborescences étymologiques, des croisements et des dérivations plurilingues, il n'en reste qu'une sorte de volapük rédigé à la façon de messages secrets, au code aussi flou qu'introuvable.
Pauvre Jean de La Fontaine cloué pour l'exemple au pilori phonétique.
Et pauvre de moi condamné en mon jeune temps à la lecture à haute voix — ainsi que la pratiquaient les Romains — de mots suivis de nouveaux par mon doigt d'apprenti hésitant sous cette langue trop neuve :
" Mêtre qorbô, sur õn arbre pèrjé,
Tenèt an son bèq un fromaje.
" Û l'on vūat mêtre préséder qorbô ôquel il se raporte ét lés mots sur õn arbre pèrjé dépandre de qorbô de même que tūt se qi suit. "
Cher lecteur, je vous fais grâce de ce " se qi suit " tant sa lecture est exténuante mais j'entends planer au-dessus du chaos ce passage de "Tristes tropiques" de Levi-Strauss : " L'intruction obligatoire, qui se développe au cours du XIXe siècle, va de pair avec l'extension du service militaire et la prolétarisation. La lutte contre l'analphabétisme se confond ainsi avec le renforcement du contrôle des citoyens par le pouvoir. Car il faut que tous sachent lire pour que ce dernier puisse dire : nul n'est censé ignorer la loi."
Nul n'est non plus tenu d'ignorer la littérature, mais cette injonction reste tacite, donc facilement contournable. »
Afficher en entierFolio, p. 106
« L'usage typographique du " S " m'amusait.
Présent dans un autre livre de la même époque sous la forme qu'on lui connaît aujourd'hui à la fin des mots, il s'écrivait " f " au début ou au milieu de ces derniers.
" Ô, le bon temps de la moiffon, on eft enfenble fans façon. "
Cher lecteur, prenez à votre tour le temps de lire à haute voix ces deux vers de M. Du Belloy, auteur des " Moissonneurs ", et vous pafferez pour un infirme de la prononciation. »
Afficher en entierFolio, p. 104
« Les lettres qui nous parviennent sous enveloppe ont leur mystère.
On en cherche la provenance ou l'auteur par l'oblitération postale, le style graphique, la présence sur le verso d'un signe livrant l'énigme.
On s'éloigne de la boîte aux lettres, on monte un escalier, on longe un couloir.
Le mystère ricoche.
De supposition en supposition.
Mais qui m'écrit ?
Debout ou en arrêt, on tourne et retourne l'enveloppe.
Une fois ouverte, les lignes muettes défilent si vite que des mots nous échappent.
[...]
Chaque lettre reçue commence par le cri déchirant de l'enveloppe et s'ouvre sur un seul mot prêt à enflammer tous les autres, qu'il s'agisse de missives passionnées, désespérées ou vindicatives. »
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