Prisonnière Du Passé

Chapitre 1:

Après les premières étapes du voyage qu'elle avait effectuées au départ de Venise, en vaporetto puis en train, Abby appréciait de pouvoir enfin prendre la route pour atteindre le but de sa mission. Elle consulta la carte, prit une ou deux minutes pour se familiariser avec les commandes de la voiture de location et s'engagea sur la route sinueuse qui serpentait au coeur de la campagne de l'Ombrie nimbée de lumière.

Tout d'abord, elle savoura chaque seconde du parcours. De part et d'autre de la route défilaient des paysages de cartes postales, jalonnés de petits villages, de cyprès et de vignes parfaitement entretenues. Mais au bout d'un certain nombres de kilométres, le plaisir se transforma en inquiètude. La voiture devait maintenant gravir une imposante colline sur une route raide et escarpée, au macadam de plus en plus incertain où cahque virage se négociait en épingle à cheveux. Bien que conductrice chevronnée, Abby sentit son estomac se nouer au vu de l'étroitesse de la route. Que se passerait-il si, soudain, elle se retrouvait face à un véhicule venant en sens inverse?

Les yeux focalisés sur la route devant elle, elle ne vit pas la lumière s'allumer sur le tableau de bord. Soudain, un jet de vapeur jaillit sous le capot et une odeur de métal brûlé parvint à ses narines. Un rapide cou pd'oeil aux voyants de contrôle confirma ses pires craintes. La voiture chauffait anormalement!

Elle gara tant bien que mal le véhicule sur le bord de la route, serra le frein à main, laissa la première vitesse enclenchée et coupa le moteur. Ces précautions élémentaires prises, elle actionna la manette commandant l'ouverture du capot situé sous le volant et glissa hors de la voiture. De la vapeur sortait toujours du moteur. Dans ces conditions, il n'était pas question de toucher à quoi que se soit, au risque de se brûler gravement. Elle se mordit la lèvre. Sous le soleil torride du milieu d'après-midi, il était inutile d'espérer le voir se refroidir rapidement. En désespoir de cause, elle finit par prendre un morceau de tissus dans le coffre, s'en couvrit les mains et ouvrit le capot. Elle dut sauter en arrière pour éviter le jet de vapeur qui en sortait.

A l'évidence, le radiateur avait encore plus soif qu'elle et le doute n'était plus permis: elle allait être sérieusement en retard à son rendez-vous! Il ne lui restait plus qu'à en avertir la personne qui l'attendait. Quelques secondes plus tard l'oreille collée à son téléphone portable, elle laissa échapper un juron. Aucune tonalité. Il n'y avait pas de réseau dans ce coin perdu. Elle referma le capot.

Elle n'avait d'autre alternative que la marche sous un soleil de plomb. Elle se préparait à prendre son chapeau abandonné sur la banquette arrière quand, soudain, le rugissement d'un moteur lui parvint. Une voiture gravissait la colline! Sans plus réfléchir, elle se jeta au milieu de la route, agitant frénétiquement les bras afin d'arrêter le bolide qui, brusquement, avait surgis du dernier virage dans un nuage de poussière. A la toute dernière seconde, Abby bondit sur le côté pour se mettre à l'abri, son coeur battant à tout rompre, tandis que dans un horrible crissemnt de pneu, la voiture s'arrêtait à quelques centimétres seulement d'elle, projetant une pluie de gravier.

Seigneur, il s'en était fallu de peu qu'elle se trouvât sous les roues du bolide!

Les jambes flageollantes, elle se prépara à subir la colère justifiée de l'homme qui sortit en toute hâte du véhicule. Comme elle s'y attendait, il l'apostropha d'une tirade en italien dont elle ne comprit pas un traître mot. Elle leva les mains en signe d'apaisement.

-Je suis vraiment désolé, monsieur, s'excusa-t-elle. Ma voiture vient de tomber en panne. Parlez-vous anglais?

Sourcils froncés, l'homme s'exclama dans cette langue sans la moindre trace d'accent:

-Une Anglaise! Mais que diable venez-vous faire ici? Cette route est privée. J'aurais pu vous tuer!

- C'est vrai, mais vous ne l'avez pas fait, alors tout va bien! Je me rendais à la villa Falcone quand...

-Ah, je vois! Vous êtes une fan de Gianni!

Le ton méprisant la fit réagir.

-Vous vous trompez! Je doit en effet rencontrer M. Giancarlo Falcone, mais dans le carde de mon travail.-Dans le carde de votre "travail", naturellement! C'est généralement l'excuse que toutes inventent pour l'approcher. Mias qui que vous soyez, vous êtes totalement inconsciente de vous jeter ainsi sous les reoues de ma voitures. Dieu merci, j'ai des réflexes et de bons freins.

Dans son métiers, Abby avait l'habitude de traiter avec des personnalités ombageuses et récalcitrantes, et elle possédait des trésors de patience. Mais il faisaist anormalent chaud, elle était fatiguée, stréssée et, surtout, en retard pour un rendez-vous ^d'une extême importance. Aussi n'était-elle pas d'humeur à recevoir une leçon de morale.

-Si cette route conduisait à la villa Falcone est privée, qui êtes vous? demanda-t-elle avec ironie. Un fan, un intrs?

Le visage de l'homme-beau et harmonieux par ailleurs- se crispa de colère.

-Apprenez, chère demoiselle, que cete route conduit non pas à la ville Falcone mais à ma propre demeure. Vous vous êtes illégalement introduite dans ma propriété.

Oh! s'exclama Abby, rouge de confusion. Veuillez accepter mes excuses. J'ai dû me tromper quelque part...

-De toute évidence. Voyons un peu quel problème à votre véhicule.

Abby souleva de nouveau le capot et recula d'un pas, permettant ainsi à l'homme de se pencher sur le moteur. Elle nourrisait très peu d'espoir qu'il pût résoudre le problème mais; lorsqu'il se redressa pour lui faire face, elle arqua les sourcils. Sans les lunettes de soleil qu'il venait d'ôter, son visage hâlé par le soleil, lui sembali tout à coup étrangement familier. Impossible. Le soleil devait lui jouer des tours.

-Votre radiateur est percé, annonça-t-il. Hélas, vous ne pouvez continuer votre route. J'en suis désolé.

Abby réussit à esquisser un sourire.

-Ce n'est en rien votre faute.

-Je suis désolé de vous avoir soupçonnée. Je pensais que cette panne était feinte. Les fans de Gianni font preuve d'une incroyable créativité dans leur tentatives pour l'approcger.

Abby lança un regard désespéré à sa montre.

-M. Falcone m'atten, je peux vous l'assurer. Maintenant, je suis en retard au rendez-vous qu'il bien voulu m'accorder et il m'a été imposiible de le joindre avec mon portable. Il n'y a pas de réseau.

-Je sais. On doit nous installer un relai depuis des lustres. Je propose que vous m'accompagniez jusque chez moi. Ce n'est pas très loin. Vous pourrez alors utiliser mon téléphone fixe et joindre Gianni. Il enverra quelqu'un vous chercher. Aviez-vous...euh...l'intention de passer la nuit chez lui?

-Pas du tout! J'ai réservé une chambre dans un hôtel à Todi. Après mon entretien avec M. Falcone, je rejoindrai la ville en taxi.

Pour la première fois, elle eut droit à un sourire.

-Bien. Quittons ce lieu pour le moins inconfortable. A propos, m'appelle Max Wingate.

Totalement sous le charme de son sourire, Abby répondit sans attendre: Et, moi, Abigail Green. Merci pour votre aide, monsieur Wingate.

Sans plus attendre, elle récupéra ses affaires dans le coffre de la voiture, se coiffa de son chapeau et pris place sur le siège passager de la puissante Range Rover, un 4x4 fort utile sur ce type de route. L'habitacle du véhicule était incroyablement luxueux et son confort impressionnant. Cela changeait de sa voiture louée à bas prix! Toutefois, tandis que son sauveur négociait chaque virage avec une habilité certaine, elle se tint raide et inquiète sur son siège. Et c'est avec un réel soulagement qu'elle vit la voiture franchir un porche et s'arrêter dans la cour d'une imposante demeure aux couleur sable.

-C'est magnifique! s'exclama-t-elle, sincère.

Les fenêtres, toutes différentes les unes des autres, ornaientles murs sans aucun souci de symétrie. Chacune devaient offrir une vue splendide sur la campagne environnante, parsemée de collines couvertes de vignes et de cyprès. L'effet était saisissant.

-Quel panorama impressionnant! dit-elle. Ca vaut vraiment la peine de grimper jusqu'ici.

Son enthousiame spontané fit de nouveau sourire Max Wingate.

-Venez, ne restons pas là, mademoiselle Green. Mettons-nous à l'abris du soleil.

Ils pénétrèrent à l'intérieur de la demeur, traversèrent le hall jusqu'à un salon orné de poutres apparentes et d'une cheminée monumentale.

-Prenez place dans un fauteuil. Mettez-vous à votre aise. Je vais vous chercher un jus de fruits.