Women Murder Club, Tome 14.5 : Procès mortel

Revêtu de l’uniforme orange des prisonniers et menotté, le Martinpêcheur n’avait plus rien de bien flamboyant. Il n’avait cependant rien d’ordinaire non plus. J’ai réfléchi à la meilleure approche qui s’offrait à moi. Je pouvais le flatter, essayer de me concilier ses bonnes grâces, le séduire en exprimant ma compassion, une technique d’interrogatoire efficace et éprouvée. À l’inverse, je pouvais jouer les teignes.

J’optai pour un juste milieu.

— Re-bonjour, monsieur Sierra, commençai-je en le fixant droit dans les yeux. La carte d’identité que nous avons trouvée dans votre portefeuille prétend que vous êtes Geraldo Rivera.

Cela me valut un petit sourire narquois.

— Joli nom. Mais est-ce vraiment le vôtre ?

Nouveau rictus moqueur.

— Ça vous va, si je vous appelle Jorge Sierra ? Telle est l’identité qu’a établie notre logiciel de reconnaissance faciale.

— À vous de voir, inspectrice. C’est votre domaine.

— Je suis sergent. Et puisque c’est mon domaine, ce sera M. Sierra. Je vous propose que nous procédions de la façon la plus simple et efficace.

Vous répondez à quelques questions, et nous en restons là pour ce soir. Vous êtes fatigué, moi aussi. Malheureusement, internet s’affole. Le FBI veut votre peau, les autorités mexicaines également. Les démarches d’extradition ont déjà commencé. Vos compatriotes en salivent d’avance.

— Tout le monde m’adore.

Je plaçai les permis de conduire de Lucille Stone et Cameron Whittaker sur la table.

— Quelles étaient vos relations avec ces deux femmes ?

— Elles m’ont l’air toutes les deux ravissantes, mais je ne les ai jamais vues.

— Avant ce soir, vous voulez dire ? Selon un témoin, vous les auriez tuées.

— Connais pas, jamais vues.

Ouvrant une chemise, j’en tirai une photo A4 de Lucille Stone écroulée au pied du bar.

— Celle-ci a reçu une balle en plein cœur et une autre au cou.

— Tragique. C’est bien ainsi que vous dites ?

— C’était votre maîtresse, n’est-ce pas ?

— Je n’ai pas de maîtresse. Je suis marié.

— À Elena Sierra, je sais. Qui habiterait San Francisco avec vos deux enfants.

Pas de réaction. Je produisis le cliché de la blonde affalée sur le comptoir.

— Cameron Whittaker. J’ai compté trois ou quatre impacts, mais il est possible qu’il y en ait plus.

— Je ne la connais ni d’Ève ni d’Adam, a-t-il lâché avec une indifférence totale.

— Mouais. Toujours d’après notre témoin, votre petite amie et

Mlle Whittaker paraissaient très proches l’une de l’autre. Proches au point de s’embrasser, par exemple.

Cette fois, le Martin-pêcheur parut réellement amusé.

— Désolé, je ne les ai pas vues faire. Pourtant, le spectacle m’aurait sans doute réjoui. Je vous répète que je ne suis pour rien dans leur mort.

Je sortis le portrait des deux tireurs réalisé par la scientifique.

— Ces hommes, auriez-vous l’obligeance de les identifier pour nous ?

Tous deux ont des tatouages de gangs, mais les papiers qu’ils avaient sur eux sont faux. Nous aimerions pouvoir avertir leurs familles.